33 ans après le séisme de Chlef, les victimes vivotent dans des chalets
La Laddh Chlef alerte sur la situation des sinistrés du séisme du 10 octobre 1980. Ceux-ci continuent, malgré les promesses des autorités, de vivre dans des chalets.
La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (Laddh) tire à nouveau la sonnette d’alarme sur la situation des sinistrés du séisme ayant frappé la wilaya de Chlef (ex-El-Asnam) en octobre 1980. Cette fois, elle demande “une intervention directe du président de la République” dans l’affaire des logements en préfabriqué, pour mettre fin au long calvaire des sinistrés. Dans un rapport d’une trentaine de pages, transmis au premier magistrat du pays, le bureau local de la Laddh de la wilaya de Chlef revient sur “les graves dangers” des logements préfabriqués, “construits avec des matériaux toxiques et cancérigènes”, en s’appuyant sur une enquête qu’il a lui-même menée. Au passage, il dénonce “le traitement aussi injuste d’une marginalisation économique, sociale et politique de notre wilaya Chlef ”.
19 000 familles sous des baraques
Se basant sur les textes et traités internationaux, dont la Déclaration universelle des droits de l’Homme et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la Ligue relève, dans son document, que le droit au logement et le droit à la santé des occupants des 18 316 habitations préfabriquées ne sont pas respectés. Et ce, en insistant sur le caractère “inadéquat” de ces logements vieux de près de 33 ans et en rappelant que ces derniers, “proposés en premier comme une mesure transitoire (se sont transformés) en solution unique et permanente”.
Il est à signaler que le rapport de la Laddh comporte un état descriptif de la ville de Chlef, de l’époque romaine à ce jour, et revient sur les différents tremblements de terre qui l’ont affectée (1922, 1934, 1954 et 1980), notamment le séisme de 1954, qui a causé la mort de 1 340 personnes et celui du 10 octobre 1980, qui a provoqué la mort de 2 700 personnes et “détruit la ville à 80%”. Il est fait état des 3 phases du plan d'urgence, mis en place à la suite de la catastrophe, à savoir le recasement des familles sinistrées sous des tentes, leur relogement dans des habitations en préfabriqué (la durée de validité des chalets devait expirer en 1995), et la reconstruction définitive de la région sinistrée. Or, la Laddh constate que la situation des sinistrés, ces “éternels laissés-pour-compte”, ne s’est pas améliorée. Aussi dénonce-t-elle dans ce cadre le report de l'éradication des 18 163 chalets, ainsi que “la situation de dégradation progressive du cadre de vie” et la “situation sanitaire alarmante” résultant de la présence de l’amiante, y compris au niveau des infrastructures sanitaires en préfabriqué (4 hôpitaux, polycliniques et centres de santé de la wilaya).
Il était dit que le logement préfabriqué ne sera jamais éliminé à travers le territoire de Chlef. Chose qui apparaît au fil des années au vu et au su des responsables qui n’arrivent plus à maîtriser le sujet. Pour plusieurs raisons, les propriétaires de chalets ne veulent en aucun cas quitter leurs taudis à cause de la faiblesse de l’aide financière allouée par l’Etat pour réaliser un logement adéquat et répondant aux exigences actuelles. L’autre cause du refus des sinistrés trouve son origine dans la procédure utilisée par les responsables concernant le versement partiel de l’aide suivi d’une bureaucratie caractérisée dans l’étude du volumineux dossier. Toute cette démarche est rejetée et surtout décriée par les occupants, alors qu’aucune amélioration n’a été décidée jusqu’à ce jour.
Après 33 années, plus de 19 000 familles continuent de vivre toujours dans des baraques supportant la chaleur de l’été et le froid de l’hiver. Des logements qui ont une vie maximum de dix années continuent toujours d’abriter cette classe des laissés-pour-compte. Une préoccupation qui a été de tout temps décriée par les occupants des habitations qui menacent à chaque instant d’être anéanties à cause d’une dégradation continue. Les familles sont menacées à longueur d’année par les multiples insectes, les détritus et les rongeurs. Les mesures prises par les responsables n’ont jamais résolu le problème, à tel point qu’un nombre de personnes ne dépassant guère les 2% a opté de réaliser un logement en dur. L’apport financier attribué au chef de famille, qui ne sera versé au propriétaire qu’après avoir dépensé plusieurs millions relatifs aux frais des fouilles et de la plateforme, n’a jamais été approuvé par le postulant.
Cependant, pour bénéficier d’un tel avantage, la bureaucratie fait rage au niveau des services techniques des APC et l’approbation du dossier dépasse plus d’une année dans plusieurs cas. La maîtrise du dossier n’est guère prise au sérieux, dans la mesure où plusieurs pièces se volatilisent en cours d’étude. C’est pour toutes ces raisons que les propriétaires du préfabriqué désirent toujours rester dans leurs logements et éviter les nombreuses tracasseries d’ordre bureaucratique.
Dans ses recommandations, la Ligue des droits de l’Homme plaide pour “l’ouverture d’un dialogue pacifiste et constructif” avec la société civile. Elle appelle à la démolition "en urgence" des habitations et infrastructures en préfabriqué. La Laddh demande également la réactivation du compte spécial trésor “Reconstruction de Chlef, 3e phase”, l’accélération en matière de réalisation du centre anticancer dans la wilaya de Chlef et la mise en place d’un “programme de dépistage systématique du cancer et des maladies respiratoires, surtout dans les établissements scolaires”. Enfin, la Ligue interpelle les autorités du pays, à leur tête le chef de l’état, sur la question du dédommagement des sinistrés d’octobre 1980 “ayant eu des décès suite au séisme” ou ayant “engagé des fonds pour réparer leur construction et qui n’ont pas bénéficié de logements préfabriqués”, et sur l’indemnisation des victimes de l’amiante.
Kaddour Houari,
Président du Bureau de wilaya de Chlef
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Ou est l'argent du savon maya vendu dans les souk el fellahs?????