"Le 11 septembre des caricaturistes"
Le titre de l’article n’est pas de moi : il est de mon ami Ali Dilem que j’ai eu au téléphone ce mercredi après-midi, et qui, il y a quelques jours, était avec Tignous, tué au cours du massacre perpétré à Charlie Hebdo. Charb, que j’ai rencontré la première fois au siège de l’Humanité en avril 2003 à mon retour d’Irak, Wolinski qui m’avait été présenté par mon ami Slim, un grand Monsieur, Tignous, Cabu, deux dessinateurs de presse que je connaissais de réputation comme beaucoup de lecteurs, ont été assassinés ce mercredi. Au moins douze personnes dont deux policiers ont été tuées.
Par Hassane Zerrouky
Ce massacre rappelle la tuerie perpétrée à L’Hebdo Libéré de feu Abderahmane Mahmoudi le 21 mars 1994. Ce jour-là, à Alger, dans les locaux du journal, près du siège de la radio chaîne III, trois journalistes sont tués d’une balle dans la tête, deux autres personnes, des employés, sont grièvement blessés. Et pour avoir été témoins de la mort de plusieurs dizaines de journalistes en ces années 90, dont certains étaient des amis personnels – je pense aux quatre journalistes du Matin assassinés – nous savons de quoi il en retourne. Chacun de nous, on en parlait avec Dilem, se souvient des «mardis noirs» : on avait observé que les crimes contre les journalistes, les démocrates et les intellectuels, étaient souvent commis le mardi. Mais bon, observons une chose : ce qui s’était passé en Algérie était loin d’être une exception mais un avertissement par anticipation au monde de la presse, surtout à ces journalistes français et autres européens qui minimisaient la gravité des meurtres commis en Algérie, doutant alors sur l’identité des commanditaires, et ce, même quand ces derniers le revendiquaient ouvertement via Al Ansar, l’organe du GIA publié à Londres, dirigé par l’égyptien Abou Hamza, le fameux imam de la mosquée de Finsbury Parc à Londres, aujourd’hui aux mains du FBI américain.
Des unes de Charlie hebdo
Les dessinateurs de Charlie Hebdo, mais aussi le chroniqueur Bernard Maris, n’étaient ni racistes, ni antimusulman, ni haineux. Ils aimaient rire, tourner en dérision la bêtise humaine, le racisme, les grands de ce monde, ceux qui font l’actualité, dont les djihadistes, mais aussi les chrétiens et les juifs intégristes. Leur humour n’épargnait personne. Ils étaient, quoi qu’on en pense, profondément humanistes et progressistes. Ils étaient de gauche et progressistes. Leur mort laisse un vide immense.
Comme en Algérie, et aujourd’hui en Irak et en Syrie, ces tueurs anonymes, qui n’ont pas le courage de se montrer – les caricaturistes assassinés avaient, eux, le mérite d’assumer publiquement leurs idées – ces tueurs veulent faire taire la libre parole. Et bien non, personne ne se taira… comme on n’oubliera pas que Charlie Hebdo s’était tenu d’emblée aux côtés de la presse algérienne en ces années qualifiées de "décennie noire".
H.Z.
Commentaires (5) | Réagir ?
Cette barbarie est le fait d'une association de deux faits conjugués... d'une jeunesse en perdition ayant perdu leurs repères familiaux et sociétaux... du laxime judciaire qui pour des raisons économiques a encouragé les courtes peines (même pour les actes les plus graves, crimes, braquages, kidnappings, ...) et par conséquent a encouragé la récédive, cette récédive qui constitue aujourd'hui un FOND DE COMMERCE de quelques avocats qui la défendent ... On ne traite pas un cancer avec de l'aspérine !!!
A tous les morts d'ici et d'ailleurs: Reposez en paix!
Mais où sont les vraies caricatures qui sont à l'origine de l'assassinat de ces malheureux journalistes!
Si on persiste dans ces peurs jusque dans la crainte de reproduire l'alibi du meurtre la lutte se pare d'un camouflage débile.