Abbuh.com : 3e œuvre du Théâtre du renouveau amazigh
Le public amazigh de la région de la capitale nationale du Canada a eu le privilège d’assister au premier spectacle de ABBUH.com le dimanche passé, en attendant la 2ème représentation qui aura lieu le dimanche 22 février 2015 au même endroit, c’est-à-dire à l’amphithéâtre de Heron Communauty Center à Ottawa.
Abbuh.com complète ainsi la désormais trilogie ou l’ensemble de trois œuvres théâtrales du dramaturge-poète Arab Sekhi, entamée en novembre 2006 avec Tidak Nna Fa suivie de Ass Unejma en juin 2009. Les trois pièces ont en commun l’analyse de la situation sociopolitique de la Kabylie avec des propositions de sortie du malaise planifié par ses nombreux ennemis, mais aussi avec la complicité de ses propres enfants, volontairement pour certains, et involontairement pour d’autres.
A titre de rappel Tidak Nna Fa, Arab Sekhi prêtant la voix, les gestes, l’habit et les comportements à une vieille femme kabyle, et à travers une rencontre avec son confident médecin (campé par Hocine Toulait), nous a interpellé sur la situation déplaisante que vit la femme kabyle, depuis sa tendre enfance jusqu’au crépuscule de sa vie, et à travers elle la vie sociale en Kabylie d’une manière générale.
Ass Unejma aborde divers sujets de la vie villageoise qu’ont menés les membres de la Tajmaât (Assemblée du village) suite à une rencontre au Café du village, géré par Dda Yidir (caractère joué par Arab Seki), alors qu’ils attendaient un camarade. Du gérant AAdu café à l’instituteur du village (Hocine Toulait) en passant par Hadj Alemmas (Hakim Abdat), l’imam du village (Brahim Benammar) et l’étudiant (Nourredine Bala), tous ensemble et avec un très beau jeu poétique ils dressent un constat noir d'une Kabylie en perte de valeurs, mais non sans proposer de solutions pour retrouver la belle vie ancestrale d’antan, qui la caractérisait.
C’est dans ce même esprit que s’inscrit la 3e pièce Abbuh.com qui reprend les mêmes acteurs et la même trame que Ass Unejma mais avec quelques différences. D’abord les temps ont changé puisque le café de Dda Yidir devient Cybercafé, à l’ère de l’internet, ou les jeunes Kabyles passent l’essentiel de leur temps.
Avec le rire, les échanges oratoires et l’émotion Abbuh.com analyse minutieusement la nouvelle situation que vit la Kabylie à l’ère de la mondialisation. Elle dresse un tableau noir sur la situation sombre que vit sa jeunesse, qui ne fait que rêver de partir même virtuellement avec l’outil internet et ses ramifications Facebook, Skype, … dans l’espoir de fuir leur quotidien noirci causé par la mauvaise gouvernance induite par les militaro-politiques qui ont volé leur jeunesse et ont confisqué l’indépendance et le destin de leur Kabylie.
Cette situation n’a pas été sans générer de nombreux disfonctionnement au sein même des familles Kabyles à l’image de Hadj Alemmas. En effet ce dernier ne comprend pas pourquoi son fils (qu’il voulait marier) est toujours malheureux alors que son père est riche de par sa bonne pension française de retraité. Sachant que Hadj Alemmas est venu au Cybercafé pour voir l’instituteur du village qui s’est recyclé en écrivain publique (avec ordinateur cette fois-ci!), pour lui créer un compte email pour ses échanges avec l’administration française concernant sa retraite. C’est ainsi que Hadj Alemmas a profité de l’occasion pour exprimer la frustration qu’il vit quotidiennement avec son fils, avec beaucoup de rire (comme il nous a habitué avec Ass unejma).
Au Cybercafé se trouve, en plus de Hadj Alemmas, l’instituteur du village, l’étudiant Menad, venu pour réparer un ordinateur au propriétaire du Cybercafé Dda Yidir, mais aussi Laqasma (joué par Brahim Benammar dont le rôle a changé depuis l’imam dans la pièce Ass unejma), un retraité de la mouhafadha du FLN, le parti unique qui a géré le pays après le départ du colon français.
Ces 5 acteurs ont, dans leur magistrale prestation, dressé un constat loin d'être complaisant sur la réalité de la Kabylie d’aujourd’hui. Ils ont fini par reconnaitre tous leur part de responsabilité dans le malheur qui frappe le pays et leurs enfants; de l’instituteur, au chef de la Qasma, en passant par le retraité qui a toujours vanté l’argent qu’il gagnait de sa bonne retraite française. Cependant la pièce finit avec une note d’espoir que cette Kabylie même porteuse de ses propres obstacles, mais elle a toujours su être la créatrice d'un essor qui a assuré son salut.
Faut-t-il signaler enfin l’apparition surprise d’un personnage au cours de la pièce pour exprimer un phénomène sociétale malheureux que vit notre jeunesse, qui faute de visa, préfère être avalée par les poissons de la méditerranée que de rester dans un pays bloqué. Ce passage a suscité beaucoup d’émotion auprès du public de la région de la capitale nationale du Canada le dimanche passé, au point ou beaucoup n’ont pas pu empêcher leurs pleurs et de se faire entendre dans l’amphithéâtre.
Racid At Ali u Qasi
Notes
1. BRTV sera présente à la première de Abbuh.com à Montréal le 28 février 2015.
BRTV qui est déjà présente parmi nous via Bell(Canal 755) et brtvconnect, nous fera l’immense plaisir de partager avec nous en présence de Messieurs Mohamed Saadi, Kamal Touat et Miloud Lassal, la première de Abbuh.com à Montréal.
BRTV annonce depuis quelques jours déjà la présentation de la pièce à Montréal : Vidéo
2. Le public de Gatineau-Ottawa a un deuxième rendez-vous ce dimanche 22 février avec ABBUH.com au Heron Communauty Center à Ottawa à 13h30.
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