Le trafic de la compagnie Air France paralysé
Plus d'un vol sur deux est annulé en raison de la grève des pilotes, et le mouvement risque de prendre de l'ampleur.
Premier jour d’une grève qui pourrait durer : au moins la moitié des avions d’Air France seront cloués au sol lundi, faute de pilotes, une proportion qui pourrait grimper à huit appareils sur dix, selon un syndicat. «Je ne peux pas rentrer chez moi, merci la joie !», râle lundi matin Jean-Marc Ragot, qui, venant d’atterrir de Nairobi, n’a plus de correspondance pour Lyon.
Dans la queue du guichet d’échange des billets Air France du terminal F de Roissy, une vingtaine de personnes patientent peu après 7 heures. Stressé car il doit«trouver absolument une solution» pour gagner Munich, un autre passager se dit néanmoins «solidaire avec les pilotes», «dans un monde qui tire les salaires vers le bas». Opposé aux conditions de développement de la filiale à bas coût du groupe, Transavia, le SNPL (majoritaire) a appelé à une grève reconductible du 15 au 22 septembre ; le Spaf, deuxième syndicat, et Alter (non représentatif) jusqu’au 18.
La compagnie aérienne estime pouvoir assurer près de la moitié des vols (48%) après avoir recensé environ 60% de grévistes. Elle fera connaître à 11 heures ses prévisions pour mardi.
A Toulouse, la situation était pire : 32 vols sur 41 prévus au départ ont été annulés, soit 80%, selon une source aéroportuaire. Prévoyant de sérieuses difficultés, des retards et perturbations en sus des annulations, Air France a enjoint ses clients de «reporter leur voyage, changer leur billet sans frais» ou «se faire rembourser».
Les négociations devaient reprendre vers 10 heures avec les syndicats représentatifs après avoir «achoppé» dimanche, selon Jean-Louis Barber, président du SNPL AF Alpa. Un mouvement d’une semaine serait le plus long conflit mené par des pilotes d’Air France (groupe Air France-KLM) depuis 1998. La direction évalue son coût à«10 à 15 millions» d’euros par jour. Pour ses clients, auxquels elle a envoyé 65 000 SMS, la compagnie évoque des possibilités de «dédommagement» et indique que «le programme de vol sera mis à jour 24 heures avant l’heure du départ». Et pour limiter les dégâts, elle va s’efforcer de faire voler des avions «de plus grosse capacité».
La « bérézina»
Mais le Spaf prédit une «bérézina» dès ce lundi avec «80 à 85% de vols annulés», sur la base d’informations provenant selon lui du centre de commandement opérationnel de la compagnie. Et «quand la compagnie aura épuisé le réservoir de pilotes de l’encadrement», contraints au repos après avoir été appelés en renfort lundi explique-t-il, «on arrivera au blocage total» a estimé auprès de l’AFP Julien Duboz, son porte-parole.
Un pronostic partagé par Jean-Louis Barber : «si le taux de grévistes reste aussi élevé» (75% lundi selon lui), «on peut imaginer que ce sera pire encore mardi et, je pense, bloqué mercredi». Son syndicat dénonce dans les projets de la direction une porte ouverte à «l’externalisation des emplois» de pilotes et au «dumping social», quand la compagnie y voit un levier de croissance déterminant.
«L’idée c’est de faire de Transavia un outil de reconquête du marché», face à «une concurrence terrible», a expliqué le PDG du groupe Air France-KLM Alexandre de Juniac dimanche soir, en pressant les pilotes de participer à «un projet magnifique», porteur selon lui d’un millier d’emplois en France, dont 250 de pilotes.
Alors qu’un plan de départs volontaires a été ouvert en août pour 200 des 3 760 pilotes d’Air France, face à la concurrence des compagnies à bas coûts, le groupe mise désormais sur Transavia, avec une augmentation de la flotte en France de 14 à 37 avions en cinq ans et, en Europe, de nouvelles bases dès 2015, mais avec des pilotes sous contrat local. Alexandre de Juniac a rejeté mercredi dernier la principale revendication des syndicats d’un contrat unique pour les pilotes aux conditions actuelles d’Air France pour les avions de plus de 100/110 places, quelle que soit la compagnie du groupe Air France.
EasyJet a profité de la grève chez son concurrent pour déployer 1 000 sièges supplémentaires sur Paris-Toulouse et Paris--Nice, comme la compagnie régionale Air Corsica, qui a renforcé dès lundi sa ligne Ajaccio-Paris.
AFP
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