La France renonce pour l'instant à livrer un Mistral à Moscou
La France a annoncé mercredi qu'elle renonçait pour l'instant à livrer un premier porte-hélicoptères Mistral à la Russie en raison de ses "actions" en Ukraine, à la veille d'un sommet de l'Otan où elle aurait été mise sous pression sur ce dossier. Le contrat s'élève à 2 milliards d'euros.
Le premier des deux Bâtiments de projection et de commandement (BPC) de type Mistral devait être livré en octobre et 400 marins russes se forment depuis le 30 juin à sa manoeuvre dans le port de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique). Un contrat de deux milliards d'euros. Si cette décision se confirme, la France devra rembourser le 1 milliard d'euros. "Les actions menées récemment par la Russie dans l'est de l'Ukraine contreviennent aux fondements de la sécurité en Europe", peut-on lire dans un communiqué de la présidence.
"Le président de la République a constaté que, malgré la perspective d'un cessez-le-feu qui reste à confirmer et à être mis en oeuvre, les conditions pour que la France autorise la livraison du premier BPC ne sont pas à ce jour réunies."
A Moscou, le vice-ministre russe de la Défense Iouri Borissov a déclaré à l'agence de presse Itar-Tass que la décision française ne constituait pas une "tragédie". "Même si, bien sûr, cela est déplaisant et ne fait qu'ajouter à certaines tensions dans nos relations avec nos partenaires français, l'annulation de ces contrats ne sera pas une tragédie pour la modernisation (de notre armée)", a-t-il assuré.
François Hollande avait toujours dit jusqu'à présent que le contrat serait honoré, malgré la pression des Etats-Unis, du Royaume-Uni et des anciens satellites de l'URSS, même si la livraison du deuxième BPC, prévue en 2015, dépendra, avait-il dit, de "l'attitude" de Moscou.
Le président français avait souligné que les sanctions européennes prises contre la Russie ne visaient que les contrats futurs et, mardi encore, des diplomates français assuraient que la livraison du premier Mistral irait de l'avant.
L’opposition soutenait la livraison
L'opposition soutenait la détermination de l'Elysée, soulignant que d'autres contrats, comme celui pour la livraison éventuelle d'avions de chasse Rafale à l'Inde, seraient menacés si l'on donnait le signal que la France n'honore pas sa parole.
Mais la proximité du sommet de l'Otan, jeudi et vendredi à Newport (Pays de Galles), où la réponse à ce que les alliés qualifient d'intervention directe de la Russie en Ukraine sera au centre des discussions, a visiblement incité François Hollande à changer de pied sur ce dossier. "La France a entendu la pression de la communauté internationale", a déclaré un diplomate français.
Un haut responsable de l'Otan s'est félicité de la "bonne décision" prise par la France, soulignant que la Russie avait agi de telle manière qu'elle était devenue inévitable. "C'est clairement une décision prise parce qu'en dépit de toutes les tentatives des alliés pour encourager la Russie à prendre la voie de la désescalade, elle a suivi le chemin inverse, de l'escalade, de la déstabilisation et, clairement, le gouvernement français a estimé que la livraison n'était pas possible", a-t-il déclaré aux journalistes à Newport. Un renoncement à la livraison des deux navires, pour un montant d'1,2 milliard d'euros, obligerait la France à dédommager Moscou et tendrait les relations entre les deux pays.
Il s'agit aussi d'une mauvaise nouvelle pour les chantiers navals STX de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique), où la commande d'un "ferry écologique" passée en janvier dernier par Brittany Ferries vient d'être "suspendue" faute de financements, selon les syndicats. Les chantiers navals construisent les deux navires pour le compte de DCNS et de la Direction générale de l'armement (DGA).
A la fois navire-amphibie, poste de commandement et hôpital embarqué, le Vladivostok –construit à Saint-Nazaire et à Saint-Pétersbourg– dont la livraison était imminente, peut transporter jusqu’à 16 hélicoptères et déployer à terre 450 soldats et des "forces mécanisées", selon STX.
Un deuxième BPC baptisé Sébastopol, du nom de la ville de Crimée où est basée la flotte russe de la mer Noire, doit être livré fin 2015 à la Russie. La commande comprenait également une option pour deux autres navires du même type, mais elle n'a pas été levée à ce jour.
Avec Reuters
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