La renaissance du Jardin d'essai d'Alger
Joyau méconnu des étrangers, le Jardin d'Essai d'Alger qui a fait peau neuve après avoir subi les aléas de l'histoire, fait le bonheur d'un million de visiteurs chaque année.
Avec ses 34 hectares réunissant plus de 1.200 espèces de plantes, il retrouve l'engouement qu'il avait suscité dès sa création il y a près de deux siècles. C'est un "magnifique trésor du patrimoine algérien", soulignait le maire de Paris Bertrand Delanoë qui, en visite à Alger lundi, est venu se rendre compte des résultats de la collaboration des deux capitales pour le faire revivre.
Paris a prêté main forte à l'Algérie pour rénover ce jardin construit en 1832 quand l'Algérie était une colonie française.
Son architecture soignée avec ses perspectives ouvertes débouchant sur la Méditerranée, font de cet espace le bonheur des promeneurs depuis 180 ans, et pas des moindres.
Karl Marx s'y promenait "volontiers lorsqu'il était venu soigner ses problèmes respiratoires à Alger" en 1882, tout comme le peintre Auguste Renoir qui lui a consacré à la même période "au moins deux toiles", selon le directeur du lieu, Abdelrazzak Ziriat.
Sans oublier des décennies plus tard le petit Albert Camus qui venait, les poches remplies de cailloux, attendre que le garde s'éloigne pour tirer sur les cocotiers et en récupérer le fruit, raconte l'écrivain Fernand Destaing.
Sans le savoir, ces lieux ont fait rêver plus d'un spectateur dans le monde: c'est dans l'un de ses plus beaux ficus aux lianes tentaculaires qu'avait élu domicile "Tarzan, l'homme singe", réalisé en 1932 par W.S. Van Dyke, premier d'une série de films américains sur Tarzan.
Dans les années 42, les alliés s'y étaient installés, mais il avait été très endommagé par les bombardements un an plus tard. Puis ce fut la décennie noire de la guerre civile des années 90 en Algérie qui a mené à sa fermeture durant plus de dix ans, pour éviter qu'il ne devienne un champ de bataille.
En 2003, un accord de coopération est passé avec la ville de Paris, qui envoie onze experts pour aider à sa renaissance. "Le projet de réhabilitation, commencé en 2006, a duré trois ans" et les travaux ont coûté de "très grosses sommes" à l'Etat algérien et à la wilaya (préfecture), explique M. Ziriat, sans pouvoir fournir de chiffres.
Maintenant le jardin "a ouvert une nouvelle page de son histoire". Le "jardin exotique qui accueillait toutes les plantes du monde" a dorénavant une "mission scientifique essentielle: la connaissance et la conservation de la flore algérienne", indique ce responsable.
Le Jardin d'Essai avait été doté dès 1863 d'allées de palmiers, de bambous géants ou de platanes. Ses activités dans l'agriculture et l'horticulture lui avaient assuré une renommée mondiale.
Du coup, l'Algérie a un peu oublié ses propres plantes. "Vous ne trouverez jamais un arganier ou un caroubier chez les pépiniéristes ou dans les jardins des particuliers", regrette M. Ziriat.
"Donc le rôle du Jardin d'essai, c'est un peu de vulgariser ces plantes locales en expliquant quel intérêt, paysager, médicinal ou économique elles peuvent avoir". La seconde activité du jardin, c'est l'éducation: son école de l'environnement pilote reçoit 20.000 enfants par an qui sont initiés à la flore mais aussi à la faune "mal connue et en danger".
Parmi les animaux menacés en Algérie figurent l'hyène rayée, le fennec ou le mouflon à manchettes, caprin à cornes recourbées vers le haut dont le mini zoo du jardin abrite trois générations. "Cet espace joue un rôle social extrêmement important", explique le responsable de cette structure unique en Algérie. "On a plus de 800.000 visiteurs par an, presque un million, et c'est énorme, avec des journées à 12-15.000 personnes en été", selon M. Ziriat.
Pour Amina, 17 ans, qui y vient environ une fois par semaine avec son ami Charef, 25 ans, "il faut conserver, embellir encore ce jardin", qui englobe le Musée des Beaux-arts, le plus grand musée d'art d'Afrique. Chaque fois, on y découvre de nouvelles plantes. On y voyage, mieux qu'en allant à Paris".
AFP
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