Fellag : "Petits chocs des civilisations", grands gags et thérapie de choc
Envie d’un peu d’humanisme et d’humour pour vous soustraire, le temps d’un spectacle désopilant, de ce monde de tourments, d’inquiétude, et de doute permanents ?
Envie d’oublier ces images de désordre et d’absurdité qui nous parviennent du sommet du pouvoir algérien, et que rien ni personne, ni dieu ni diable ne semble pouvoir arrêter ? Envie de détourner l’œil de ces drames humains que le petit écran déverse sur nous en permanence, comme pour torturer les âmes sensibles et éveillées ? Envie de prendre de la distance sur cette information abusivement pessimiste qui dépeint l’avenir d’un noir des plus fatals ? Envie de revenir, pour un court instant, à l’essentiel, le propre de l’homme ?
Allez donc voir "Petits chocs des civilisations", le dernier spectacle de Fellag !
Si, comme l’affirmait feu Matoub Lounes, les croquis de Dilem représentent une thérapie que la sécurité sociale devrait rembourser, au même titre que les médicaments, les gags de Fellag constituent un traitement de choc, un baume au cœur énergique et efficace, pour soigner toute déprime individuelle ou collective!
Si je devais, en quelques mots, décrire notre humoriste Kabyle, comme nous tous forcé à l’exil par cette bêtise humaine tyrannique ensemencée en terre d’Algérie, je dirais qu’il représente l’étalon universel du maghrébin résolument tourné vers le monde, loin de ces caricatures véhiculées par des échos sélectifs, bien souvent à charge.
Sans trop rentrer dans les détails, pour ne pas empiéter sur la magie de l’effet «live», dans ce dernier spectacle Fellag réussit le pari, à priori impossible, de réconcilier le beur et le jambon-beurre, le couscous et la choucroute, la tasse de petit-lait et la gorgée de vin, la merguez hallal et le saucisson sec, le circuit de la grande distribution alimentaire et celle de l’arabe du coin, etc. Des éléments antinomiques, que tout semble opposer et diviser à l’irréconciliable depuis la nuit des temps, mais que Fellag, en maestro maniant une allégorie percutante, fait cohabiter avec harmonie et délice pendant plus d’une heure et demie d’un one-man show où les enchaînements ne laissent guère de place au moindre temps mort. C’est du rire aux éclats incontrôlables qui fuse de l’assistance gag après gag, telle une mélodie universelle orchestrée par un chef dont seul Fellag en a le secret. Le spectacle terminé, vous en ressortez l’âme sereine, le cerveau dégourdi et le cœur rempli d’allégresse. Dieu que cela fait du bien ! Et en plus, pour les plus attentifs, vous aurez appris à faire un bon couscous !
Au lieu de gaspiller des sommes faramineuses en devises sonnantes et trébuchantes sur des projets qui tournent souvent au fiasco voire au ridicule, comme cette autoroute est-ouest qui n’en finit pas d’avaler milliards sur milliards tel un trou noir insatiable, le pouvoir serait mieux avisé de faire diffuser les gags de Fellag sur nos ondes radios et télés. Le peuple n’en sera que plus heureux, comme il le fût pendant la courte parenthèse démocratique qui avait suivi le 5 octobre 1988 ! Mais allez donc expliquer ça à ces tristounets qui nous servent de gouvernants, et qui n’ont de projet que celui de nous préparer une bonne place au paradis, en plongeant nos vies sur Terre dans un milieu de grisaille épaisse qu’ils ont réussi à étaler sur toute la surface du pays du soleil et des étoiles que bien des colons ont de, tous temps, convoité.
Vite, la vidéo du spectacle pour oublier ces oiseaux de malheur, la3nayakh a Mohamed Fellag !
Kacem Madani
Fellag vient de sortir un livre : Un espoir, des espoirs chez l'éditeur français Lattès
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