Lettre ouverte à Louisa Hanoune
La scène politique algérienne a subi, depuis quelques mois déjà, cette brusque et heureuse accélération qui a permis l’apparition publique des nouvelles figures de proue, des nouveaux leaders ou tribuns qui manquaient tant depuis la mort de Redouane Osmane en décembre 2007.
Syndicalistes, militants des droits de l’homme, blogueurs ou chômeurs, ces nouveaux visages incarnent les nouvelles formes de l’indignation et de la résistance à un système politique obsolescent et suspicieux dont l’un des bilans est d’avoir étouffé toute possibilité de rénovation endogène tout en tarissant les quelques chances que l’opposition pouvait avoir en termes d’alternative.
Il n’y a rien de plus normal et de plus légitime que ces jeunes algériens soient poussés vers l’arène dans un contexte aussi terrifiant marqué par l’impunité de la corruption au plus haut niveau de l’Etat , l’instrumentalisation politique de la justice et des services de sécurité, la cécité de décideurs silencieux plus préoccupés par la construction de la plus grande mosquée d’Afrique que la mise en œuvre de stratégies économiques audacieuses capables d’offrir les millions d’emplois nécessaires ou de redonner au pays son autosuffisance alimentaire à l’instar de l’Indonésie , pays pétrolier comme l’Algérie.
Il n’y a rien de plus normal que ces jeunes algériens envahissent le champ politique au moment où les partis politiques le désertent, soit parce qu’ils ont perdu leurs divas, soit parce qu’ils se sont inscrits pour longtemps sur les listes des thuriféraires patentés , heureux bénéficiaires des sièges d’un Parlement lourdement hypothéqué par la veulerie et l’indignité de la plupart de ses occupants actuels.
Comment des jeunes algériens menacés par la précarité et la relégation dans leur propre pays devraient se taire et ne pas exprimer leur désenchantement et leur désespoir face à au choc d’une véritable rupture généalogique entre l’Algérie de l’histoire, celle de leurs parents, celle de Zabana ou Didouche et l’Algérie du présent, celle de Mohamed Saïdani, Chakib Khelil et leurs parrains ?
Rien ne les oblige au statu quo et, au contraire, tout les pousse à renverser les tables, à bouger les lignes et brouiller tous les protocoles d’une république de parvenus, de faux notables et de piètres opposants, d’une république de courtiers partiellement dégrossis incapables d’établir ou d’imaginer l’avenir d’un pays miné par le népotisme à un point jamais atteint depuis l’indépendance.
En entonnant l’hymne national au début de leur rassemblement et en renvoyant Ali Belhadj à ses ablutions, ces jeunes ont signifié le degré de maturité qu’ils ont atteint mais également l’autonomie dont ils veulent entourer leur mouvement.
Chère Madame Hanoune, ce sont donc ces jeunes là que vous avez décidé de condamner et que vous avez voulu traîner dans la boue en les accusant de servir de têtes de pont à l’impérialisme international ou d’être manipulés par des forces occultes étrangères. C’est donc vous, leader du Parti des travailleurs, qui diffamez publiquement les victimes directes d’un libéralisme dérégulé, les laissés pour compte d’un capitalisme de flibustiers et de margoulins sans autre idéologie que la prédation systématique sur les marchés publics et sans autre moyen de persuasion que la « chkara »à chaque élection locale.
En toute logique, vous avez certainement applaudi à la décision des autorités policières de leur bloquer le passage aux frontières afin de les empêcher de participer au Forum Social en Tunisie. Sachez désormais Madame Hanoune qu’à chaque fois que l’un de ces jeunes sera interpellé, jugé ou incarcéré, votre responsabilité politique ne sera pas moins lourde que celle des policiers et des juges, à la seule différence que ces derniers exercent leur métier.
En accusant ces jeunes chômeurs de manipulation et de connivence avec des puissances étrangères, vous vous mettez dans la même posture que les islamistes d’Ennahda qui avaient multiplié les appels au crime qui ont fini par emporter Chokri Belaïd à Tunis.
Votre condamnation dans cette posture habituelle de "DJ de l’unité nationale" selon la bonne expression de Chawki Amari, fait peser sur ces jeunes les mêmes menaces que ceux qui les infiltrent dans le but de les discréditer.
Comme disent les pénalistes pour les armes par destination, vous êtes, Madame Hanoune , une "baltaguia" par destination et chacune de vos interventions anti-ouvrières renvoie à cette réplique de Mahfoud dans la Guerre de 2000 ans , la pièce de Kateb Yacine : "Syndicat lahmir houma elli chadinou"
J’aurais souhaité ne jamais avoir à vous adresser cette lettre ouverte mais j’ai finalement jugé utile de rappeler qu’en 1990, vous aviez vous-même subi l’affront de la diffamation et de l’opprobre, celui que vous voulez faire subir aujourd’hui à des jeunes qui sont, que vous le vouliez ou non, le seul espoir de sursaut et de témérité pour un pays ravagé par la rapacité de ses nouveaux parrains.
Auriez-vous oublié qu’un certain Ahmed Merani, membre du Majlis Echoura du FIS puis ministre du gouvernement de Sid Ahmed Ghozali, avait déclaré publiquement que vous apparteniez aux services secrets espagnols au point de semer le trouble auprès de certains de vos militants ?
Auriez-vous oublié que le Parti des travailleurs m’avait alors chargé de déposer plainte auprès du Procureur de la République d’Alger parce que vous aviez ressenti cela comme une grave atteinte à votre honneur et à celui de votre parti ?
Sachez, Madame Hanoune, que ces jeunes doivent ressentir actuellement ce que vous aviez ressenti en 1990 et si la justice de leur pays leur inspirait un peu confiance, ils n’auraient pas hésité à vous poursuivre .
Bachir Dahak, militant Associatif
Avocat (omis) du Barreau d’Alger
Commentaires (17) | Réagir ?
la bimbo du regime, Bouteflika a su s'entourer de bons bouffons comme certains artistes hommes de lettres, partout où il pouvait corrompre il l'a fait et avec sa mosquée il finira par devenir un saint pour les prochaines generations
le jour où elle a cesse de defendre la cause des femmes pour defendre la cause des islamistes elle qui ne porte pas le foulard, c'est tout vu tout compris: flouss flouss et flouss, khoussara , la jeunesse, elle s'en tape