46 ans après l’indépendance : Les Algériens ont-ils perdu leur repère ?
Le constat est plus que significatif. La société algérienne connaît un net recul des valeurs sociales. C’est ce que révèlent des études, rendues publiques en marge des travaux du colloque national sur « la famille et l’éducation entre la continuité et la rupture », réalisées par le laboratoire de prévention et d’ergonomie de l’université d’Alger.
Ainsi, selon des sociologues, les signaux sont au rouge. La famille algérienne a perdu ses repères au fil du temps. Par conséquent, les maux de la jeunesse en Algérie sont alimentés régulièrement par une mauvaise éducation au sein des familles.
Selon les statistiques, les parents ont perdu leur autorité devant leur progéniture et à cet effet, les chiffres font craindre le pire. Une société qui a perdu les liens familiaux, notamment après la décennie noire des années 90, ne peut pas forcément trouver ses repères, souligne-t-on.
Une famille démissionnaire
Cette situation est à l’origine de la démission de la famille algérienne de sa première fonction qui est l’éducation. D’autre part, notre famille est devenue une famille consommatrice et matérialiste, relève-t-on encore dans les études de l’université d’Alger.
Symbole de la déficience de notre société, l’enfance paie cher la fracture sociale de notre pays. A ce sujet, il faut savoir que plus de 15 % des familles algériennes se trouvant sans emploi ont des enfants à charge. Ce qui constitue un lourd fardeau sur le budget de la famille, a révélé une étude sur la famille et l’éducation conduite par le Laboratoire de prévention et d’ergonomie.
Dans sa présentation des résultats de cette étude, devant les participants aux travaux du colloque national sur « La famille et l’éducation entre la continuité et la rupture », M. Mohamed Boumakhlouf, professeur de sociologie et membre du laboratoire, a indiqué encore que « 27,1 % des parents exercent une autre activité parallèlement à leur profession pour subvenir aux besoins de leurs enfants. » Il ajoutera plus loin que pas moins de « 11 % des familles sont hébergées par des proches faute de logement », un phénomène qui, malheureusement, « influe négativement sur l’éducation des enfants ».
L’enquête de l’université d’Alger met, par ailleurs, l’accent sur « l’émergence remarquée du mode de la famille nucléaire, dont le taux oscille entre 62,46 % et 79,63% ». Ainsi, la société algérienne tend à se structurer par une forme de famille correspondant à un ménage regroupant les deux parents mariés et leurs enfants, à l’opposé de la famille traditionnelle élargie qui peut compter plusieurs générations.
Concernant les méthodes d’éducation adoptées par la famille algérienne, l’enquête du Laboratoire de prévention et d’ergonomie a démontré que ce volet demeure l’un des points noirs de l’éducation à l’algérienne. Et pour cause, « les méthodes traditionnelles, notamment les privations et le châtiment corporel, sont les plus utilisées par la famille algérienne », notent les auteurs de l’enquête. Dès lors, pas moins de 36 % des familles privent leurs enfants de sortir pour jouer et 17 % recourent régulièrement au châtiment corporel sévère.
Dans ce contexte, M. Boumakhlouf a estimé que la famille algérienne « fait montre d’un sens éducatif élevé, mais fait face à des pressions matérielles et morales liées aux conditions de vie qui l’empêchent de s’acquitter pleinement de son rôle éducatif ». A cet effet, il a appelé les instances concernées par la famille et l’éducation à diagnostiquer les difficultés auxquelles font face les familles en vue de les aider à les surmonter.
La rue influence l’éducation familiale
Autres données d’une autre étude concernant le rôle de la famille dans l’éducation. Il en ressort que les Algériens deviennent de plus en plus individualistes. Force est de constater à ce titre que le caractère individualiste des familles dans l’éducation des enfants est de plus en plus accentué. Ainsi, le voisin, le cousin ou l’oncle n’interviennent plus comme par le passé dans l’éducation des enfants dans les familles algériennes. Par ailleurs, ce qui peut attirer l’attention dans cette étude, sur un échantillon de 794 familles algéroises, 80% s’inspirent des valeurs religieuses, 45% des traditions et 30% de la modernité.
Sur un autre chapitre, d’après les chiffres révélés dans cette étude, la rue influence, à raison de 85,54%, l’éducation transmise par la famille algérienne. Viendra par la suite la télévision comme deuxième facteur d’influence avec 37,53%, puis les salles de jeux avec 35,54%. L’Internet, contrairement à ce que l’on peut imaginer, a une moindre influence sur le comportement des gens, avec un taux de 20,55% et les espaces sportifs avec 14,58%.
S’agissant en outre des difficultés rencontrées par les parents algériens dans l’éducation de leurs enfants, celles-ci sont liées à 84,87% au contact que l’enfant a avec la rue. Il en ressort de cette configuration des répercussions très négatives sur le comportement des enfants qui ont généralement des aspirations qui dépassent les capacités et les moyens des parents. D’un autre côté, il est à signaler que la cherté de la vie se pose comme un élément destructeur de la cohésion familiale. 70,02% des familles algériennes affirment, dans cette étude, que l’éducation de leurs enfants a échoué à cause de leurs conditions économiques difficiles.
Dans ce contexte, les sociologues ont mis en exergue l’importance de la consolidation de la famille et sa cohésion qui doit passer impérativement par la consolidation des institutions de l’Etat. Faute de quoi, la déperdition sociale risque encore d’avoir de beaux jours devant elle dans notre pays.
Par Semmar Abderrahmane (Mague)
le 04/07/2008
Commentaires (19) | Réagir ?
s'il est vrai que les grands changements ou boulversements auquels ont été soumis les algériens sont nombreux et les ont frappés en plein visage, il reste indéniable que l'absence d'un modèle social prôné ou seulement présenté est le principal défaut; à côté d'un système éducatif lui-même perdu et tout à fait inopérant sur ce plan-là précisément.
La question: QUEL MODELE DE SOCIETE POUR L'ALGERIE? Personne n'a osé la poser.... Moderne, traditionnel, Sunnite, Conservateur.....
Le débat n'est même pas lancé et le modèle à développer reste une image des plus floues; en attendant, continuons à errer adns ce domaine. Ce qui nous aidera énormément à consolider le retard, tous domaines confondus, que nous vivons.
Le "5 juillet" reste un commemoration privée, célébré uniquement par la famille révolutionaire. Le peuple y reste tres indifférent.