La dernière leçon de Mandela
Avec la mort de Nelson Mandela, se révèle, simple, éclatante et dénudée, cette chose pourtant si étrange qu’on appelle la postérité.
De son vivant, Nelson Mandela n'a jamais rien édifié à sa gloire, ni Grande cathédrale dont on aurait pu s’extasier sur la verroterie ni quelque monument colossal qui imposerait à jamais l'évocation de sa personne. Dans un monde où les gouvernants sont obsédés par l'immortalité, torturés par le terrible passage de l'adulation à l'indifférence, Mandela a préféré s’en remettre au seul jugement de l’histoire. A-t-on idée de s’en aller avec tant d’insouciance envers son propre souvenir, sans rien redouter de la piètre mémoire des hommes ? Mais c’est que cet homme n’a jamais rien voulu imposer à personne, surtout pas le souvenir de lui-même. Ce n’est pas seulement de la modestie, encore qu'avec ce singulier personnage la modestie est le seul éclat qu'il soit permis d'ajouter à la gloire, non, ce n'est pas de la simple modestie ni encore moins de cette modestie affectée et étudiée dont on dit qu'elle masque un orgueil secret. Chez Mandela, cette impassibilité devant l'obsession de l'immortalité, c'est le substrat d'une existence dédiée à la liberté : on ne s'impose pas à un peuple, et surtout pas à sa mémoire. Et il le pense, lui qui a écrit "Etre libre, ce n'est pas seulement se débarrasser de ses chaînes ; c'est vivre d'une façon qui respecte et renforce la liberté des autres."
L'homme est parti en laissant à chacun de ceux qui lui ont survécu, la liberté de l'évoquer ou de ne pas l'évoquer, peu ou prou, avec passion ou avec détachement, selon l’idée qu’il se fait de l’œuvre de Mandela. Qui sait, peut-être voulait-il signifier que le vrai secret de la gloire authentique est de n'être réductible à aucun monument aussi pharaonique soit-il, car aucun édifice ne peut restituer la majesté d'une vie admirable. L'ennui, c'est que toutes les vies ne l'étant pas, il a bien fallu se contenter d'une multitude de stèles, de statues, voire de minarets appelés à symboliser une œuvre messianique et qui, plus souvent, ne survivront dans les mémoires que le temps, dérisoire, que met une supercherie à s’effondrer. Que de bustes massifs se sont écroulés, avec fracas, par la volonté de ceux-là même qui étaient censés les vénérer de père en fils.
Avec la mort de Mandela, se rétablit cette vérité perdue de vue et qui voudrait que le privilège de consacrer dans l'éternité n'appartient qu'aux gens sans voix et que, comme le dit Benjamin Constant, les peuples qui ont plus de voix n'en ont pas moins de la mémoire. C'est pourquoi autour de la seule ville de Paris, on ne compte pas moins de 15 stades baptisés Nelson Mandela. Si vous êtes de passage à Champigny, Saint-Denis, la Courneuve, Colombes ou Sarcelles, entrez donc au stade Nelson Mandela, vous y trouverez des bandes de jeunes gens jouant au foot sous une ombre furtive et majestueuse qui s’appelle la postérité, la vraie, celle qui se souvient des hommes qui ont changé les empires, pas de ceux qui les ont pervertis.
Mohamed Benchicou
Commentaires (13) | Réagir ?
J’userai d’oxymore, ce jour jeudi du 05 décembre 2013 où le noir illumine l’humanité toute entière. Les écrans et les journaux placardent la sympathique bouille d’un vieillard, le nègre Mandela. Le monde découvre ou redécouvre un homme noir aux idéaux merveilleux et pétri d’humanisme. Un monde découvre un autre visage du continent africain. Une Afrique intelligente qui fait la nique à tous les despotes qu’elle a enfantés et eut à subir. Les africains réapprennent la fierté d’être africain.
Le prophète est mort !
Le nouveau prophète est mort comme tous les nouveaux prophètes qui ont prôné la non-violence. Gandhi. Gandhi a eu sa révélation en Afrique du Sud. Contemporain des mêmes douleurs générées par la ségrégation. Mandela et Gandhi s’éveillent au combat sur la même terre souillée par l’apartheid ! Est-ce un signe ? Tous les deux offrent leur vie à la libération de leur peuple. Ils offrent leur martyre à l’humanité pour qu’elle puisse s’assagir.
Et les prophètes meurent-ils ?
Mandela est-il un prophète ou un ange ? Prophète dans le martyre comme Jésus Christ mais se refuse la paternité avec Dieu. Prophète trop humain, il aime les femmes comme Mohammed mais ne fait jurer personne qu’il est le messager de Dieu et rejette la posture belliqueuse des faibles en enjoignant « …Prenez vos couteaux, vos lances…», vos armes, vos haines, vos racismes et « jeter les à la mer ».
Est-il -ou sera-t-il- un prophète ?
Ce jour lundi 10 11 2013 est aussi beaucoup plus noir de lumières. Le lion est enterré ce soir.
Les célébrités du monde politique et artistes se bousculent et se fraient un petit chemin parmi les petites gens- ses premiers amoureux, ses premiers disciples- pour la pose historique et surtout plastronner à côté de lui. Et se demander pourquoi tous ces bigorneaux n’auraient-ils pas fait le geste de leur puissance qui aurait évité ces années de haine où pourrissaient les hauts idéaux de l’homme! Vingt-sept longues années de privation de liberté ne sont pas une minute de conscience qu’on oublie aussitôt. Parmi eux il y a un grand nombre qui se voudraient prophètes mais qui ne sont en réalité que ce qu’ils sont vraiment : Des Petits-pères du peuple avec les pratiques des Petits-pères du peuple. Leurs mérites sont dans les actes répréhensibles qui sont à l’opposé de ceux prônés par Mandela ou Gandhi. Ils ont tous traficoté leurs lois fondamentales pour durer au pouvoir.
Ange ou prophète?
Dieu n'a pas de noirs dans ses livres. Mandela est-il le premier ange noir ou le prophète noir? Gandhi, aussi, n'était pas un arien. Martin Luther King avait un rêve. Avait-il rêvé d'anges et de prophètes noirs? Mandela a rêvé de société Arc-en-ciel où chacun aura sa chance.
Mandela est un ange même quand il est en colère. Il fait la pige à l'impossible et le transcende en réconciliant des êtres que la bêtise de l'homme a voulu différents. Il fait asseoir face à face la victime et le bourreau pour la confrontation, la reconnaissance de leurs actes et les pardons dans les repentirs. Bourreau et victime pleureront ensemble de leurs douleurs et de leurs bêtises et se promettrons le respect mutuel. C'est la réconciliation, Pardon et Vérité pour un destin commun sur une terre commune.
Pour les femmes et les hommes de bonne volonté apôtres d'un monde "Arc-en-ciel", le pardon est générateur de synergie: « Chez les gens qui se sont retrouvés en prison, alors qu’ils essayaient de transformer la société, le pardon est naturel. Ils n’ont pas de temps à perdre à se venger. ».
Icône de la liberté mais homme dans ses moindres défauts il a su s'élever et dépasser les travers du faible homme et réussir son impossible rêve à réconcilier le bourreau et sa victime. « On me considérait comme un saint. Je ne l’ai jamais été, même si l’on se réfère à la définition terre à terre selon laquelle un saint est un pécheur qui essaie de s’améliorer ».
Dans l’Algérie, dont les pieds sont en Afrique et l’esprit ailleurs dans un autre continent bien loin de Senghor, de Fanon son enfant naturel ou encore de Césaire plus africain que martiniquais, notre Petit-père à nous, algériens, qui n’est ni prophète, ni ange, ni saint, même pas nobélisé, nous susurre des yeux qu’il faut continuer l’œuvre de Madiba, Nelson Rolihlahla Mandela. Nous sommes sommés de construire une société « Arc-en-ciel » dans un pays où ses textes fondamentaux et ses missions régaliennes limitent même le choix libre du prénom. Une société « Arc-en-ciel » mais où seront bannis les noms de Madiba, Roilhlahla ou Nelson !
4 Presidents Americains et tout Hollywood et la creme de New Yorkest en route pour l'Afrique du sud. Personne n'a meme pas envoye' une carte postale a el mouradia.