En Algérie, du jaune d’œufs pourris lancés par un groupe de jeunes sur la façade du siège du FLN à Hydra, ces jours-ci, pour protester contre le pouvoir à violer systématiquement les lois de la République, selon ses auteurs, notamment, concernant ce qui venait de se passer autour de la nomination d’Amar Saadani à la tête du FLN, avait déteint sur celle-ci pour lui imprimer une couleur étrange d’œufs pourris, tendant vers une teinte à l’apparence indéfinie, entre le brun et le jaune. 

Cet évènement, marque-t-il l’ouverture des hostilités entre le peuple algérien et ses dictateurs et qu’il sera amené à se reproduire sur d’autres lieux symboliques du pouvoir et se propager à toutes les agglomérations algériennes pour déclencher, sous forme d’un effet boule de neige, un processus révolutionnaire pacifique, pour renverser la dictature et instaurer un régime démocratique, dont la révolution prendra symboliquement la dénomination de la couleur de jaune d’œufs pourris, à l’image des représentants de ce même pouvoir, que cette révolution est censé renverser ? Ou alors ! S’agit-il tout simplement de passage à l’acte de quelques illuminés, sans réelle volonté, que celle inconsciente, populairement partagée par la majorité des Algériens, à vouloir en découdre avec le système de pouvoir et que ni la population n’est prête à prendre son destin en main, ni la presse et les medias généralement ne sont suffisamment libres et autonomes pour insister à forcer le trait et à en faire un facteur déclenchant, pour entamer un processus révolutionnaire pacifique et mettre fin à une crise politique qui paralyse le pays et qui dure depuis cinquante ans.

Cependant, même si un processus révolutionnaire n’est toujours pas à l’ordre du jour dans la conjoncture actuelle, sa couleur a bel et bien fait son intrusion, sous l’apparence hautement symbolique : celle des œufs pourris. Elle a même pu émasculer la façade sacrée de la machine qui sert de levier de légitimation et de domination d’un système de pouvoir qui s’est montré incapable de se recréer, suite à l’innommable désignation de son dernier SG. Pour rappel, en 1988, c’étaient ses symboles qui ont volés en éclat en premier. En face, le pouvoir n’est pas près d’abdiquer. Car, nous ne sommes plus aujourd’hui dans les conditions de 1988. Beaucoup d’intérêts sont en jeu. Beaucoup d’argent a été accumulé par les clans rivaux. Faut-il s’attendre à son implosion cette fois-ci, qui emportera dans son entropie les fondements même de l’État et des institutions, à commencer par celle de l’armée.

C’est pour cela que l’on peut penser qu’il s’agit tout simplement d’un passage à l’acte, illustrant le degré de violence qui règne dans le conflit de sérail entre pro et anti Saadani ? Est-ce là ! un prélude au déclenchement d’un autre type de processus de révolte, caractérisé par la violence cette fois, qui sera amené lui aussi à se généraliser et se propager comme un effet boule de neige à toutes les instances du pouvoir, entre différents clans du sérail, qui pourra se transformer à échéance en guerre civile larvée, avec son lot de morts et de destruction et mettre à sac définitivement la République, hypothéquant son intégrité territoriale et son unité nationale ? 

Dans tous les cas, ce sera l’une ou l’autre issue qui se profile en perspective des présidentielles de 2014, et probablement avant, s’il arrive que la vacance du pouvoir ne devienne effective avant terme. A moins que les démons du statu quo ne redoublent de férocité et mettent tous leurs moyens en œuvre pour étouffer quelques aventures que ce soit, à coups de carottes ou de bâton, ce sera selon. 

Youcef Benzatat