Le problème libyen oblige-t-il l’Algérie à cautionner un régime douteux ?

Bouteflika reçoit le putschiste Abdelfattah Al Sissi
Bouteflika reçoit le putschiste Abdelfattah Al Sissi

Quel intérêt Bouteflika aurait-il de détourner Al Sissi de sa destination pour le recevoir en grandes pompes ? Que gagnera l’Algérie de cette visite éclaire sinon de donner plus qu’elle en reçoive ?

Le jeune maréchal vient d’accepter les conditions américaines et saoudiennes en recevant du premier une aide militaire jusqu’au là bloquée de plus de 1,3 milliard de dollars et du second une caution des pays de la coopération du Golfe. En allant à Malabo en Guinée Equatoriale pour valider le retour de l’Egypte à l’Union africaine, ce passage en Algérie lui permettra de gagner en crédibilité pour tenter de recoller les morceaux d’une Egypte ravagée par une fracture sociale dont il est l’artisan incontestable. Pourtant à la veille de sa visite, la communauté internationale vient de subir un choc devant un simulacre de procès des trois journalistes d’Al Jazeera les accusant de soutien aux islamistes pour les condamner de 7 à 10 ans. Amnesty Internationale parle carrément de "jour noir pour la liberté de la presse." La crainte quasi-permanente du maréchal d’un retour de manivelle que réussiront les manifestations de tous les jours, le contraint à ce genre de procès de masse du type stalinien.

Wikithawra, une banque de données en ligne alimentée par le Centre égyptien pour les droits économiques et sociaux (ECESR), a mis à jour ses derniers chiffres. Terrifiants, ils sont dignes des plus dures dictatures militaires qui soient. Depuis le coup d'Etat de juillet 2013, 41 163 personnes ont été arrêtées dont 926 mineurs et 4 768 étudiants et transférées devant la justice ; 89 % d'entre elles ont été interpellées pour leur participation à des manifestations politiques. Seuls 4 % sont liés à des actions terroristes. Et cela, sans compter les dizaines de prisonniers détenus dans des prisons secrètes, sans charge retenue contre eux, soumis aux pires sévices et dont on ignore tout de l'état de santé, selon un communiqué d'Amnesty International publié jeudi 22 mai. En guise de réponse, le ministre de la justice, Nayyer Abdelmoneim Othmane, a annoncé en conférence de presse qu'il n'y avait aucun détenu politique dans les prisons égyptiennes. Quant au ministère de l'intérieur, il refuse toujours de communiquer les chiffres officiels, malgré les demandes des journalistes. De nombreuses organisations nationales et internationales ne cessent de dénoncer, preuves à l’appui des violations répétées des droits de l’homme. Elle ne semble pourtant pas écorner la popularité du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, toujours et encore présenté par les médias égyptiens comme le "sauveur de la nation" face aux Frères musulmans.

1- Les régimes passent mais les peuples restent

Ce qui est visible à l’œil nu est que l’Égypte est divisée en deux : Pour les uns, qu'importent les jours sanglants des neuf mois -, le général Abdel Fattah Al-Sissi est le nouveau Nasser. L'homme providentiel que le pays attendait. Pour les autres, autour des Frères musulmans, c'est un général putschiste, auteur du coup d'État contre un président élu à la régulière, Mohamed Morsi. Ils lui ont déclaré la guerre "tant qu'il sera de ce monde". Celui-ci entend bien les casser. Derrière des Ray Ban aux verres foncés, se cache pourtant une personnalité complexe. Le général Abdel Fattah Al-Sissi, 58 ans, devient le nouvel homme fort aux yeux de tous. Un nouveau raïs qui aime cultiver son mystère, un "homme de l'ombre", ex-chef des puissants services de renseignements militaires, dont Mohamed Morsi, le président islamiste élu le 24 juin 2012, avait pourtant fait un homme clé en lui confiant les forces armées. Il sait aussi soigner son image. Il fuit les journalistes et a interdit à ses proches de parler de sa vie familiale, mais ses portraits ornent les murs du Caire et les façades des administrations depuis qu'il a destitué Mohamed Morsi, il circule en vélo et se permet un bain de foule mais entouré d’un important dispositif sécuritaire. Il aime cultiver le culte de personnalité, pourtant, lorsqu’il avait été désigné par Mohamed Morsi en août 2012 pour prendre la tête de l'armée, les libéraux et la gauche nationaliste ont fait grise mine. Certains voyaient en lui un islamiste camouflé. Sa réputation de musulman pieux et austère et ses liens familiaux avec les Frères musulmans ont fait craindre plus qu’un.

2- Al-Sissi a séduit Bouteflika par sa phraséologie sur le terrorisme transfrontalier

Dans son discours du 11 janvier dernier, adressé au directorat chargé du moral des militaires égyptiens le général Abd Al Fatah Al Sissi s’est attelé à la refonte en profondeur des orientations religieuses. Il pointe du doigt cette principale bataille, et ce plus grand défi que le peuple égyptien doit relever. Il a souligné la nécessité de présenter une nouvelle vision et une compréhension moderne et globale de l’islam, en remplacement du discours immuable qui a cours depuis 800 ans. Il a dit aussi qu’il incombe à tous de se conformer au vrai islam, afin d’améliorer l’image de cette religion aux yeux du monde, attendu que l’islam est jugé à travers le monde, depuis des décennies, comme étant la religion de la violence et de la destruction, à cause des crimes commis faussement en son nom.

Ainsi, isolé de part le monde, il cherche à rejoindre le club des « fighting terrorism ». Il s’agit pour lui d’une nécessité absolue, car il y va de la survie de l’Égypte en tant que nation. Une vague sans précédente de violences organisée par les Frères musulmans l’a obligé de dissoudre la Confrérie et de la déclarer hors-la-loi en tant qu’organisation terroriste. C’est la première fois dans l’Égypte moderne que des muftis osent sacraliser un zaim comme on l’a fait pour Al-Sissi en le déclarant comme un don de Dieu. Ce qui fait dire à chercheur égyptien "l’inconscient collectif des Égyptiens est à la recherche d’un pharaon qui redonne à l’Égypte l’équilibre, l’harmonie et la paix, c’est la raison pour laquelle el Sissi, s’exprimant au nom des Égyptiens, parle de l’importance de la refonte en profondeur du discours islamique." En effet l’Égypte musulmane a refoulé son passé pharaonique et chrétien, ce passé qui est aussi sa vraie nature remonte lentement à la surface et cherche à s’exprimer. Or il est fondamentalement incompatible avec l’islam, s’il ne l’était pas il n’aurait pas été refoulé. Comment se fait-il qu’un chef militaire se mêle d’un sujet qui ne relève pas de ses compétences? Si l’on se réfère au régime pharaonique, la réponse est simple : le pharaon dans l’Égypte ancienne n’était pas seulement le roi, il était également chef religieux et par le fait même intermédiaire entre ses sujets et les dieux égyptiens. Son autorité s’étendait sur tous les temples et sur tous les prêtres. Parce que l’Égypte renoue tranquillement avec sa vraie nature, son nouveau chef se trouve naturellement à assumer sa responsabilité morale de pharaon, car il s’agit bien de responsabilité morale, la civilisation de l’Égypte ancienne n’aurait pas duré plus de trois mille ans si l’institution pharaonique ne reposait pas sur des bases morales solides. Al Sissi est convaincu que le peuple égyptien poussera un profond soupir de soulagement quand la version revue et corrigée de l’islam lui sera présentée. Le temps presse, l’Égypte doit se remettre en selle rapidement parce que sa survie est en jeu. L’islam tel qu’on le connaît est son principal handicap, l’islam doit changer en profondeur. C’est ce que le peuple égyptien désire au fond de lui-même et c’est ce que le maréchal a parfaitement compris. Reste à savoir si l’autre frange de la société lui laisse le temps de mettre en œuvre sa stratégie. Il sait parfaitement qu’un retour de manivelle y va de sa vie.

3- Les manifestations pro-Morsi se poursuivent sans arrêt depuis le 30 juin 2013

Cette première sortie d’un président égyptien se veut rassurante pour montrer au monde entier que la feuille de route tracé par l’armée se poursuit normalement et sera bientôt suivie par une reprise économique. Que les perturbations des frères musulmans n’ont aucune incidence sur la marche à suivre. Pourtant le vendredi dernier, les manifestations pro -Morsi à travers toutes les mouhafadhts égyptiennes ont fait plus deux morts et des centaines d’arrestations. Les attaques visant les corps constitués de l’Etat et les institutions se multiplient. Un général de la police a été tué, mercredi 23 avril, par une bombe placée sous sa voiture au Caire, victimes de multiples attentats dans une Egypte théâtre d'une sanglante répression .L'attaque a été perpétrée dans le quartier huppé du 6-Octobre, dans l'est de la capitale, et visait le général de brigade Ahmed Zaki, haut responsable de la police antiémeute. Cette unité est toujours aux premiers rangs des forces de l'ordre dans la répression des manifestations des pro- Morsi. Il s'agit de la cinquième attaque visant la police en une semaine, et M. Zaki est le troisième général tué depuis le début de l'année dans des attentats revendiqués principalement par des groupes Djihadistes armés disant s'inspirer d'Al Qaida et assurant agir en représailles de la répression menée contre les partisans de M. Morsi, seul président jamais élu démocratiquement en Egypte. Depuis la destitution et l'arrestation du président Morsi par l'armée le 3 juillet, plus de 1 400 manifestants islamistes ont été tués par les policiers ou les soldats — dont 700 au Caire dans la seule journée du 14 août 2013 et plus de 25 000 de ses partisans ont été arrêtés et des centaines condamnés à mort dans des procès dont la rapidité inquiète le monde entier .Dans le même temps, les attentats et attaques visant la police et l'armée se sont multipliés : le gouvernement installé et dirigé de facto par l'armée assure que plus de 250 policiers, près de 190 soldats et une soixantaine de civils ont péri dans ces attaques, qu'il attribue, lui, aux Frères musulmans, l'influente confrérie de M. Morsi, décrétée "organisation terroriste".La majorité des attentats et attaques armées ont été revendiqués par Ansar Beït Al-Maqdess, un groupe Djihadiste qui dit s'inspirer d'Al Qaida, et basé dans le Sinaï, d'où il tire également régulièrement des roquettes sur Israël.

4- Conclusion

Malgré que la ligne éditorialiste de la chaîne Al Jazeera ne soit pas du tout un exemple à suivre, ses journalistes quant à eux, méritent de la solidarité. Ceci semble passé sous silence par l’ensemble des quotidiens nationaux qui ont couvert la visite et encore plus les associations des droits de l’homme qui ont l’habitude de ne pas rater de tels événements. Maintenant sur le fond de cette visite éclaire et en juger par la déclaration à son arrivée à l’aéroport international Houari Boumediene du président égyptien lui-même : "Ma visite en Algérie a pour objectif de dégager une véritable entente et une vision conjointe des intérêts communs et des défis qui se posent aux deux pays et à la région". On comprend aisément que l’Égypte pourrait être sollicité dans le règlement des problèmes Libyens. Mais avec les problèmes économiques dans lesquels ce pays se débat, on est en droit de se poser des questions de ce que peut espérer réellement l’Algérie de ce soutien pour ne pas dire reconnaissance de facto de la nouvelle autorité égyptienne. N’oublions pas que l’Algérie est la première visite de ce nouveau président fraîchement élu. Les Etats-Unis lui rendent visite certes, mais peuvent-ils le recevoir chez eux ? En évoquant aussi que "les deux pays ont besoin d’oeuvrer ensemble sur nombre de questions". Cherche-t-il des astuces pour lutter contre le terrorisme qu’il pense les trouver en Algérie. Le contexte est-il le même ? 

C’est dommage que Bouteflika, jeune ministre des Affaires étrangères, devait sillonner le monde pour promouvoir la vision de l’Algérie qui ne traite qu’avec les peuples et non les régimes, semble aujourd’hui ignorer tout cela pour suivre des aventuriers qui guident leurs peuples vers les ténèbres.

Rabah Reghis, Consultant et Economiste Pétrolier

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Commentaires (7) | Réagir ?

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uchan lakhla

Mais bon Dieu, de quoi parle t-on ? De deux pantins imposés par l'oncle SAM et ses alliés qui ne sont même pas élus, qui ignorent dans le détails la situation de leurs pays, alors s'occupés des grandes affaires où l'oncle SAM nage en eau trouble, c'est donné trop d'importance à deux marionnettes, c'est juste pour amuser la galerie et montré à deux troupeaux de moutons qui sont les deux peuples, que nous avons de grands stratèges et deux grands visionnaires, un état avec toute la smala de services et de moyens qui n'est pas en mesure de voir une colonne de pik up lourdement armés, s'attaqué à l'une de ses pépites, vas par quel miracle s'attaquer à des problèmes régionaux de grande complexité, c'est bien d'avoir de l’imagination, mais pas avec nos ignares grabataires.

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klouzazna klouzazna

Celui qui a une maison en VERRE n'a pas intéret à jeter les autres avec des pièrres !!!

il est utile de commencer par identifer de quel coté se niche le DOUTE !!! du côté de la gestion par la jeunesse ou de celui d'une gestion par la sénilité !!!

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