L'année astronomique 2013 : un mythe ou une réalité ?
Avec 81 tirs dont 78 succès, l'année astronautique 2013 est la plus dense depuis la dernière décennie parmi les points forts de l'année : les 31 tirs réussis de la Russie, l'entrée en service de deux nouvelles fusées américaines (Antarès dont le premier étage est un moteur russe conçu à l'époque de la course à la Lune et le Falcon-9 de Space-X), les 14 tirs chinois ou l'entrée dans le club des puissances spatiales de la Corée du Sud.
En ce qui concerne les vols habités, treize missions de tir de Soyouz avec Astronautes depuis Baïkonour ont été lancées dont douze à destination de la station spatiale internationale, toutes en vaisseau Soyouz lancés par la fusée éponyme depuis Baïkonour, l'astroport ou cosmodrome russe loué au Kazakhstan qui restera le seul moyen d'accès à l'ISS tant que la Nasa n'aura pas mis en service son nouveau vaisseau.
L'agence américaine poursuit ses études de la capsule Orion, Programme auquel l'ESA participe aussi.
En attendant, elle paye des centaines de millions de dollars aux Russes pour que ses astronautes montent dans les capsules Soyouz Le ravitaillement de la station en fret et carburant 9 astronautes à bord de l'ISS s'effectue en cargo Progress, mais aussi avec l'ATV européen dont Ariane a lancé l'exemplaire baptisé Albert Einstein en juin 2013, par la capsule Dragon de Space-X qui pourrait par la suite acheminer des astronautes car elle peut revenir sur Terre à la différence des cargos automatiques qui se consument lors de leur rentrée dans l'atmosphère, le HTV japonais, ou le cargo Cygnus, d'Orbital Science Corporation, lancé par la nouvelle fusée Antarès du même industriel
En novembre, une situation inédite, pas moins de 9 astronautes se retrouvent simultanément dans la station. Parmi les faits marquants de l'année,le risque inédit de "noyade" de l'astronaute italien Lucas Parmitano, en raison d'une fuite d'eau dans son scaphandre, lors d'une sortie dans l'espace.
En 2014, le trafic vers l'ISS devrait être encore plus dense, avec 15 missions (4 Soyouz, 4 Progress, 3 cygnus, 3 Dragon, le dernier cargo de l'ESA (baptisé Georges Lemaître, l'Abbé astrophysicien et l'un des pères de la théorie du Big-Bang) et un HTV japonais).
Lors d'une récente réunion, les Agences spatiales responsables de l'ISS ont décidé de prolonger sa vie au moins jusqu'en 2024. De quoi allonger les contrats de dessertes pour le fret par les cargos Cygnus, et l'acheminement d'équipages par la capsule Dragon.
A partir de 2015, certains astronautes y effectueront des missions d'un an, contre six mois actuellement, afin de tester des conditions plus proches d'un vol aller retour Terre/Mars. La forme que prendrait la participation européenne à la Station après 2020 reste à négocier. Il pourrait s'agir de la mise au point d'un remorqueur, développé sur la base des technologies du cargo ATV, destiné à la désorbitation de la station en fin de vie.
Le spatial, c'est aussi l'astrophysique et l'exploration du système solaire. Pas moins de six lancements au delà de l'orbite terrestre ont été effectués vers la Lune, Mars ou le Point de Lagrange n°2 du système Soleil / Terre. Cette année, le robot Curiosity, qui a déjà réalisé 100 000 tirs de lasers sur la planète rouge, a permis à la Nasa de parler un peu vite de "traces de milieux propices à la vie"... Disons tout de même que Curiosity a confirmé l'existence de sédiments argileux, contenant des phosphates et de carbonates, formés il y a très longtemps dans un milieu où l'eau a circulé.
C'est bien sûr très encourageant pour la recherche la plus excitante à propos de Mars: cette planète a t-elle connu de phase, durant la période la plus ancienne de son histoire géologique, il y a 3,5 à un peu plus de 4 milliards d'années, des conditions favorable à l'émergence d'une vie de type terrestre ? Mais la roche analysée par Curiosity n'est pas vraiment une découverte d'un phénomène nouveau.
Quant à un vol d'astronautes vers Mars, l'horizon en est toujours aussi lointain, et le prix à payer en termes de risque radioactif en est mieux connu Mars, c'est aussi le premier tir d'une sonde de l'Inde vers la planète rouge Très très loin, c'est la sonde Voyager-1 qui a quitté l'héliosphère, à 18 milliards de kilomètres de la Terre, soit 125 fois la distance entre le Soleil et notre planète. Moins loin, c'est la mort en direct de la comète Ison lors de son passage près du Soleil Et encore moins loin, c'est le tir du télescope spatial européen Gaia, par une fusée Soyouz depuis Kourou, qui va cartographier en 3D la Voie Lactée et un milliard d'étoiles. 2013, c'est aussi la fin de la mission du télescope européen Herschel, celle du télescope franco- européen Corot qui a découvert des planètes extrasolaires, celle de Jason-1, le guetteur des océans Sandra Bullock et Georges Clooney dans Gravity.
L'année spatiale, c'est aussi le film Gravity l'un des plus réaliste jamais tourné, fondé sur un scénario catastrophe de la destruction des satellites et de la station spatiale internationale par le déclenchement du "Syndrome de Kessler", une réaction en chaîne explosive en raison de la densité des débris spatiaux
En ce qui concerne les vols habités sur la planète Mars, la Fondation néerlandaise Mars One a décidé de monter un Projet de colonisation de la planète mars Il s'agira d'un voyage sans retour, prévu pour 2025...
Ils étaient plus de 200.000, ils ne sont plus que 1.058. La première phase de sélection des candidats volontaires au voyage vers Mars prévu en 2025 a été effectuée à la fin du mois de décembre, a annoncé la fondation Mars One. Pour rappel, Mars One est une société néerlandaise à but non-lucratif ayant pour objectif d’organiser le premier vol spatial habité vers la planète rouge, à l’horizon 2025.
Il s’agirait d’un aller simple, les candidats au vol ayant pour vocation de rester vivre sur le sol martien sans possibilité de revenir sur Terre. Candidatures fantaisistes et télé-réalité Sur les plus de 200.000 candidatures reçues en septembre par Mars One, un peu plus de 1.000 ont donc été retenues, indique la fondation sur son site. Le cofondateur de l’organisation Bas Lansdorp y explique qu’il a été nécessaire de trier le bon grain de l’ivraie, de distinguer les candidatures sérieuses des fantaisistes. Ainsi, il confie que quelques personnes ont envoyé leur vidéo de Candidature dans le plus simple appareil...Toute une série de tests physiques et mentaux vont être menés sur les 1.058 candidats restants. Les prochaines phases de sélection n’ont pas encore été détaillées, Mars One ayant l’intention de se rapprocher de différentes chaînes de télévision pour faire de cette sélection un événement médiatique. Une vraie télé-réalité de l'ère pré-martienne. «Nous pensons que nos candidats deviendront des célébrités dans leur ville et même dans leur pays», confie Bas Lansdorp. Mais les candidats devront garder la tête sur les épaules: il faudra avoir un mental d’acier pour supporter l’idée d’un voyage sans retour vers une planète hostile située à des dizaines de millions de kilomètres de la Terre. Comme le soulignait Bas Lansdorp dans un reportage de Time en juin dernier, une fois sur Mars «vous ne sentirez plus jamais le vent dans vos cheveux, vous n’entendrez plus le son de vos pas dans la neige ou du chant des oiseaux.» Poétique, mais un peu effrayant.
La Chine a posé le "lapin de jade" sur la Lune
La Chine rivalise fabuleusement avec les russes, américains et européens dans les conquêtes Spatiales, a réussi sa cinquième mission de taïkonautes, avec le tir de Shenzhou-10 avec trois Astronautes dont Wang Yaping, la seconde astronaute chinoise à être envoyée dans l'espace après Liu Yang lors de la mission Shenzhou-9 en juin 2012. Le pouvoir politique chinois a décidé de donner le maximum de publicité à ce tir. Le Président Xi Jinping est venu sur le cosmodrome de Jiuquan pour assister au lancement. Une marque de confiance envers la technologie utilisée, mais aussi la volonté d'utiliser le programme spatial habité chinois pour ce qu'il est: un programme politique dont l'objectif majeur est de renforcer la légitimité du pouvoir en place comme facteur de modernisation et de développement économique, d'indépendance et de la transformation de la Chine en grande puissance mondiale. Sur ce point, la Chine suit les traces des Etats-Unis et de l'URSS, puis de la Russie.
Cela s'est abondamment vérifié lors de l'arrivée de la sonde Chang'e sur la Lune, avec une retransmission télévisée en direct et la diffusion des images du rover Yutu, "lapin de jad"" décoré du drapeau chinois.
La Russie a effectué 32 tirs, dont un seul échec, celui de l'explosion au décollage d'une fusée Proton (lire cette note) en juillet. La plus puissante de la panoplie russe, devait mettre en orbite trois satellites de la constellation Glonass, le GPS russe. Elle a explosé peu après le décollage Il faut espérer que les deux Protons qui doivent lancer les missions européennes vers Mars en 2016 et 2018 (accord signé entre l'ESA et Roscomos en mars 2013) n'auront pas de pépins.
Les Etats-Unis ont réalisé 19 tirs réussis - on ne sait à quel pays attribué l'échec du seul vol de la compagnie Sea Launch dont le staff opérationnel est californien, le capital russe et le siège social en Suisse). La Chine n'a effectué que 14 tirs, contre 10 en 2012. Pour 24 de ces tirs, il s'agissait de déposer des satellites en orbite géostationnaire.
En raison des lancements doubles d'Ariane-5, pas moins de 26 satellites ont rejoint cette orbite qui leur permet de rester fixe face à un point de l'équateur terrestre. Ils se répartissent entre 17 satcoms civils, 6 satcoms militaires, un d'alerte anti-missiles, un destiné à des liaisons entre satellites et une météo. Autre secteur très actif : l'observation de la Terre avec des satellites américain (Landsat-8), chinois, européen, russes, émiratis ou sud-coréen
Boualem Sahraoui, astronome et climatologue
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