Une histoire pour l’Aïd
Farida et Kaddour nous définissent la gourmandise politique comme suit : C’est un procédé politique développé à la Gargantua.
Le procédé consiste à incorporer des agents étrangers à un système politico-économique pour former des ponts mystérieux entre les clans qui dévorent nos moutons au-delàs de nos frontières. Ces ponts solidifient les relations entre les malfaiteurs et les gangsters qui échangent nos aliments contre la drogue qui inonde le pays. Après la formation de ces ponts, les discussions politiques deviennent fourbes et la rumeur remplace l’information officielle quand nos bouches sont touchées. Cette opération rend le système commercial moins crédible et plus élastique avant sa faillite. La rupture avec le système s’annonce quand le client s’aperçoit qu’il a applaudi hier des élus à la chkara «sac poubelle» qui ne méritent plus d’être applaudis aujourd’hui. Voltaire a bien décrit cette situation : «Le public applaudit même aux pensées les plus fausses quand elles sont brillantes. Oui sans doute ! On applaudira le premier jour, et on s’ennuiera le second».
Farida et Kaddour apprécient les paroles du Docteur Mouloud Hédir, l’expert en commerce, et surtout son expression : «Les Algériens ne sont pas tous de bras cassés». Farida n’a pas une tête carrée et ses bras ne sont ni longs ni cassés mais elle ne comprend pas les combines dans notre commerce. Elle a lu des documents sur la viande Halal publiés en France. «L’Algérie, l’Egypte et la Tunisie importent n’importe quelle viande pourvu qu’elle soit tamponnée “Halal”. Selon des rumeurs persistantes, d’habiles hommes d’affaires algériens basés à Marseille importent des cargos entiers de viande venant d’Argentine, et la réexportent directement en Afrique du Nord, après qu’un imam local ait mis son tampon “Halal” sur les documents — moyennant un versement généreux»
Farida et Kaddour ne contrôlent ni la rumeur ni l’honnêteté de nos imams mais pensent que l’ex-ministre de l’agriculture Benaïssa ne s’entendait pas bien avec le secrétaire général de l’union des fellahs et l’ex-ministre des mosquées Ghoulam Allah. Le Coran ne passe pas entre ses trois personnes. Les fatawis importées montrent des fissures dans la couche de glace qui protège la viande dite congelée. Benaissa voulait toujours supporter la politique de l’importation de la viande hallal congelée pas trop aimée par les algériens. Ghoulam Allah ne peut pas accepter les pensées trop froides de Benaissa.
Il propose une fatwa chinoise pour éviter un désastre sibérien en Algérie. Il s’adresse au chef du syndicat de la prière si Djeloul et dit : «Je mange le frais quand les autres cherchent le congelé». Le responsable des prières pense que ce phénomène explique la discorde et les disputes entre le ministère du Commerce et le ministère de l’Agriculture depuis que l’éternel secrétaire général de l’union des fellahs a affirmé : «Chez nous celui qui mange un aliment frais qu’un autre ne peut pas se permettre, augmente la frustration et la rancune de celui qui ne le mange pas souvent. Je vous le dit franchement. Depuis que j’ai quitté ma fonction de fellah «moustafid» en 1972, j’ai jeté le turban et la djellaba du fellah. Je les ai remplacés par une cravate, un costume à railleurs et un chapeau en cuire du type Al Capone. Je suis devenu norvégien de mentalité et je ne mange que du saumon. Les souks el fellah n’existent plus et les fellahs de ma région ne me font plus confiance. Ils m’ont vu abandonner ma politique socialiste dans le domaine agricole. C’est la raison qui explique la présence des protéines argentines congelées et supposées halal dans nos marmites».
La causerie du chef de l’union des fellahs n’a pas marché puisque les imams mangent la viande congelée tamponnée par leur collègue de Marseille. D’après l’imam Chams-Eddine, le Coran mal imprimé par Ghoulam Allah est souvent mal interprété par le chef de l’union des fellahs quand le congelé est discuté par nos députés et sénateurs. Nos imams n’écoutent plus la thèse de ce ghoulam quand la fatwa chinoise n’arrange pas notre frère norvégien. En contraste, les réformistes du FLN avouent qu’un bélier décongelé au soleil de Touggourt et trempé dans une eau sacrée de Oued-Souf devient un halal selon le rite des suivistes de la fetwa «soufisante» même si la viande n’est plus suffisante.
Pour Amara Benyounes, la viande congelée pour une fête religieuse givre la politique en Algérie. Il chuchote à l’oreille de Nouri et dit : «L’Algérie a importé pour 30 millions d’euros de viandes rouges durant les six premiers mois de l’année en cours. Un chiffre important que l’exploitation des potentialités nationales aurait pu éviter au trésor public.» Pour se faire mieux écouter, Sellal interpella les éleveurs et les bergers à se secouer pour «assurer une meilleure production». Nouri réplique : «Je vais appliquer la politique de Panurge pour dénouer ce nœud trop serré. Une fois le nœud défait, je demande à Pantagruel de garder les moutons à Djelfa». L’humour de notre politique reflète notre viande le jour d’Eid El Adha quand Farida et Kaddour ne sont pas satisfaits par les paroles mélodiques de nos responsables. La suite de ce récit politique image l’intelligence de Farida et la naïveté de Kaddour.
Pour les Français, Rabelais était un humaniste engagé qui se battait pour la justice et la liberté. Il était contre la violence et militait pour le bien-être de ses semblables. Chez nous, Kaddour est un humaniste qui se bat quotidiennement pour acquérir un fardeau de baguettes de pain et quelques litres de lait enchâssé pour ses onze enfants sous-alimentés. Kaddour vit toujours à Cap Falcon même quand sa retraite de la mairie d’Ain Türk ne lui suffit pas pour vivre comme il le veut. Il vit comme tous les retraités communaux dans la peine et la frustration dès qu’une fête religieuse s’annonce. Kaddour ne connaît pas l’école nationale d’administration algérienne mais il connaît très bien les bergeries qui forment les maquignons. D’après Kaddour, la bergerie délivre un diplôme qui permet aux sortants de cette école un emploi de contrôleur et manipulateur des prix dans nos souks.
Quelques jours avant la fête d’Aid El Adha, Kaddour prit la décision de visiter les souks pour comparer les prix des moutons par rapport aux années précédentes. Il constate que les prix s’envolaient à une altitude imaginaire. Pour Kaddour, la culture du cerf-volant n’est pas algérienne. Choqué par les prix des béliers, il se hâta vers sa voisine Farida, un pécheresse connue par son intelligence à Cap Falcon. Il lui raconta ce qu’il a vu. Kaddour s’exprime calmement et en toute clarté. «Dans nos souks, il suffit qu’un pauvre jette son regard sur un mouton pour que le nouveau riche et le dealer de drogue qui se trouvent à ses côtés veulent eux aussi posséder la bête désirée par cette personne. C’est ce geste qui donne des ailes à nos moutons.»
Farida n’est ni riche ni vendeuse de drogue marocaine. Elle est très cultivée et ne se sent pas visée par la pensée de Kaddour. Farida n’hésite pas de dire à Kaddour que le mouton est devenue vraiment une discorde entre les algériens et ceux qui les gouvernent. Pour bien décrire la situation, elle demanda à Kaddour d’écouter l’histoire des conséquences de la cherté du mouton au temps de Râblais. Il recommanda à Kaddour de faire comme monsieur Panurge s’il veut changer la situation et manger une viande fraiche pas chère. Très curieux, Kaddour demanda à Farida de lui raconter l’histoire de monsieur Panurge à la manière de Rabelais. Farida raconte l’histoire de Panurge comme elle l’a apprise à l’école : «Au cours de ses aventures, Pantagruel, frère Jan et Panurge se trouvent sur un bateau. A bord du même bateau se trouvent également des marchands, dont l’un possède un troupeau de moutons. Un débat oppose le marchand de moutons à Panurge, celui-ci se moquant de la tenue de l’autre, le traitant de cocu. Le débat apaisé, Panurge souhaite acheter un mouton au marchand, qui durant des pages et des pages fait louange de ses bêtes avant de finir par en céder un, à prix fort. Mais Panurge, loin d’être réconcilié avec le marchand, choisit la plus belle des bêtes et la jette à la mer. Le reste du troupeau entend avec affolement les bêlements de la bête qui se noie, et se jettent à leur tour à la mer, poussés par l’instinct grégaire. Le marchand, qui veut retenir quelques spécimens, est emporté et fini par se noyer ; d’autres moutonniers présents sur le navire subissent le même destin. Ainsi finit la vengeance de Panurge».
La culture de Kaddour est très limitée. Elle se limite aux frontières de son champ d’oignons à Cap Falcon quand Benaissa propose la solution de Panurge dans le domaine agricole. Kaddour pensait que Panurge était un mécanicien à Cap Falcon et que Rabelais était un ancien maire d’Ain Türk du temps colonial. Ne pouvant plus satisfaire la demande de ses enfants dans la joie et le bonheur, il mentit à ses enfants. Il leur a promis un bélier français pour la fête de l’Eid El Adha. L’idée du bélier français est une idée longtemps appliquée par Farida. Farida pense que le bélier français n’est pas cher. Il ne dépasse pas les milles cinq cent dinars algériens. Il est donc juste-juste à la portée de Kaddour. C’est ainsi que Farida recommanda à Kaddour un bélier français. Kaddour séduit par les paroles de sa voisine, il demanda à Farida de lui ramener un bélier français la veille d’Aïd El Adha. Farida pense que les responsables sortants de l’école d’administration sont incapables de contrôler les souks. Ils ne méritent pas de gérer ce pays quand leur compétence dépasse à peine les compétences d’un garde champêtre dans la daïra de Birine dans la région de Djelfa.
Kaddour rigola pour un bon moment et dit : «Je pense que les marchands de moutons chez nous méritent une noyade dans la mer comme les marchands de moutons de Panurge. Maintenant je comprends pourquoi les béliers sont très chers dans nos souks».
Les enfants de Kaddour, très enchantés par les paroles de leur père, attendent avec impatience l’arrivée du bélier français. La veille de l’Aïd El Adha, Farida ramena deux béliers français. Un pour elle et l’autre pour Kaddour son voisin. Les enfants de Kaddour n’ont pas cru à leurs yeux. Un beau bélier français ! Ce bélier pesait 15 kg. Il n’avait pas de cornes. Il avait de longues oreilles pendantes. Il ressemblait à un lapin. Kaddour rentre tard le soir. Avant de franchir le seuil de sa cabane, Il demanda à sa femme si Farida a ramené le bélier français. La femme de Kaddour répond en souriant : Oui un bélier lapin ! Kaddour ne croyait pas aux paroles de sa femme. Il se dirige vers la petite cours pour voir le beau bélier français. Choqué par ce gros lapin, il alla voir sa voisine Farida. Farida expliqua à Kaddour que ce lapin est de race française. Les chercheurs français ont travaillé pendant plusieurs années pour arriver à ce résultat. Effectivement c’est un lapin mais l’académie française des sciences lui a donné le nom «bélier français». Il est gros et il pèse comme un bélier.
Pour éviter les disputes nocturnes avec son voisin Kaddour, Farida inventa une histoire qui justifie son lapin. Elle expliqua à Kaddour que les Chinois qui travaillent chez nous ont une bonne culture. Dans la culture chinoise les individus sacrifient l’animal qui correspond à leur signe dans l’horoscope chinois pour satisfaire Bouddha. Le signe de Farida est Tou. Tou veut dire lapin en chinois. Tou est le quatrième animal à s’être présenté devant Bouddha. Farida continue, une consultation de l’horoscope chinois m’a permis de constater que les individus nés sous le signe Tou sont très calmes et réalistes. Il avoue à son voisin Kaddour qu’il est très réaliste, il ne peut pas se permettre un bélier de Djelfa. C’est pour cette raison qu’il sacrifie un lapin à la manière chinoise.
Par curiosité, Kaddour demanda à Farida de vérifier son signe dans l’horoscope chinois. Kaddour est né en automne. Son signe est un coq. Chez les Chinois, le coq est le dixième animal à s’être présenté devant Bouddha. Les individus du coq sont des amis fidèles et courageux. Ils ont un respect pour les lois et les règles. Kaddour reconnaît qu’il est exactement comme le coq chinois.
En conclusion : Kaddour revient à sa famille et raconta à ses enfants ses aventures avec Farida et l’histoire de l’horoscope chinois. Kaddour s’estime heureux de son signe et se moque de celui qui a pour signe le cochon. Kaddour jura devant ses enfants que l’année prochaine il sacrifiera un coq. Kaddour n’est pas algérien pour rien. Il demande à son Excellence de fermer les écoles bergeries, de nommer Panurge comme ministre des animaux et Pantagruel comme ministre de la religion. Après cette nomination, Panurge va visiter Djelfa pour restructurer ses souks et Pantagruel va prohiber la viande congelée pour les riches et appliquer la fatwa chinoise pour les gourmands et les fraudeurs. Comme ça nos enfants vont rigoler et dire au maître d’école qui s’occupe de l’économie : Le prix du mouton de l’Aïd en Algérie se situe entre l’intelligence de Farida et naïveté de Kaddour.
Pr. Omar Chaalal
Commentaires (2) | Réagir ?
On rapporte que le prix du mouton en cette fête religieuse se situe entre 30 000 et 100 000 DA, entre 2 smic et 7 smic local, un algérien qui débourse une telle somme pour un mouton n'est pas un citoyen, ne mérite aucun respect, pire encore, sa pauvre cervelle est dénuée de neurones, cela renseigne sur le degré de l'endoctrinement du citoyen, sur la bêtise de l'algérien, sur l'avidité et la cupidité de la mafia, souvent les populaces vendent leurs biens comme les meubles, les bijoux pour acheter le mouton, primo : le dinar algérien est une monnaie de singe, secundo : l'état au sens propre du terme n'existe plus, ou sont les contrôleurs, ou est l'autorité de la concurrence et des prix, ou sont les agents le fisc, les gendarmes et les policiers au lieu de traquer les jeunes manifestants ou des suppoters dans les stades, feront mieux d'aller débusqué les crimines économiques, remarque ceux qui devront donné l'ordre sont embourbé dans les mêmes affaires de corruptions.
Votre histoire gargantuesque "d'Alcofribas Nasier" est très amusante et sensée mais je crains qu'elle ne trouve aucun écho au pays dev "alhamdouallah" et alahghaleb". Le carnage va continuer au plus grand dam des moutons de panurge "càd nous".