Sonatrach : le rapport tardif d’activité 2011 est attendu mais expéditif

Abdelhamid Zerguine, directeur de Sonatrach.
Abdelhamid Zerguine, directeur de Sonatrach.

Dans le rapport d’activité, Sonatrach 2011 qui vient juste s’être publié, son PDG n’a pas manqué de faire l’éloge de ses ressources humaines. Selon lui, l’entreprise dispose de l’expertise et de l‘expérience pour relever les nouveaux et difficiles challenges imposés par une conjoncture internationale et de plus en plus de compétitivité.

Le rapport se veut confiant et offensif et se démarque des compagnies qui doutent et se replient face à la crise économique mondiale. Ce n’est qu’en 2011 que la plus grande société du pays pense intégrer les moyens nationaux. Pourtant en 2013, l’inquiétude suscitée par les responsables de cette entreprise autour de l’exode du personnel expatrié des sociétés BP et Statoil sur le site gazier de Hassi Moumen de In Salah n’est pas du tout de nature encourageante et montre que Sonatrach reste encore fortement dépendante de l’expertise étrangère. Rien que sur ce site, plus de 250 étrangers de différentes nationalités auraient quitté le pays. A en juger par la mine des responsables en charge de l’activité de ce champ gazier, les travaux de développement risquent d’être retardés et l’entrée en exploitation prévue dans deux ans est sérieusement compromise.

Le responsable du champ gazier de Tiguentourine confirme un redémarrage dans un mois mais guidé à distance par les étrangers (01). Ces mêmes compétences dont se gargarise ce responsable ont laissé passer une erreur flagrante pour ne citer que celle-là (02) dès la douzième ligne du message du président d’un aussi grand groupe pétrolier. En effet, la moyenne annuelle du brut de référence en 2010 a été de 95 dollars par baril et non de 9,5 comme c’est mentionné. C’est une coquille d’inattention diront certains ! mais, n’est-ce pas ce manque de vigilance qui a laissé des terroristes envahir des installations qui représente plus de 1/10ème de la production gazière du pays et près du 1/5e des exportations de la même ressource. L’effectif de l’entreprise a grimpé en une année à plus de 7,42%, s’agit-il d’un effectif de remplacement ou des recrutements sur des coups de fil ? Près de 44% des effectifs restent en dehors du cœur de métier. Si l’on prend en compte les tâches accessoires du métier de base, on peut arriver sans aucune difficulté à une proportion de 1 productif pour 1 soutien, ce qui est vraiment très loin de la norme moyenne dans un tel métier, et par voie de conséquence explique l’abandon des activités d’expertise au profit des étrangers.

Près de 36% des effectifs ont suivi pendant l’année 2011 au moins un stage pour une valeur totale de plus 26 millions de dollars, soit près de 2,23% de la masse salariale. Il reste tout de même à savoir si cet effort de formation a profité aux 28 919 agents et cadres du cœur de métier ou au personnel des différents sièges comme de coutume et pour des trainings de tourisme en Algérie et à l’étranger. Sur le plan de la productivité et de la croissance, il est tout à fait normal que la fiscalité pétrolière versée au trésor public augmente comparée à 2010 car le cours moyen du brut de référence s’est élevé de près de !5% passant durant la même période de 95 à 111,28 dollars par baril, donc il ne s’agit pas d’un effort intensif mais des facteurs exogènes ont contribué à cette augmentation calculée sur le chiffre d’affaires de l’entreprise.

Enfin et pour clore ce chapitre des ressources humaines, comment peut-on parler de relève et de perspectives d’avenir lorsque la majorité des cadres dirigeants ont plus de 60 ans, à commencer par le PDG lui-même ? En ce qui concerne les 20 nouvelles découvertes et en supposant qu’elle aient permis de mettre en évidence que des réserves prouvées ce qui est loin d’être le cas, elles ne représentent qu’à peine 0,02%. Ceci n’a même pas été lisible sur les différents rapports, entre autres BP qui estime les réserves prouvées de l’Algérie à 12,2 milliards de barils sans changement depuis au moins 2010 (03). L’effort d’exploration est toujours concentré dans la partie occupée par la recherche et la prospection sur les 178178 km2, seulement 24 885 km2 ont été touchées par la sismique 2D et 3D et les 761 754 km2 n’ont suscités aucun intérêt de la part des investisseurs. On peut dire qu’en matière d’exploration, on tourne autour de ce qui existe et rien de nouveau. Sur les 78 puits d’exploration et les 161 de développement, il aurait été très intéressant de connaître la part réalisée par les entreprises du groupe comme l’ENTP et l’Enafor. A en croire le syndicat de Naftal, l’entreprise filialise pour ensuite marginaliser ses propres "filles". Les 12,2 milliards de dollars équivalent au taux d’échange 2011 à 879 milliards de DA ont servi beaucoup plus aux entreprises étrangères et certainement au détriment de celles publiques. Petrofac sur le gisement de In Salah, au Japonais JGC dans le projet Bir Sbaa et In Amenas, enfin Hyundai pour le projet Bir M’sana. Tous ces accords sont passés sous la forme de contrat EPC et EPCM, ce qui est un aménagement contractuel lors de la prise en charge de la réalisation complète d’un projet, de sa proposition jusqu’à sa mise en service. Fourniture d’un projet clés en mains en assurant un planning et un prix fixe selon l’étendue précisément spécifiée de l’ouvrage.

En général les contractants favoriseraient dans ce type de relation des sous-traitants étrangers. Le reste concerne les dépenses sur le gazoduc Medgaz dans lequel les entreprises sont impérativement d’outre atlantique. Bien que les exportations en volume aient été maintenues au même niveau que celui de 2010, leur valeur est passée à 71,8 milliards de dollars en 2011 contre seulement 55,7 en 2010. Cet écart s’explique comme mentionné auparavant par l’augmentation du prix moyen du brut de référence durant la même période. En absence d’une alternative aux hydrocarbures dans l’économie algérienne, le rapport met en exergue l’importance de la croissance de la consommation interne de l’énergie notamment en carburant. Les importations sont en hausse de 78% par rapport à 2010 pour passer à`plus de 2,3 millions de tonnes notamment en gasoil et essence. Aucune mesure n’a été prise pour contrer cette évolution, le lecteur aura tout le loisir d’imaginer la situation en 2013. Près de 364 millions de dollars représentent la charge du personnel sans aucun montant n’est indiqué pour la recherche en perspective comme si l’entreprise se contente de subir pour faire tout par les étrangers et ne dispose d’aucune stratégie à`même d’assurer sa`pérennité en dehors d’agir pour le compte de l’Etat en vendant le pétrole et mettre des sous à sa disposition. Est-ce une solution pour un groupe qui entretien plus de 51 000 agents ? Plus de 131 millions de dollars sont consentis pour la santé, la sécurité et l’environnement, pourtant les accidents n’ont pu être évités comme ceux à plusieurs reprises à Skikda. Sonatrach participe dans une proportion pouvant atteindre jusqu’à 100% dans 45 entreprises en Algérie. Une enquête récente a montré que ces participations posent plus de problèmes pour l’entreprise mère qu’elles en contribuent à son essor. Les filiales par exemple revendiquent l’alignement des salaires de leur personnel sur celui de Sonatrach.

A l’international, 11 sur 24 participations restent budgétivore mais ne donnent rien notamment celles situées dans les pays à forte perturbation comme la Libye et l’Egypte. Si dans son bilan, l’entreprise a réussi à ramener ses emprunts et ses dettes financières à 7623 millions de DA soit près de 109 millions de dollars, le compte de résultat par contre montre une charge du personnel de 120393 millions de DA en augmentation par rapport à celle de 2010 de près 32%. Pour visualiser ce chiffre,il s’agit de plus 1,72 milliards de dollars. Si on enlève les charges salariales, le reste, il sera réservé aux missions á l’étranger, des rappels etc. Ce sont les préoccupations de la majorité de l’encadrement du matin au soir donc l’innovation n’est certainement pas pour demain……

Rabah Reghis, consultant et économiste pétrolier

Renvois

(01) Propos recueillis par Kaci Racelma d’Afik.com publié pat matindz le 5/2/2013

(02) Voir rapport d’activité 2011 sur le site www.sonatrach.dz

(03) Statistical review of world energy 2012

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Commentaires (8) | Réagir ?

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fateh yagoubi

merci

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adil ahmed

merci

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