Des larbins et des maux qui gênent l’exportation algérienne
Lorsque les larbins illégitimement promus pour gérer les affaires du pays se sont cognés de la tête contre le mur de la chute du prix du pétrole, ils se sont rappelé que certaines voix disaient depuis longtemps qu’il faut produire et exporter autre chose.
Après le choc, c’est le grenouillage dont les échos nous parviennent par la presse. Il y a quelques jours, un journal a publié la liste des 15 plus "grands" exportateurs hors hydrocarbures ainsi qu’un entretien avec le DG de l’entreprise Algex (Agence de promotion du commerce extérieur) chargée d’accompagner les entreprises exportatrices.
En consultant la liste, on constate que Sonatrach est le premier "plus grand" exportateur hors hydrocarbures. Mais cette entreprise n’exporte ni des silicates ni des produits agricoles obtenus dans ses fermes pilotes d’In Amenas tant vantées par un "harki du système" (l’expression est de lui). Il s’agit tout simplement de produits obtenus à partir des …hydrocarbures. Celui qui ne connaît pas la chimie organique ne se rendra pas compte de cette contorsion qui permet de doubler le chiffre d’affaires réalisé en exportation hors hydrocarbures (pour 2013).
La même liste nous apprend qu’on exporte du plâtre pour sept millions de dollars. Il faut savoir que c’est une société à capitaux allemands et l’usine a été rachetée auprès de l’Etat. Le gisement, du côté de Béthioua (Oran), est important et de bonne qualité. Si l’Etat n’a pas pu rentabiliser l’exploitation de ce minerais assez demandé, les Allemands, eux, ont réussi sans changer grand-chose ; c’est comme à El-Hadjar ou les indous n’ont changé que l’équipe dirigeante (El-Hadjar, récemment repris par l’Etat, est peut-être une autre histoire).
Dans son entretien, le DG d’Algex explique la faiblesse des exportations par des termes qui font comprendre à l’algérien que le problème est bien difficile et poussent tout le monde, citoyens et dirigeants, à laisser de côté le dossier et ne demander des comptes à personne : "Cela nécessite une mise à niveau", "on n’a pas cette culture de l’export", "les formalités administratives sont très lourdes", "difficultés avec les armateurs", "on doit développer de nouveaux ports" (nous avons donc moins de ports que la Tunisie et le Maroc), "il faut aller vers des alliances stratégiques (mince, alors !) avec certains pays (africains)" … bref, il n’y a rien à faire et on est, dans le secteur public, condamné à attendre ("Tout vient d’en haut, tout dépend d’en haut et pour justifier sa passivité chacun a …son haut").
Il y a beaucoup de citoyens qui sont convaincus qu’on n’a besoin de rien d’exceptionnel pour engranger des dollars par milliards en exportant des produits appréciés ou demandés, donc sans concurrence sérieuse, comme les dattes, le sel , le vin, les orangeades, des plantes aromatiques, etc… C’est parait-il uniquement un problème d’hommes.
En septembre 2009 un cadre algérien, appelons-le M. R a été nommé DG de l’entreprise étatique où il travaille comme directeur technique. Le produit fabriqué par l’entreprise est exportable mais rien n’a été exporté depuis quatre ans et durant cette période le bilan comptable était déficitaire. Inutile de dire que personne ne s’est inquiété de cette peu reluisante situation de l’entreprise. En acceptant le poste, M. R. savait que ce qui l’attendait dans cette nouvelle fonction est incompatible avec son caractère. Dire tout haut ce que les autres pensent tout bas et agresser à chaque occasion la servilité et l’incompétence de ceux, nombreux, qui ont discrédité le secteur public, c’est au minimum bloquer sa carrière. M. R se disait néanmoins qu’il a un atout et de taille : il considère que son avenir professionnel est derrière lui.
Quelques semaines après la prise de fonction, des demandes d’achats formulées par des acheteurs étrangers arrivent. Il faut donc essayer d’exporter et pour cela les premiers préparatifs sont avec les gestionnaires du port d’expédition. La préparation avec le port est une phase assez ardue et contrairement aux dires du DG d’Algex, les formalités administratives ne sont pas gênantes du tout, peut-être à cause du fait que c’est une entreprise publique et en tant que telle, elle ne veut ni ne peut truander le Fisc, la Douane ou LA CNAS.
M. R et son collaborateur sont reçus par le DG de la première entreprise portuaire qu’ils ont décidé de contacter. Après les salamalecs, l’exposé du besoin et le rappel qu’ils ont a déjà travaillé ensembles, le DG du port leurs apprend que l’espace portuaire demandé et qu’ils avaient utilisé par le passé n’est plus disponible, il a été concédé a une entreprise étrangère et le port ne possède pas d’autres espaces à mettre à leur disposition. L’argumentation de M. R a été que la totalité de l’espace portuaire est occupé par l’importation et l’entreprise étrangère ne s’est pas encore installée. Elle n’est pas propriétaire du patrimoine, elle possède seulement le droit d’utilisation. L’espace peut donc être utilisé tout en sachant qu’il sera libéré, en cas de besoin ou dans le cas où un quai est libéré, avec la possibilité de dédommager cette entreprise étrangère si le prix de la location est conforme. Rien n’y fit et la réponse fut confirmée par un écrit reçu deux jours plus tard. Voici la réflexion lancée, une fois dehors et le visage rouge de colère, par le collaborateur de M. R : «Mais c’est un «r’khiss, harki», je vous jure que si c’était moi, aucun importateur ne déchargerait un gramme tant qu’il y aura un exportateur qui doit charger sa cargaison».
La tentative faite avec une deuxième entreprise portuaire a abouti au même refus et avec des justificatifs plus affligeants : le port est saturé et en plus le produit qu’exporte l’entreprise de M. R est salissant et corrosif. Faisant comme s’il n’avait pas entendu le terme salissant, M. R lui répond que ses techniciens soumettront pour validation les mesures qu’ils prendront pour protéger le quai. Le débat s’engagea mais n’apparaissait pas favorable aux demandeurs. Inconscient, le responsable du port revient au mot salissant et là M. R ne se contrôle plus : «Je vois mon cher Monsieur que vous n’avez pas beaucoup d’expérience en matière d’activité portuaire ; informez-vous auprès des ports qui expédient du charbon plus salissant et plus nuisible que notre produit et sachez qu’il y a des ports qui expédient la m…produite par l’industrie et d’autres ports la déchargent ; sommes-nous plus riches et plus nobles que ces gens ?» Ils quittent le bureau, sans les salutations d’usage, laissant le monsieur cherchant une réplique.
C’est donc l’impasse parce que les autres ports sont soit sous-équipés par rapport au besoin, soit induisant des frais supplémentaires qui rendent l’opération non rentable. Que faire ? Il reste la tutelle à informer avec une petite possibilité pour une intervention efficace. Un rapport sera fait mais si réponse il y aura cela ne viendra qu’après un minimum de temps trop long pour les premiers clients qui n’attendront pas. En raisonnant en "rentier du système", M. R et son équipe sont couverts vis-à-vis de la tutelle et le dossier pour justifier le manque d’exportation est "en béton", il peut même justifier la faiblesse du chiffre d’affaire global.
Quand la personnalité a été façonnée par le scoutisme dès l’enfance ou l’adolescence, le marxisme pendant la jeunesse et des versets coraniques à la cinquantaine, elle peut avoir quelque chose qui s’appelle la conscience et qui interpelle : "Si l’entreprise était à toi, que ferais-tu face à ce problème ?" Cette question a donc été posée au collaborateur par sa conscience et… il eut une idée. La solution qu’il a proposée n’est pas parfaite et présente un risque avec la tutelle mais elle vaut la peine d’être essayée. Pour ne pas laisser son collaborateur prendre le risque, M. R décida que c’est lui qui se chargera d’appliquer l’idée. Il se fait faire une copie de la lettre-rapport envoyée à la tutelle et part en voiture vers le village voisin ; il entre dans un «taxiphone» et fait «faxer» la lettre a un …journal, celui qui lui paraissait assez crédible, bien diffusé et lui paraissant capable d’exploiter l’information.
Dans le secteur public, les dirigeants-gestionnaires les plus matinaux arrivent à leurs bureaux à huit heure trente (bien sûr, il y a l’exception qui confirme la règle) et ils ont un justificatif qui dit que « le chef n’est pas en retard, il a été retenu pour des besoins de l’entreprise». Deux jours après avoir expédié le fax (durée nécessaire pour traduire la lettre en arabe et l’exploiter) et dès 7h du matin, M. R a constaté que le journal a publié un résumé de la lettre sous le titre « les entreprises portuaires EPX et EPY empêchent l’ENA/XY (appelons-les comme cela) d’exporter son produit». M. R a gardé comme relique une copie de l’article. Aux environs de 10h, M. R reçoit des appels téléphoniques : la tutelle lui demande «qu’est-ce c’est que cette histoire ?». Puis se souvenant qu’il y a un rapport sur le sujet, demande «pourquoi a-t-on a impliqué la presse ?», un cadre de l’EPX lui communique l’accord de principe et l’informe qu’ils sont prêts à discuter les modalités pratiques de la mise à disposition du quai, la même information parvient de l’EPY. Le DG de cette entreprise lui transmettra aussi, dans l’après-midi, la copie d’un fax demandant à son collègue de l’EPX de prendre en charge le besoin dans le cas où, lui, il n’arrive pas à libérer un quai.
Et M. R convoqua son équipe pour se préparer à faire le maximum de chiffre d’affaires à l’export.
En se préparant à la réunion, une question vint à l’esprit de M. R : pourquoi cela n’a pas été possible dès le début? Il s’est alors rappelé que l’Algérien «lambda» qui a une responsabilité sur les affaires de ses concitoyens, aussi grande soit-elle, se comporte en général comme cela : ce qui n’est pas possible pour le citoyen ordinaire devient très facile à faire s’il s’agit d’un parent, d’un ami ou d’une autorité quelconque ? La conscience ne pose donc que rarement sa question.
Voilà donc l’ENA/XY qui se remit à exporter son produit. Elle réalisa (si la mémoire est bonne) près de 1,5 million d’euros en chiffre d’affaires sur 22 mois et 0,6 million d’euros de commandes ratées parce que le produit devait partir par route et le seul poste douanier qui convenait était réservé aux entreprises pétrolières pour….importer matériel et produits. ENA/XY redevient bénéficiaire. Pendant qu’ils travaillaient au port, les agents de l’ENA/XY ne manquaient pas de faire face à d’autres problèmes assez gênants. Ils doivent toujours s’attendre à ce qu’on vienne leur enlever un engin (loué auprès de l’entreprise portuaire) pour servir un importateur. S’ils travaillent en continu, les services fournis par le port son plus chers et il ne faut jamais oublier de prévoir de bons repas pour les agents mis à disposition par le port ; faute de quoi c’est, à chaque repas, deux heures de perdues mais facturées et un travail bâclé. Ces problèmes induisent des surcoûts et même des difficultés avec le navire qui appartient généralement à un armateur étranger, le pavillon algérien étant rarement disponible.
Les entreprises de droit privé qui utilisent le port ont d’autres contraintes. A l’occasion d’une grève qu’ils avaient organisée, les camionneurs ont déclaré à un journal régional (encore la presse) qu’ils sont soumis à des racketeurs (1000 à 1500 dinars par camion) lors de l’attente et à l’entrée du port. Mais les exportateurs privés essayent toujours de ne pas perdre leur temps avec les entreprises portuaires et la réglementation douanière, ils ont d’autres voies. On raconte que des analystes, en considérant les quantités de «dattes tunisiennes» vendues dans le monde et le rendement moyen par palmier, ont trouvé que toute la Tunisie est plantée de palmier-dattier. Cette information n’est peut-être pas crédible mais la datte algérienne part illégalement et en grandes quantités vers la Tunisie ; c’est connu.
Après 22 mois d’activité où les divergences sur les actes de gestion n’étaient pas rares avec la tutelle et suite à un litige avec le commissaire aux comptes, qui fera peut-être l’objet d’une autre contribution, M. R et son collaborateur furent "remerciés" : M. R âgé alors de 60 ans et quelques jours fut mis à la retraite «conformément à la circulaire du premier ministre» ; son collaborateur âgé alors de 59 ans fut relevé de ses fonctions et "mis au congélateur» comme on dit dans le secteur public : salaire garantie et tortures morales.
Lorsque la mise à la retraite «conformément à la circulaire du premier ministre» (excusez la répétition) a été connue, les gens ont bien rigolé parce que le conseil d’administration qui a pris la décision, "conformément à la circulaire du premier ministre", avait tous ses membres âgés de plus de 65 ans ; son président avait plus de 70 ans. C’est ce même président, alors directeur d’unité, qui avait validé le rapport de stage que M. R, alors étudiant, avait à présenter devant un jury pour obtenir son diplôme d’ingénieur.
A l’heure actuelle, Monsieur le président du conseil d’administration de l’ENA/XY et les administrateurs continuent à "larbiner" pour rester à leurs postes. M. R. s’est mis à "cultiver son jardin". Le collaborateur ancien scout, ancien marxiste, lecteur du Coran a été perdu de vue mais on a su qu’il est sorti en retraite dès 60 ans et immédiatement récupéré par une entreprise privée activant dans … l’import. Votre serviteur, auteur de cette contribution est M. R et les faits sont réels.
Noureddine M.
Commentaires (2) | Réagir ?
Le niveau de developpement d'un pays se mesure par l'evaluation des deux bouts de son systeme educatif: L'ecole Primaire et l'Université.
Comme on les voit tres bien, on n'a plus envie de regarder a l'horizon!
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Notre cher pays est bien perdu d'avance.......... depuis 1962, nos ecoles, nos ecuries; et nos universités, nos centres de chomage.
Vous avez un gros chagrin et une rage certaine au coeur, ménagez vous car dans cet état Bouteflikiste tout est gangréné, là aussi je dirais ou est le probléme?
Un clan prend le dessus sur l'Algérie, celui des importateurs importateurs du Bouteflika sur les autres de l'autre clan, et puis le troisiéme larron pour décimer l'économie nationale avec cet autre larbin Haddad qui devient le ministre de l'économie et se permet de négocier avec la france protectrice de Bouteflika. Ou est le probléme... ?
j'ai juste une orientation suggestive: Essayer de tirer aussi les "marrons du feu" car ls vont d'abord se mordre comme des chiens, ensuite ils vont s'auto-ruiner par vengeance pour finalement f probablement quelques dégats collatéraux de facade et de diversion pour ne pas arriver à Rome, car tous les chemine méne à rome, et en Algérie il y a un empereur officiel Bouteflika et un autre dans l'ombre mystére grand T, c'est la guerre des pirates en pleine retraite du champs de bataille.
Ah ces larbins monsieur ne sont pas finalement ceux dont je fais allusion, mais les analystes mystificateurs avec tous mes respects pour votre article.