20 avril, à genoux nous te demandons pardon !
Printemps berbère, ton nom dit long, tu as connu les accusations, la répression, l'humiliation alors que tu ne réclamais que la solution pour l'autochtone population.
Tu as résisté au froid des geôles et tu as bravé la peur des dictateurs. Pour l'honneur, tu as payé un prix fort, mais tu es sorti vainqueur et tu as touché les cœurs de tes frères et de tes sœurs. Chaque année, nous t'accueillons comme un ange avec des louanges, mais cette année, nous te ferons entendre des choses qui dérangent.
Oui, aujourd'hui, nous devons faire notre mea culpa et reconnaître nos faux pas et dire que nous sommes fautifs, car nous avons omis ton noble objectif.
À l'occasion de ton trente-cinquième anniversaire, je mets le genou à terre pour faire un aveu clair et sincère au nom de mes frères. Comme Judas, nous avons déchu très bas, nous avons trahi ton combat. Lorsque tu visiteras ce lieu, tu le verras de tes propres yeux.
Tu ne reconnaîtras plus tes villages. Tajmaat qui était notre phare est remplacé par un bar. La mosquée qui rassemblait nos sincères croyants et abritait les mendiants est envahie par les charlatans. L'imam est devenu le clairvoyant et le savant un mécréant qui doit périr par le feu.
Tu ne reconnaîtras plus certaines de nos femmes, elles ont troqué leurs robes aux multi couleurs contre le tchador et la vie contre la mort. Tu ne reconnaîtras plus nos hommes ; le Kamis a pris la place du burnous, la moustache est rasée, la barbe a poussé. Entre eux c'est la langue que l'on dit du paradis qui prend le dessus.
Dans nos assemblées, nos jeunes s'expriment dans la langue d'Anatole France, pour afficher leur science et leur connaissance. Ils pensent que c'est en niant la langue de sa naissance qu'on avance. Et lorsque tu arrives, ils se mettent sur le qui-vive, dénoncent ceux qui dérivent et disent qu'ils prennent la relève.
Lorsque tu arriveras à la cité des Genêts où tu es né, tu seras déçu. Ta langue régresse et le charabia progresse. La JSK a perdu son "K". Ceux qui font leurs lits avec des billets l'ont dérobé à la Kabylie.
Bougie, la prospère de tous les âges, on veut la mettre en cage et déchirer du livre d'histoire sa page. Yemma Gouraya du haut de son mont a les yeux larmoyants en contemplant sa ville qui dérive et sa culture que l'on achève sans que ses enfants se lèvent.
Chaque fois que l'un de tes enfants quitte la montagne et descend dans la plaine, il abandonne sa langue et son patrimoine. Chaque fois que l'un de tes enfants traverse la mer, il ne parle plus que la langue de Molière ou celle de Shakespeare aux dépens de celle de sa mère.
Achab Ramdane, l'un de tes acteurs, nous a appris que la langue de nos aïeux nous dira adieu dans cent ans si nous continuons à tourner en rond et à céder les lieux aux démons./p>
Ô printemps ! Serre tes poings, mets tes gants et brise-nous le nez et le menton pour nous réveiller et faire un sursaut. Secoue-nous, nous mourrons. Sensibilise mes frères et sœurs égarés. Dis-leur que nous sommes en danger et que tamazight sera anéantie si nous parlons autre que le berbère à nos petits. Dis-leur que ce n'est pas que la langue de l'étranger qui fait un érudit et que ce n'est pas le parler de l'orient qui fait un fervent croyant.
Mon printemps, maintenant, je mets le deuxième genou à terre et devant toi, je me prosterne en rendant hommage à tous ceux qui ont sacrifié leurs âges et ceux qui ont bravé la peur de l'oppresseur la main sur le cœur et à ceux qui ont donné leurs vies pour l'Amazighité de notre patrie.
Je me lève et je m'adresse à mes frères : l'Algérie est notre terre et personne n'a le droit de faire taire la langue de nos mères. Tant que votre langue est dans la bouche, personne ne la touche, mais si vous l'avalez, vous allez vous suicider et c'est là que réside le danger.
Rachid Mouaci
Commentaires (2) | Réagir ?
Espérons que cet appel au réveil soit entendu il y va de la suvie de nore "ètre" et notre jeune génération stop immédiatement ces derives. Honte à ceux qui ont trahi et favorisé ce désastre.
Adhi r'hamrebi thametouth iki diwrwen (Que Dieu benisse la femme qui t' a donné la vie)