Quand la Finlande chante Idir et Slimane Azem, les Kabyles quémandent Bouteflika-bile

Slimane Azem.
Slimane Azem.

Quand Daniel Prévost s’était rendu sur la terre de ses ancêtres, à Azouza, il avait, dans un état d’emballement singulier, tenu à ses enfants des propos chargés d’entrain "mais arrêtez donc de réviser vos leçons d’anglais, puisque je vous dis que la langue de demain c’est le kabyle !" leur avait-il intimé.

Stina est finlandaise, une tête blonde bien nordique, conforme à la lignée des vikings, mais quand on l’écoute chanter Slimane Azem, Idir, ou encore Brahim Tayeb, on a bien du mal à se faire à l’idée que ces cordes vocales, qui reprennent avec une intonation parfaite des chants du terroir, ont été forgées ailleurs que dans un berceau suspendu quelque part entre Larvâa Nath Irathen et Thaqervouzth.

Pourtant, du peu de mots que je connais du finnois, il semble que les sons de cette langue s’émettent bien plus avec les dents et la langue qu’avec la gorge et l’hameçon guttural qui est souvent associé aux non-berbérophones, selon Fellag. Malgré cela, Stina chante à la Taous Amrouche, prononce et amplifie l’émotion des mélodies Kabyles qu’elle reprend avec ses tripes jusqu’à leur donner une âme musicale vierge en reproduisant avec une voix de Diva toute la charge émotionnelle que véhiculent les rimes originales. Tout cela est, conjugué à une précision orale à vous donner des frissons subtils que ni Idir ni Slimane Azem n’ont pu communiquer aux non-berbérophones, car dans la plupart des œuvres kabyle intemporelles, les textes ne peuvent être dissociés des refrains, et c’est là que réside la performance magistrale des interprétations de Stina, une puissance vocale qui traduit toute l’harmonie des textes en intonations harmonieuses à perfection.

Pendant que Stina chante la Kabylie, l’élite du Djurdjura, celle-là même qui a tenu à honorer de sa présence l’hommage rendu à Slimane Azem à Paris, mendie, implore et supplie un président, une assemblée et des députés illégitimes, pour l’officialisation de tamazight.

Première remarque : à supposer que ces imbéciles fassent preuve de lucidité en envisageant ladite officialisation, comment se faire à l’idée que nos langues, toutes ces dérivées du territoire authentiquement Amazigh, celles de millénaires de transmissions orales, soient reconnues par un pouvoir de petits crétins dont la seule préoccupation est de perpétuer la mainmise sur le pays et ses richesses en forçant les ténèbres à se propager jusqu’au dernier bastion de l’anti-islamisme, celui des montagnes Djurdjurassiques?

Seconde remarque : à supposer que le seigneur du moment, fakhamatouhou 1er, fasse preuve de diligence à notre égard, comment accepter l’idée de léguer aux générations futures le fait historique que le Tamazight soit officialisé sous le règne d’un nabot-Léon qui a osé mépriser une race de géants en la rabaissant à son niveau, qualifiant les colosses Kabyles de nains pour les réduire au reflet de sa propre image ?

Oui l’officialisation de tamazight et son enseignement généralisé est un pré-requis fondamental, une condition sine qua non, pour réconcilier l’Algérie avec ses racines, en tranchant le cordon des souches importées d’Arabie ou d’ailleurs. D’ailleurs, plutôt d’Arabie que d’ailleurs !

"Je m’exprime en français pour dire à nos amis français que je ne suis pas français", avait répondu Kateb Yacine à une question d’un journaliste, dans les années 1950. Nous nous exprimons en français aussi, mais comment diable peut-on nous persuader que nos ancêtres étaient venus de l’Hexagone pour se reproduire sur les cimes du Djurdjura ? Nous l’avions compris dès nos premières années à l’école, dans ce premier livre de lecture, à l’intérieur duquel un texte "ces femmes roulent le couscous" côtoyait un autre "nos ancêtres les Gaulois". Ces deux textes à eux seuls suffisaient pour faire comprendre, aux enfants de 10 ans que nous étions, que ces femmes qui roulent le couscous sont nos mères, et que ces Gaulois aux casques effrayants n’avaient rien à voir avec nos ancêtres, ceux de ces femmes qui roulaient le couscous gaiement sur une page de notre premier livre de lecture.

Cinquante années plus tard, que proposent ces «grands oulémas» qui ont confisqué le pays comme lectures à nos petits chérubins? Aux côtés des «Khalaknakoum kheira oumatine» et des «kalhou oullahou, ahadou allahou» infantilisant, qu'y a t-il d’autre pour éveiller les consciences, surtout celles qui se sont fondues dans le moule d’un arabo-islamisme béat, pour faire comprendre à nos enfants que nos racines ne peuvent pas avoir traversé déserts, monts et montagnes pour émerger à des milliers de kms plus loin dans les «thivhirines» qui nous ont enfanté? Aux côtés des messages d’aliénation, il n’y a rien, sinon la glorification des imposteurs tels Bouteflika, lui qui a annoncé la couleur, dès son intronisation à El-Mouradia, en stipulant dans toute la splendeur d’une insanité que seul un faible d’esprit peut assumer en toute fierté "je suis plus proche des islamistes que des démocrates" !

Il est donc certain que quémander l’officialisation de tamazight à des structures étatiques qui ne bénéficient pas du moindre soupçon de légitimé est tout simplement absurde!

De toutes évidences, ces petits crétins ont trouvé le moyen de noyer le gros poisson Tamazight dans des lacs artificiels de circonspections stupides qui nous feront tourner en bourriques, en permanence. Est-il besoin de citer un autre exemple que celui de l’utilisation de l’alphabet arabe qu’ils s’acharnent à imposer malgré son caractère insensé et son inadéquation absolue à prendre en charge la phonologie berbère ? Ils y tiennent, pour la simple raison qu’ils veulent perpétuer notre amarrage au monde des ténèbres, car il n’échappe à personne que derrière cette agitation, il s’agit d’imposer notre filiation à des constantes nationales douteuses et importées, celles d’une Arabité et d’une Islamité tombées du ciel pour nous aliéner ad vitam-aeternam.

Le combat pour l’Amazighité se trouvera, dès lors, dévoyé en permanence, tant que des représentants légaux issus du peuple ne sont pas portés aux rangs supérieurs du pouvoir, incluant la magistrature suprême.

Et même si par miracle, cela se produisait, une autre question survient: aurons-nous aux commandes un jour suffisamment d’autochtones conscients et convaincus de la puissance phonématique, syntaxique et poétique des langues à ramifications berbères pour en ordonner l’utilisation officielle à tous les niveaux, politique, administratif, judiciaire, aussi bien par les dirigeants que par les dirigés ?

Il est permis d’en douter, car, encore une fois, seuls les médiocres occupent et continueront d’occuper les rouages d’un système contre-nature qu’ils se transmettent entre membres de la petite "famiglia", laquelle se targue d’avoir offert l’indépendance aux algériens, dixit Bouteflika. De ce fait, ils s’arrogent le droit d’imposer à tous la formule "vous êtes berbères, et comme nous, soyez fiers d’avoir été arabisés par l‘Islam !". Tant de légèreté au sommet de l’état est tout simplement ahurissant pour tout esprit, un tant soit peu éveillé, d’autant que cela dure depuis plus d’un demi-siècle. Et tous les signes semblent indiquer que c’est parti pour perdurer bien d’autres siècles encore.

Dans ce schéma sombre, sous le ciel des terres amazighes, il nous reste néanmoins une lueur de ravissement, celle de voir nos étendards s’étaler jusqu’aux confins du nord pour être portés et embellis par Stina la finlandaise. Demain qui sait, la Finlande écrira peut-être une page dans les premiers livres de lecture pour enfants, avec pour titre :"Nos ancêtres les berbères", pendant que sur les cimes de nos montagnes s’érigeront des minarets encore plus grands pour diluer les dernières cellules amazighes.

Profitons néanmoins de ces derniers instants d’authenticité pour écouter et nous laisser envahir par l’émotion que procure l’intonation du sud, psalmodiée par une femme du nord :

https://www.youtube.com/watch?v=ihpqscFjC7k

https://www.youtube.com/watch?v=-CeqmoVzEAU

https://www.youtube.com/watch?v=LWz3VmL15FA

Merci la Finlande ! Merci Stina !

Kacem Madani

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Commentaires (7) | Réagir ?

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mohand aghedu

Sadim,

Extirpez vous -fût-ce un court instant- de l'univers

"contestationnaire" dans lequel vous êtes enfermée

et, accordez vous un moment de grâce -pour antant que

vous y soyez encline- en prêtant l'oreille à cette bonne

femme qui interprête merveilleusement bien Slimane Azem et

Idir.

ps : Depuis que j'ai découvert mes origines, l'Algérie ne cesse

de cogner dans ma tête. Qui s'est "soulagé" d'une telle profession

de foi ? C'est, parait-il, un pseudo Kabyle répondant au nom étrange

de Prévost...

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rabah Benali

Bonjour à tous.

Merci Madani d'avoir rappelé aux nervis éguarés de cette terre Algérie souillée à l'arabo-islamisme de pacotille que la "Splendeur Djerdjer" est contemplative même de contrées aussi lointaines que la Finlande. Et que cette culture éternelle ne peut être appréciée par des débiles mentaux occupés plutôt à débattre du process des ablutions ou de la concentration en methane admissible dans les lieux de pratique de l'imposture venue d'Orient. Merci Madani pour l'article. !!

Rabah Benali

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