Tunisie: nouveaux heurts avec la police, deux ministres sur le terrain

Des heurts opposaient mercredi des dizaines de jeunes à la police à Ben Guerdane, ville située près de Ras Jedir,
Des heurts opposaient mercredi des dizaines de jeunes à la police à Ben Guerdane, ville située près de Ras Jedir,

Le gouvernement tunisien a dépêché mercredi deux ministres dans le sud du pays, région pivot de la contrebande avec la Libye agitée par des tensions sociales ayant fait un mort.

Le ministre des Finances Slim Chaker et celui du Développement, de l'Investissement et de la Coopération internationale Yassine Brahim se sont rendus à Déhiba et devaient ensuite aller à Ben Guerdane, a indiqué à l'AFP le responsable de la communication du gouvernement, Mofdi Mseddi.

Mercredi après-midi, de nouveaux heurts opposaient sporadiquement des dizaines de jeunes à la police à Ben Guerdane, ville située près de Ras Jedir, le principal point de passage vers la Libye (région de Médenine). Visées par des jets de pierres comme tous les jours depuis dimanche, les forces de l'ordre répliquaient par des tirs de gaz lacrymogène. Aucun heurt n'a été signalé à Dehiba (gouvernorat de Tataouine), autre point de passage à la frontière libyenne où un jeune homme a été tué dimanche lors d'affrontements avec la police.

Ces nouvelles violences ont été déclenchées par la saisie d'essence de contrebande mais elles s'inscrivent dans le cadre d'une contestation plus large. Le Sud, qui vit largement de divers trafics avec la Libye et se dit délaissé depuis des dizaines d'années par les autorités tunisiennes, réclame notamment des créations d'emplois. Mardi, une large partie du Sud a observé une grève générale.

Le conseil des ministres a chargé les ministres de se rendre sur les lieux pour s'enquérir de la situation et des revendications sociales, a dit M. Mseddi, en ajoutant que MM. Chaker et Brahim s'entretiendraient avec les principaux acteurs, notamment la société civile.

Les syndicats dans ces régions, outre des emplois et des investissements, réclament la suppression d'une taxe de sortie du territoire tunisien imposée aux étrangers non-résidents depuis octobre et qui nuit, selon les habitants, au commerce avec la Libye.

Ils demandent aussi l'assouplissement des contrôles douaniers sur les transports des marchandises qui ont été renforcés ces dernières semaines pour lutter contre la contrebande. Enfin, ils veulent une enquête sur le recours excessif à la force par la police lors des manifestations.

Selon un rapport publié en décembre 2013 par la Banque mondiale, le commerce informel, qu'il soit avec la Libye à l'est ou l'Algérie à l'ouest, coûte à la Tunisie chaque année au moins 1,2 milliard de dinars, soit un peu moins de 600 millions d'euros.

Quelque 328.000 tonnes de produits de contrebande passent notamment par le poste de Ras Jedir chaque année et 20% de la population active de Ben Guerdane vit exclusivement de ce commerce, qui représente plus de la moitié des échanges bilatéraux avec la Libye.

La fermeture de la frontière tuniso-libyenne en raison de différends entre les deux pays ou de l'instabilité en Libye, en proie au chaos, entraîne dès lors régulièrement des mouvements sociaux et des heurts dans le sud tunisien.

AFP

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