Boualem Sansal et le malentendu !
Il y a la critique, il y a le malentendu et entre les deux, il pourrait y avoir le déni ! Le dernier ouvrage de Boualam Sansal, Gouverner au nom d’Allah, a suscité des débats controversés par le contenu de l’ouvrage et des réactions virulentes à propos de sa médiatisation, plus exactement dans les médias francophones, en particulier les propos de l’auteur sur le sujet de l’islamisme.
J’ai lu l’article de Yassin Temlali (El Watan du 09/11/2013) avec intérêt, car la question ne réside pas en la personne de Boualem Sansal, mais dans les idées exposées par ce dernier. Yassin Temlali aborde deux idées majeures dans son texte, d’une part, les déclarations de Boualem Sansal et, d’autre part, la place de l’intellectuel dans la société, même si cette question est associée aux entretiens que B. Sansal a accordés aux médias, y compris El Watan dans la même édition.
Y. Temlali a écrit : "Si Boualem Sansal s’est mué, comme par enchantement, en politologue, historien et islamologue, c’est principalement grâce à la complaisance de certains médias français de grande diffusion. Sans leur étonnante indulgence, il ne se serait pas bombardé spécialiste d’une région aussi vaste que ce brumeux "monde arabo-musulman", dont il ne parle probablement aucune des langues (à part l’arabe algérien) et qu’il n’a jamais (ou presque) visité sinon pour prêcher la "paix israélo-palestinienne" depuis une ville occupée, Jérusalem". Il semble que Monsieur Temlali n’a pas encore lu l’ouvrage, car à la page 11, l’auteur écrit que son texte n’est pas un traité académique et qu’il n’est ni historien, ni philosophe, et son livre n’est ni une investigation journalistique et n’est pas du tout un essai d’islamologie. Il s’agit bel et bien d’une opinion et d’un témoignage d’un écrivain sur les mutations de sa société et celles qu’il côtoie. De plus, il témoigne de l’incursion de l’islamisme dans la vie sociale au quotidien. Certes, le discours de B. Sansal est areligieux, lui-même se déclare athée [1]. Cependant, nous savons que les médias, d’ici ou d’ailleurs, cherchent souvent les opinions plus réactionnaires et parfois radicales, pour augmenter leur audience et leur tirage ! De plus, cette liberté de critiquer les religions n’est pas encore acquise dans notre société, pour plusieurs facteurs, que tout lecteur peut deviner, et empêche d’y aller sur ce terrain, comme l’ont écrit Y. Temlali et B. Sansal, des intellectuels ont été assassinés lâchement pour leur idée et leur engagement : Tahar Djaout, Boucebci et d’autres personnalités brillantes.
B. Sansal épuise son imaginaire dans les deux sujets majeurs : l’histoire contemporaine de l’Algérie et le phénomène de la religiosité et ceci depuis son premier roman. Son premier essai interrogeait ses compatriotes algériens sur leur histoire, leur identité et leur idéal, son deuxième essai aborde la question du phénomène de religiosité et ses effets dévastateurs. Ceci dit, quand Y. Temlali doute de la capacité de B. Sansal de parler la langue arabe et son droit de traiter sur le sujet concernant le Monde arabe m’intrigue ! Doit-on maîtriser la langue arabe pour parler de l’Islam ou des évènements qui secouent cette région du monde ? En ce cas, les philosophies, les chercheurs européens ou américains ne peuvent-ils pas écrire, réfléchir sur l’Islam, l’islamisme, l’histoire arabe, etc., car ils ne parlent pas, ne lisent pas, n’écrivent pas en arabe ! Cependant, le nombre d’ouvrages et d’études sur le sujet dans les universités dites occidentales sont à foison !
Souvent la question de la visite de Sansal en Israël est mise en avant par certains auteurs et intellectuels algériens, mais aussi arabes, comme une trahison à l’idéal commun sacralisé, en l’occurrence la cause palestinienne. L’auteur est toujours libre de jouir de sa liberté, mais aussi de l’assumer. La politique de boycott a-t-elle porté ses fruits ? A-t-elle fait avancer la cause ? J’ai en tête une histoire d’un jeune garçon qui ne cessait d’envoyer des lettres à sa bien-aimée, à force, sa promise s’est mariée avec le facteur ! Je veux dire par là à force de défendre "la cause palestinienne", on l’épouse en oubliant le peuple palestinien ! A force de boycotter, ce sont les pays arabes qui s’isolent !
Quant à la question de l’islamisation, les faits sont là, les nier est un déni, car l’islamisation de la société est acquise. Plusieurs chercheurs en sociologie, en psychologie, en anthropologie, le disent. Des gestes du quotidien se sont islamisés, le bonjour s’est muté en Salam Alikoum, etc. Prenons l’exemple du rituel de l’enterrement et du deuil qui est désormais célébré dans la tradition canonique islamisé, sans prendre l’aspect culturel en compte (Cf. A. Moussaoui, de la Violence en Algérie, Ed. Acte Sud, 2006). Il y a vingt ans on pouvait aborder la question de la laïcité, débattre sur les sujets comme la place du hidjab dans l’espace public par exemple, cependant, peut-on en parler aujourd’hui dans les rassemblements publics ?
Le cas de Kateb Yassine est une autre leçon à retenir, un auteur de cette envergure et avec l’amour démesuré pour son pays, à sa mort des voix islamistes réclamaient qu’il ne soit pas enterré dans son pays, tout simplement à cause de son athéisme ! Les exemples ne manquent pas, car des élites qui se permettent de critiquer ou de dire à contrevérité de la pensée dominante se sont généralement isolées, et ce phénomène n’est pas spécifique à l’Algérie, il est de plus en plus envahissant, y compris dans les pays européens ! Il était plus facile d’afficher ses critiques à la religion dans les années quatre-vingts qu’aujourd’hui. Un ami médecin m’a confié qu’il n’avait jamais imaginé que la question des libertés régressera à tel point depuis l’indépendance à nos jours ! Certes il y a eu des résistances de la part de quelques mouvements, cependant leur effet s’éteigne, à fur à mesure ces mouvements perdent le terrain, car souvent sont affrontés à deux pôles de contestation : la religiosité et le nationalisme ! Le discours du mouvement démocratique algérien est un exemple vivant de cette mutation !
Cependant, certains intellectuels qui restent enfermés dans leur bulle idéaliste ou conceptuelle ne sont pas écoutés, car leurs idées s’expriment dans des espaces élitistes, de plus leur débat reste au stade de la défensive et pas dans la réflexion critique constructive, comme l’a écrit Rédha Malek : "La récurrence des mêmes thèmes chez ces "penseurs", qui ne sont en fait que des commentateurs du Coran, pratiquant une herméneutique matinée de moralisme, d’apologétique, de pieux conseil. Le problème aujourd’hui n’est pas de produire des penseurs pieux, avides de défendre l’islam en mettant en relief ses valeurs humanistes, civilisationnelles, universalistes, etc., mais d’accéder à une pensée qui se pense elle-même, une pensée qui évolue dans sa sphère propre, une pensée autonome qui pense dans le radical et qui travaille dans le fondamental. Il n’est pas question de substituer une doctrine complète au Coran, mais de laisser à l’esprit humain la latitude d’interpréter le monde et de proposer des solutions de fond aux problèmes de l’existence et de la vie sociale…"
Yazid Haddar
Auteur
[1] Entretien à radio France-Culture, du 15/11/2013.
Commentaires (3) | Réagir ?
Il faut attaquer le problème à la racine, pour mettre l'Algérie sur la voie du progrés il faut :
1 - Séparer le religieux du politique pour éviter les collisions.
2 - Séparer l'Amazigho de l'arabo OU bien les assembler pour former un Amazighoarabo (race
hybride comme les gitans) qui sera la nouvelle identité des algériens...... Khalatha tassfa !
3 - Opter pour une langue vivante dans l'école (Francais + anglais) à partir du primaire et laisser la
la langue arabe comme langue de culture seulement afin de lire quelques sourates ou tous le
coran avant de mourir.
4 - Supprimer le ministre des moudjahidine et celui de la religion du gouvernement car ils ne servent à
rien et ils ne portent que préjudice à l'image du pays.
5 - Il fauf mettre SANSAL minitre de la culture pour remettre l'Algérie sur les rails du savoir, de la
modernité, des libertés et de la démocratie.
6 - Il faut mettre FERHAT MHENNI ministre de l'éducation nationale pour mettre de l'ordre dans nos
écoles sinistrées.
7 - IL faut arrêter de donner des crédits ANSEJ ou à des fainéants ou de gros crédit à la MAFIA
du pouvoir. L'argent du pétrole appartient au peuple algérien et doit servir au dévellopement du
pays. Celui qui veut importer de la banane ou autre camelote de la chine il n'a qu'a le faire avec
sa propre devise et non avec la devise de la nation.
8 - Arrêter de faire la démagogie et le social, seule la competence doit faire valoir entre les citoyens
comme echelle de valeurs.
9 - Supprimer la deuxième chambre du sénat, déja la premiére ne fait rien à part lever la main. Donc
à quoi sert la deuxiéme ? Et toutes les deux sont illégitimes, le peuple ne les reconnait pas.
10 - Donner une prime aux chercheurs scientifiques universitaires ou autres centres de recherches de
50 000 DA par mois, mais ils ne la percevrons avec effet rétro-actif seulement quand ils feront
une découverte qui est utile pour le pays (Nouveau vaccin - nouvelle machine - nouveau moteurs -
nouveau produit pour améliorer le rendement agricole.... etc...). Aujourdh'ui nos universitaire
touchent des primes de recherches injustifiées car ils n'ont jamais trouvé quelque chose à ce jour.
C'est un vol déguisé car la prime est une variable du mois et non fixe.
11 - Pour former une èquipe de football il faut onze joueurs.
Il faut arrêter de brader l'argent du contribuable aux entraineurs étrangers et meme aux joueurs.
L'argent que l'état a gaspillé pour la préparation de la CAN et la coupe du monde 2014 aurait
pu etre utilisé pour construire des centaines de stades et des écoles de sport à travers nos
communes qui pataugent encore dans la misére et la pauvreté.
Mieux vaut construire une maison dans sa vie et la laisser pour ses enfants que de participer
à des compétitions comme figurant ou bouche trou.
Thanmith
Vous avez malgré tout un point commun avec Y. Temlali, vous parlez de monde arabo-machin dans un pays bérbère. C'est une imposture historique et idéologique.