Libye: Benghazi enterre les morts des affrontements sanglants de samedi
La ville libyenne de Benghazi a enterré dimanche les victimes d'affrontements la veille entre des manifestants et des ex-rebelles ayant fait une trentaine de morts, sur fond de craintes de nouvelles violences après les funérailles.
La ville libyenne de Benghazi a enterré dimanche les victimes d'affrontements la veille entre des manifestants et des ex-rebelles ayant fait une trentaine de morts, sur fond de craintes de nouvelles violences après les funérailles. Au moins 31 personnes ont été tuées et plus de 100 autres blessées samedi à Benghazi (est) dans des affrontements entre une brigade d'ex-rebelles et des manifestants, selon un nouveau bilan, a rapporté dimanche l'agence libyenne Lana.
"Trois personnes ont succombé à leurs blessures dimanche matin, portant le bilan des affrontements à 31 morts", a indiqué une source de l'hôpital Al-Jalaa de Benghazi, citée par Lana. Aux cris de "le sang des martyrs n'a pas été versé en vain", plusieurs centaines de personnes ont participé aux funérailles dans le cimetière d'al-Hawari non loin du centre de Benghazi, selon un journaliste de l'AFP sur place. Les funérailles se sont déroulées dans le calme mais plusieurs jeunes se sont donnés rendez-vous en fin d'après-midi dans le centre-ville, pour protester contre "le massacre des civils par les milices".
Dans un communiqué, le Congrès général national (CGN), la plus haute autorité politique du pays, a appelé dimanche "toutes les parties à la retenue et à privilégier l'intérêt national". Il affirme être "en contact avec le gouvernement et les organes de sécurité", en vue de prendre des "mesures décisives".
Des dizaines de manifestants "anti-milices", dont certains armés, ont tenté samedi de déloger une brigade de "Bouclier de Libye" de sa caserne, provoquant un affrontement entre les deux groupes qui ont fait usage d'armes. Les protestataires affirment vouloir déloger les "milices" armées de leur ville, appelant les forces régulières à prendre le relais. Les brigades "Bouclier de Libye", formées d'anciens rebelles ayant combattu le régime de Mouammar Kadhafi en 2011, relèvent formellement du ministère de la Défense.
Les autorités, qui peinent à former une armée et une police professionnelles, ont régulièrement recours à ces ex-rebelles pour sécuriser les frontières ou s'interposer dans des conflits tribaux. "Bouclier de Libye" est la brigade la plus importante en terme d'armement et d'effectif. Elle est commandé par Wissam Ben Hamid, un ex-rebelle d'une quarantaine d'années, connu pour ses liens étroits avec les islamistes.
Dans la nuit de samedi à dimanche, le Premier ministre Ali Zeidan a annoncé que "Bouclier de Libye" avait quitté sa caserne et que l'armée régulière avait pris possession des lieux et des armes lourdes qui s'y trouvaient. Dimanche, le chef d'état-major a annoncé que les forces régulières allaient prendre possession de quatre sites militaires occupés par "Bouclier de Libye" à Benghazi, selon un porte-parole de l'armée.
Cette décision ne devrait pas conduire toutefois à la dissolution de cette brigade. Selon Mohamed al-Maadani, un universitaire de Benghazi, "l'Etat ne peut pas se passer de ces brigades d'ex-rebelles, sauf dans le cadre d'une stratégie de long terme". Selon lui, "les autorités ont chargé les ex-rebelles de missions que l'armée (en cours de formation) est incapable d'effectuer dans l'immédiat, comme la surveillance des frontières". "Mais à chaque fois, c'est l'Etat qui perd sa crédibilité en légitimant ces groupes d'ex-rebelles rejetés par la population", a-t-il estimé.
Ali al-Chikhi, porte-parole du chef d'état-major, a affirmé samedi soir que "Bouclier de Libye" était "une force de réserve de l'armée libyenne" et que l'attaquer serait "une agression contre une force légitime". En octobre, des habitants de Benghazi s'étaient déjà soulevés contre les milices, délogeant certaines d'entre elles de leurs bases.
Le nouveau pouvoir en Libye n'a pas réussi à désarmer et à dissoudre les groupes d'ex-rebelles qui font la loi dans le pays et tente de légitimer certains d'entre eux malgré l'opposition d'une grande partie de la population. Benghazi, la deuxième ville de Libye d'où était partie en 2011 la contestation qui a conduit à la chute du régime de Kadhafi, a été le théâtre ces derniers mois de plusieurs attaques contre des intérêts occidentaux et d'assassinats de responsables de la sécurité
AFP
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