Etats-Unis : le Secret Service multiplie les bourdes
Le Secret Service a perdu beaucoup plus que sa directrice cette semaine. Ce service d’élite chargé de protéger le président des Etats-Unis a laissé en route une partie de sa crédibilité et est devenu l’objet de toutes les moqueries.
Costume impeccable, lunettes noires, visage impassible en train de murmurer dans un micro dissimulé sous la chemise: l’image des agents de l’USSS, abondamment relayée par le cinéma, a longtemps été mythique. Déjà ternie ces dernières années par des scandales de prostitution et d’alcool, elle est désormais sérieusement écornée.
Julia Pierson, chef de ce service qui compte quelque 6.500 hommes et femmes, a perdu la confiance de la Maison-Blanche et payé le prix d’une série d’incidents qui ont laissé les Américains sans voix.
Comment un homme muni d’un couteau a-t-il pu escalader la grille qui entoure les pelouses de la Maison-Blanche, parcourir plusieurs dizaines de mètres en courant, entrer par la porte principale et traverser plusieurs salles avant d’être finalement arrêté dans un salon de réception ?
Un autre incident, révélé par la presse américaine, a ajouté à la stupeur. Un vigile au casier judiciaire chargé, qui portait une arme sur lui en violation des protocoles de sécurité présidentiels, était présent dans le même ascenseur que Barack Obama lors d’une visite des Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC) à Atlanta.
Tout au long de la semaine, les ratés des agents, comme la piètre performance devant le Congrès de leur chef, dont la langue de bois a déconcerté, ont été une source d’inspiration intarissable pour les shows télévisés du soir.
«Les dysfonctionnements du Secret Service sont tels qu’ils ont été obligés de se tourner vers le Congrès pour trouver des solutions !», a lancé Jon Stewart dans le Daily Show (Comedy Central) en référence à la paralysie chronique sur Capitol Hill.
Dans le Late Show (CBS), David Letterman a rappelé que l’automne approchait sur la côte est des Etats-Unis: les écureuils, en quête de nourriture, ont commencé à s’affairer sur les pelouses de la Maison-Blanche, a-t-il relevé, ajoutant qu’ils étaient par conséquent «bien plus actifs que le Secret Service».
«La porte est toujours ouverte»
La Maison-Blanche risque de manquer à Julia Pierson, qui travaillait au sein de ce service d’élite depuis 1984, a reconnu Jimmy Fallon dans le «Tonight Show» (NBC). «Mais connaissant le Secret Service, elle devrait pouvoir revenir quand elle veut», a -t-il ironisé. «La porte est, littéralement, toujours ouverte».
Pour Jeffrey Robinson, co-auteur d’un livre sur le Secret Service avec l’agent Joseph Petro («Standing Next to History»), ces railleries sont difficiles à avaler pour des hommes et des femmes qui se consacrent nuit et jour à la protection du président et de sa famille. «Le moral est plus bas. L’encadrement les a laissé tomber et n’a pas su maintenir la motivation nécessaire», explique-t-il.
Une chose est sûre: la Maison Blanche est convaincue que des changements en profondeur sont indispensables. Si son porte-parole a défendu Mme Pierson lorsque les premières attaques ont fusé, personne n’a tenté de la retenir lorsqu’elle a présenté sa démission. Joseph Clancy, retraité du Secret Service qui fut directement en charge de la protection de M. Obama, a été désigné pour assurer l’intérim.
Les présidents américains deviennent souvent proches de ces agents chargés d’assurer leur sécurité 24 heures sur 24. Soulignant à plusieurs reprises sa gratitude pour «les sacrifices» qu’ils font pour lui et sa famille, M. Obama s’est gardé de formuler la moindre critique à leur encontre.
Le président et la Première dame ont pourtant, semble-t-il, été furieux d’apprendre qu’il a fallu plusieurs jours au Secret Service pour découvrir que des balles avaient été tirées, en novembre 2011, sur les murs et la fenêtre blindée de l’étage où vit la famille Obama.
Certains critiques jugent que l’absence de réformes de fond est liée au transfert de ce service, initialement sous la coupe du Trésor, au sein de l’immense ministère de la Sécurité intérieure (DHS).
Postés sur le toit de la Maison-Blanche, devant les grilles au milieu des milliers de touristes ou à l’arrière de l’avion présidentiel Air Force One, les agents sont omniprésents autour du président. Mais leur tâche ne s’arrête pas là. Ils sont responsables de la sécurité à vie des anciens présidents et vice-présidents, de leurs épouses et de leurs enfants, ou encore des chefs d’Etat et de gouvernement étrangers en visite.
Le rythme devient particulièrement dense lors des campagnes présidentielles durant lesquelles ils ont aussi, depuis l’assassinat du sénateur Robert Kennedy en 1968, la charge de protéger les candidats.
AFP
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