Algérie, une histoire de l’Apocalypse
Une transition révolutionnaire post-indépendance contre le règne du mal demeure la résultante inévitable pour aller vers le progrès. (Brahim Gater)
Cinq juillet 1962, l’Algérie arrache au prix du sacrifice ultime son indépendance. Ma grand-mère, offre ses boucles d’oreilles à son Algérie en réponse à l’appel de Ben Bella pour soutenir l’État parce que les caisses étaient vides, les fonds récoltés étaient destinés pour constituer la dote de notre jeune et belle Algérie, un budget pour un fonctionnement de départ. Au croisement de l’amour avec la patrie, la femme algérienne constitue cette dote à partir de ces bijoux pour donner les moyens de construire une république des devoirs et des droits.
Ces boucles d’oreilles ont une valeur inestimable pour ma grand mère, un héritage de famille qui viennent de son arrière et arrière grand mère, un monument historique du 17e siècle, des pièces qui parlent de notre histoire millénaire et qui se conservent jalousement de mère à fille et de génération en génération. C’était un cadeau de sa mère à l’occasion de son mariage, des boucles qu’elle n’avait jamais porté à l’exception des jours de fête ou de cérémonies religieuses par peur de les abimer ou de les perdre.
Ce fameux Sendouk Tadhamoun a délesté nos mamans de leur bien sacré du mariage, un vol organisé à la dimension d’acte de cambriolage. Avec son discours populiste au ton de zaim, mariné dans le nassérisme et la mouloukhia , Ben Bella récolta des centaines de tonne d’Or et d’argent une partie de ce butin, des sacs de bijoux étaient empilés et cachés à la villa Jolie, le reste étaient déposées au niveau de la caserne Ali Khodja et du trésor public par le suite et qui étaient pris sur des destinations inconnues à ce jour. Une première dans l’histoire de l’humanité, un premier acte de vandalisme d’état avec prise de température pour tester la naïveté du peuple algerien en vue de le soumettre à l’exercice de la soumission.
D’une opération d'escroquerie qui a dépouillé nos grands-mères à la chasse aux hommes sincères, propres et intègres. Ben Bella annonça sans scrupule que : "C’est moi la révolution", "Je vais dégraisser la bourgeoisie", le reste est du vent pour semer une tempête de quinze années de prison ferme. Un acteur qui succomba à une surconsommation d’Earar du pouvoir et qui se voit dans les corps de Nehru, Tito et Fidel Castro, un idéalisme au sommet de l’ignorance.
Secondé par Boumediene qui arriva avec sa caravane de l’Ouest en compagnie de ses acolytes pour libérer notre Algérie de ses nationalistes, entre dans la capitale pour mettre fin à la fête, arrêta la music et poussa chaque citoyen a rejoindre son gourbi dans l’attente de finir avec les révolutionnaires et la révolution. Son nom est étranger à notre peuple et à la patrie, choisit Ben Bella comme une mouche sur l'hameçon pour avoir le gros poisson : le peuple.
Durant une période insignifiante de sa gestion, Ben Bella réouvrit les centres de torture, aiguise les instruments et peuple les prisons en mettant en place sa politique du barbouze en vue de pourchasser les dirigeants de la révolution et les opposants à sa politique de (El djazair tekfina oua takfikoum), l’egyptiannisation de l'Algérie allait commencer. L'épuration par la liquidation physique des enfants de la patrie par une bête féroce au pouvoir a commencé.
- Assassinat de Mohamed Khemisti le 11 avril 1963. Ben Bella déclara par la suite que cet assassinat est un acte isolé.
- Assassinat du colonel Chaabani, jugé par une cour martiale à la joie de Ben chérif et ses camarades de classe le 4 septembre 1964 et l'exécution a eu lieu le même jour.
- Emprisonnement de tous les acteurs de la révolution : Mohamed Boudiaf, Hocine Ait Ahmed, Taleb El-Ibrahimi, Rabah Bitat, etc.
- Organisation des gangs de rue à partir de la casbah pour mater la rébellion et faire peur a ses opposants.
Pour sortir de cette branche sans âme de la révolution de novembre, je lance un trait d’union pour parler du fondateur de l’assassinat politique en Algérie dans la personne d'Abdelhafid Boussouf, un sanguinaire sans foi et sans loi, inaugura son école de tueur à gage dans l’assassinat de Abane Ramdane et impliqué aussi dans la mort du colonnel Amirouche et Si El Houes et finalement dans l’assassinat de Krim Belkacem, de cette école sont promus Houari Boumedienne et Kasdi Merbah.
Pour illustrer l’acte sauvage et anti-révolutionnaire commis par Boussouf dans l’assassinat de Abane Ramdane, permettez-moi de vous présenter ce récit douloureux et très émouvant. Des crimes ont été commis contre de paisibles citoyens et qui restent impunis. Ces criminels ont bénéficié des priorités et des largesses que leur a accorde le pouvoir et ont laissé à leurs ayants droit des richesses inestimables, certains sont en Amérique du Nord et vivent dans des manoirs et d’autres en Europe dans des pays sûrs.
Le récit :
A l’aérodrome, raconte donc Krim, Boussouf nous accueillit avec quelques-uns de ses hommes et tout aussitôt me prit par le bras pour m’entrainer à part un bref instant. A brûle-pourpoint, il me dit : "Il n'y a pas de prison assez sûre pour garder Abane. J’ai décidé sa liquidation physique."
Indigne, je refusai, répliquant que ce serait un crime auquel je ne m’associerai jamais. Puis, sur l’aérodrome même, j’informai Mahmoud Cherif qui, bouleversé, eut la même réaction que moi. Boussouf, selon Krim, était terriblement surexcité. Il avait les yeux hagards et ses mains tremblaient : nous ne pouvons plus parler ici, dit-il, nous reprendrons cette discussion plus tard. Tous s’engouffrèrent dans les voitures qui les attendaient. Celles-ci roulèrent assez longuement, avant de pénétrer dans la cour d’une ferme isolée. Abane, Boussouf, Krim, Mahmoud Cherif et leurs compagnons descendirent, pénétrèrent dans le bâtiment.
Arrivés dans la première pièce, un groupe d’hommes les attendait. Sitôt Abane entré, ils se jettent sur lui à six ou sept et le ceinturent. L’un d’eux lui presse de son poignet la pomme d Adam, dans une prise souvent baptisée "coup dur". Ils l’entrainent dans une seconde pièce dont la porte est aussitôt refermée.
Voyant cela, assure Krim, j’eus un mouvement pour aller au secours d’Abane. Mais Mahmoud Cherif m’arrêta et me prit par le bras en disant à voix basse : "Si tu bouges, nous y passerons tous. "Krim n’avait pas d’arme. Mahmoud Cherif non plus. Mais celui-ci mit la main dans la poche de son veston, pour donner le change aux autres hommes de Boussouf présents dans la pièce. De la pièce voisine montaient les râles d’Abane, qu’on étranglait. Puis le silence se fit. Boussouf revint brusquement et, raconte toujours Krim; il avait à ce moment-la la tête d’un monstre". Il se mit a proférer des injures et des menaces indirectes contre tous ceux qui voudraient agir un jour comme l’avait fait Abane. Il allait et venait d’un pas rapide, saccade, et Krim eut la certitude qu’il se demandait s’il n’allait pas les liquider eux aussi sur-le-champ. Au bout d’un moment, néanmoins, Boussouf se calma un peu et donna l’ordre de repartir. Tous reprirent place dans les voitures, qui partirent en direction de Tetouan. Mais elles ne tardèrent pas à s’arrêter prés d’une autre villa du FLN, déserte, comme si, à la dernière minute, Boussouf hésitait encore sur le sort à réserver à Krim et à Mahmoud Cherif. A l’intérieur, toujours fébrile, il se remit à arpenter la pièce en grognant des menaces. Et chaque fois qu’il arrivait devant Krim, il le regardait longuement avant de reprendre sa marche. Finalement, le cortège des voitures repartit à nouveau pour retourner, cette fois, à l’aérodrome, où l’avion était prêt au décollage. Avant d’embarquer, assure Krim, lui-même et Mahmoud Cherif condamnèrent à nouveau le crime de Boussouf, lui disant qu’il en porterait seul la responsabilité. Des leur arrivée à Tunis, les deux hommes informèrent Ben Tobbal, qui cria, lui aussi, son indignation.
Extrait de Vérités sur la Révolution algérienne, paru en 1986 aux Editions Gallimard
La mort de Abane comme un premier assassinat politique me renvois à la première exécution coloniale du feu Ahmed Zabana. Permettez-moi de vous présenter sa dernière volonté avant son exécution.
Lettre d’Ahmed Zabana à ses parents.
Mes chers parents, ma chère mère,
Je vous écris sans savoir si cette lettre sera la dernière et cela, Dieu seul le sait. Si je subis un malheur quel qu’il soit, ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu car la mort pour la cause de Dieu est une vie qui n’a pas de fin, et la mort pour la patrie n’est qu’un devoir. Vous avez accompli votre devoir puisque vous avez sacrifié l’être le plus cher pour vous. Ne me pleurez pas et soyez fiers de moi. Enfin, recevez les salutations d’un fils et d’un frère qui vous a toujours aimés et que vous avez toujours aimé. Ce sont peut-être là les plus belles salutations que vous recevez de ma part, à toi ma mère et à toi mon père ainsi qu’à Nora, El Houari, Halima, El Habib, Fatma, Kheïra, Salah, Dinya et à toi, mon cher frère Abdelkader ainsi qu’à tous ceux qui partageront votre peine. Allah est Le Plus-Grand et Il est seul à être équitable.
Votre fils et frère qui vous aime de tout son cœur.
Hmida*
Abane Ramdane et Ahmed Zabana, deux martyrs pour un même combat avec un ennemi commun, l’un exécuté par ses siens et par confiance pour raison de prise de pouvoir et l’autre par l’armé francaise pour raison de refus de céder le pouvoir. Feu Abane Ramdane n’avait pas le privilège de laisser une lettre de dernière volonté.
Coup d’Etat du 19 juin 1965, Ben Bella se retrouva dans une retraite méritée à l'intérieure d’une résidence surveillée. Boumediene, l’homme fort de la situation assisté par son maitre Boussouf et Kasdi Merbah mettent en place une stratégie de poursuite et d’assassinats politiques d’envergure internationale. Ils poussèrent les nationalistes à suivre les pas des pieds-noirs. Des dizaines d’assassinats et de disparitions nocturnes, nos mamans continuent a vivre dans la peur et l'incertitude.
La politique de la privation et de la censure est légale, le peuple est soumis à l’autorisation de sortie, privé de ses droits et plonge dans l’assistanat. La peur s’installe dans la ville et le peuple est conditionné dans des crèches à partir de sa naissance à sa retraite.
La révolution agraire tue l’orange et la mandarine de la Metidja, la pomme de terre de Mascara, la deglet Nour de Biskra et de Oum-Tior, les oliviers et les cerisiers de la Kabylie ont été arabisées, la mouskat de Cherchel et de Tipaza volatilisée, le rosier de Blida et le jasmin d’Alger ont été remplacés par des barricades à l’image de la ligne Morice Le grenier de l'Europe se vide et dépose le bilan de la faillite pendant que notre Rabah Driassa chante : "Khoud el meftah ya khouya khoud elmemftah". Le peuple attend avec impatience la visite estivale de nos immigrés pour gouter à la pomme et à la banane.
La révolution industrielle vide le rural pour un salaire insignifiant. Un salaire socialiste avec des primes de rendement individuelle et collective (PRI et PRC) dans un monde improductif. La création de l’emploi et la politique du social avec l’ensemble des structures de gestion, de contrôle et d’observation à la solde du pouvoir central était la raison d’un égocentrisme et de l’ignorance du pouvoir. Une aberration humaine pour justifier la réussite d’un système à l’image de la pénétration du corps de l'éléphant dans celui d’une mouche. Des milliards de dollars ont été investis et une partie importante de cet argent est détournée avec la bénédiction de l’article 120. La culture de la corruption est née, fonctionne avec des lois et des hommes.
L’arabisation, un mécanisme pacifique pour tuer l'intelligence, écarter les cadres francophones et seller définitivement la langue berbère. Le français est un acquis pour évoluer vers les hautes techniques de gestion et la maitrise,l’acquisition des technologies nouvelles. Nous nous pourrions être des super Arabes que les Arabes du Golfe et pourtant ils fonctionnent tous en anglais. Le panarabisme de Ben bella et de Boumediene a fait reculer notre Algérie a la position de l'irréparable. Les langue arabe et berbère demeurent une fierté nationale, le français et l’anglais restent des langues de science et de technologie.
Aujourd’hui, le peuple ne parle aucune langue, est muet à jamais. Ma grande mère a perdue ses boucles d’oreilles et décédée sourde et muette.
L’ensemble des reformes de Boumedienne n’avaient aucun sens et ne peuvent être productif dans un ensemble de rapports sans démocratie. Boumedienne signe sa condamnation à mort avec : "El hisabat fi esbinate", ce dernier discours devant la jeunesse.
Chadli arrive et la fête de règlement de comptes ouvre son bal avec tambour et trempette. Le peuple goute à la liberté de partir ailleurs, au fromage, à la banane et aux pommes roquette rouge. Ouvre le champ politique pour connaitre l’ensemble des partenaires halal et non halal. La situation noire se solde avec des centaines de milliers de morts et une dette de dizaines de milliards de dollars. Le peuple découvre le piège et pleure ses morts, ces meilleurs enfants de notre Algérie.
Je termine mon bref réquisitoire avec la citation du feu Larbi Ben-M’hidi :
"Je voudrais être soumis à ces tortures, pour être sûr que cette chair misérable ne me trahisse pas. J'ai la hantise de voir se réaliser mon plus cher désir, car lorsque nous serons libres, il se passera des choses terribles. On oubliera toutes les souffrances de notre peuple pour se disputer des places ; ce sera la lutte pour le pouvoir. Nous sommes en pleine guerre et certains y pensent déjà, des clans se forment. A Tunis, tout ne va pas pour le mieux ; oui, j'aimerais mourir au combat avant la fin" (fin de citation). Restituez-moi les boucles oreilles de ma grande mère et je vous laisse la Sonatrach.
Démos
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merci
merci