Abou Teflika et Ibn Toumert : la tentation du sacré !
Le sacré comme moyen de gouvernance réunit les deux hommes, Ibn Toumert et Abdelaziz Bouteflika.
Par Youcef Rezzoug
Pour l’un, il est idéologique et de conviction, et pour l’autre, ce n’est que du bluff en titillant la fibre religieuse ancestrale d’une grande partie de la population en manque de culture politique et religieuse. Le reste : le parallèle est édifiant entre les deux personnages. Ils sont nés tous les deux au Maroc et sans progéniture leur permettant de transmettre la succession. Mais pour conserver le trône, ils n’hésitent pas à s’appuyer d’abord sur leurs tribus respectives. La différence ? Ibn Toumert était courageux et il mourra suites à ses blessures au combat mené contre les Almoravides, aux portes de Marrakech.
«Le gaz de schiste est un don de Dieu !», tel est l’argument du Président Bouteflika pour justifier l’exploitation de cette énergie non-conventionnelle et l’imposer contre la volonté du peuple. La rhétorique est rodée et à laquelle on s’est même habitué depuis son intronisation en 1999 en tant qu’ «homme providentiel» ou «messie», un Mahdi qui allait délivrer le pays de ses 20 ans d’errance dans le laxisme et l’absence de l’Etat. Il promettait de le mettre sur rails en le dirigeant avec une main de fer. Il convoquait à cet effet le sacré et la religiosité ambiante pour s’adresser au peuple ou pour mettre au pilori les contestataires.
La réforme qu’il s’est empressé, en premier lieu, à faire passer en 2002 est celle du code pénal en introduisant deux articles hissant le Président de la République à la hauteur de Dieu. Le délit de la diffamation à son encontre est puni au même titre que celui du blasphème. Et la peine est plus lourde. Bouteflika s’est ainsi autoproclamé «infaillible» et sa parole relève de divin, elle ne peut s’accommoder d’une critique.
Pour mater les tribus berbères contestataires et mener la guerre aux Almoravides, Ibn Toumert s’est autoproclamé Mahdi en reprenant à son compte un rite chiite inhérent à l’existence d’un douzième Imam, qui marquera son retour par l’épuration de la société musulmane de « tous les travers, la perversion et les dépravations». Ibn Toumert interdit ainsi toute distraction dont la musique ; et il rendra la pratique religieuse obligatoire.
Il aurait usé de tout un subterfuge, à la manière du coup de Laser du FIS (Front Islamique du Salut) en 1991 au stade de 5-Juillet, pour faire croire aux tribus qu’il est le porteur de la parole divine. Selon l’histoire, il aurait caché des soldats au fond d’un puits, situé dans une mosquée à Bejaia, dans la ville où il avait rencontré auparavant son fidèle disciple et lieutenant, Abdul-Mu’min. En rôle de Toufik, le patron de DRS, ou de Hamel, DGSN, auprès de Bouteflika, Abdul-Mu’min aurait été chargé d’espionner les tribus et d’indiquer les personnes contestant l’autorité d’Ibn Toumert. Et sur la base de ses informations communiquées aux soldats au fond du puits et auxquels "le Mahdi" leur a fait jouer le rôle "des anges", qui allèrent divulguer à l’assemblée des tribus réunies sur la place de la mosquée les noms "des traîtres". Après avoir fait entendre à l’assemblée "la voix des anges" révélant ces noms, il ordonna sous le prétexte de maintenir pur le lieu de leur descente à renfermer le puits et à le remplir de pierres en enterrant ainsi les soldats avec leur secret.
Selon l’anecdote, il s’en est suivit un massacre et toute une tribu fut décimée.
Lors de la campagne électorale pour le 4e mandat, la sacralisation de Bouteflika a atteint son stade de paroxysme, de "baraka de Dieu" et de "Dieu qui nous l’a envoyé" de Sellal en passant par " il réfléchit mieux que de tous les Algériens réunis" de Amara Benyounès jusqu’à «la canonisation» lancée par un chef de parti sur le plateau d’une chaîne de télévision : "même mort, on votera pour lui !", avait-il lancé.
Pour résumer l’état d’esprit du Président candidat, Nouredine Boukrouh qui était son ministre d’économie au début du premier mandat a confié sur une chaîne de télévision que "Bouteflika est prêt à assister et à accompagner l’effondrement de l’Algérie, même s’il faut qu’il meurt le lendemain".
Mais Bouteflika a aussi son Abdul-Mu’min en la personne de son frère, Saïd. Au lieu de cacher le cadavre et garder en secret sa mort pendant trois ans comme ce fut le cas pour Ibn Toumert pour pouvoir obtenir le ralliement des tribus, Saïd Bouteflika a fait mieux : il a maintenu une présidence marionnette durant la moitié du troisième mandat puis en "cadavre ambulant" depuis la dernière élection. Et tout cela est pour préserver les intérêts du clan et de la famille. L’exploitation du gaz de schiste fait partie du deal concluant une succession dans la famille ou parmi les membres les plus proches du clan.
Le 4e mandat d’Abdelaziz, dont le premier anniversaire est le 17 avril prochain, n’est en réalité qu’une improvisation à la hâte en absence d’un consensus au sommet de l’Etat en intronisant ainsi un Président, qui était déjà absent durant le précèdent mandat, pour mission de liquider de tous les dossiers gênants impliquant la camorra familiale et l’entourage le plus proche.
La succession est donc déjà mise en route avant même le troisième mandat et durant celui-ci, Said Bouteflika était déjà président de la République de fait. Il s’est offert le statut de la magistrature suprême que la Constitution, qui sera présentée bientôt aux deux chambres du parlement, ne lui avait pas encore attribué.
Y. R.
Repères :
Appartenant à la tribu des Hargha, Ibn Toumert est né entre 1075 et 1097 à l’Atlas marocain et il mourra en 1130. Une mort qui ne sera annoncée par son disciple et lieutenant Abdul-Mu’min que trois ans après, le temps de faire rallier les tribus à cause. Ce dernier fonda la dynastie des Almohades et il sera son premier Calife. Pour y arriver, il utilisa presque le même stratagème que son mentor et c’est ainsi qu’il s’est fait appeler Al Mountasser (le victorieux). (sources Wikipédia)
Commentaires (8) | Réagir ?
Dans ce monde arabe et musulman toujours cramponné au moyen age meme en 2015 après J-C chaque peuple a les gouvernants qu'il mérite
Tout gouvernement est à l'image de son peuple. Si ce peuple est fragile au point de se laisser trainer dans l'abbatoir par un andicapé physique et mental durant tout ce temps, c'est que quelque part il le mérite. L'ALGERIE ressemble à cette terrifiante tragédie de l'avion piloté par un fou qui va volontairement le faire exploser sur les montagnesavec tous ses occupants. La seule grande différence, ses occupants piégés et fasciné ont vainement tanté d'éviter la mort, alors que le peuple d'algérie est embarqué vers la même destination dans un engin sans pilote et ce dans une ambiance de convivialité et de grande fête.
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