Au premier ministre : "Faites quelque chose, la santé publique se meurt à Khenchela !"
L'Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC) interpelle le premier ministre sur la situation de la santé publique à Khenchela.
Alger et Khenchela, dimanche 3 février 2013. Monsieur le Premier ministre, vous n’ignorez pas que l’accès aux soins pour nombre d’Algériens, les plus démunis d’entre eux plus particulièrement, est de plus en plus difficile. Beaucoup d’hôpitaux publics ne sont plus en situation d’assurer des prestations médicales de qualité. Votre visite récemment à Saïda vous a permis d’avoir un aperçu concret sur le marasme que subissent les établissements publics de soins : vous avez été amené dans cette wilaya à prendre des mesures immédiates à l’encontre des gestionnaires indélicats.
Malheureusement, Monsieur le Premier ministre, il y a au moins une région en Algérie où la situation est bien plus grave que Saïda : il s’agit de la wilaya de Khenchela. Quand les représentants locaux du Syndicat algérien des paramédicaux (SAP) sont venus nous voir pour nous faire part de ce qui se passe dans les structures publiques de cette région, nous avions peine à croire les faits relatés. Quand ils ont mis à notre disposition des documents photos illustrant les faits évoqués, on se serait cru revenir 40 ou 50 ans en arrière, mais là aussi nous avions encore quelques doutes sur la véracité des accusations de mauvaise gestion, de gabegie, de gaspillage, de laisser-aller, et d’état d’abandon dans lequel se trouvent les hôpitaux et unités sanitaires de la wilaya de Khenchela. Mais cette situation a été aussi, récemment encore, abondamment décrite par nombre de quotidiens à travers plusieurs articles de presse édifiants.
Monsieur le Premier ministre, face à cette situation, notre association a décidé d’envoyer un représentant sur place, d’autant plus que certaines informations faisaient aussi état de graves dérives en matière d’investissements hospitaliers, dont le non respect de la réglementation des marchés publics.
Le porte parole de notre association, qui est médecin spécialiste de formation, a pu visiter nombre d’hôpitaux de la wilaya de Khenchela, a rencontré des travailleurs de la santé, des médecins – tant du secteur public que du secteur privé-, des usagers de la santé, des fonctionnaires de la wilaya et des APC. Non seulement, il confirme les déclarations des travailleurs syndicalistes du SAP, mais son constat est encore plus accablant : la situation est très grave, nous sommes dans une situation de « Non assistance manifeste à population en danger » ! Comment cela est-ce possible que de nos jours cela puisse encore exister ?
Comment l’Exécutif de la wilaya a-t-il pu laisser faire sans réagir ? Nous croyons savoir que le Secrétaire général de la wilaya a une grande responsabilité à ce sujet.
Comment le ministère de la Santé demeure à ce jour silencieux et impuissant à prendre les décisions urgentes qui s’imposent, alors qu’il a été régulièrement informé par les syndicalistes du SAP, et ce, depuis plusieurs semaines, avec écrits à l’appui ? Plus grave encore, le Secrétaire général du SAP pour la wilaya de Khenchela – M. Mohamed Taïbi -, a été illégalement et injustement suspendu de ses fonctions hospitalières par le directeur de santé de la wilaya.
Monsieur le Premier ministre, là aussi, comment cela est-ce possible qu’en 2013, des gestionnaires que les faits accablants accusent, puissent continuer, en toute impunité, d’utiliser de pareilles méthodes que l’on croyait révolues ? Ce même Mohamed Taïbi avait été condamné – le comble pour un dénonciateur, il y a quelques semaines pour diffamation, suite à une plainte directeur de santé de la wilaya de Khenchela.
Monsieur le Premier ministre, le 9 décembre dernier, saisissant l’occasion de la célébration de la Journée des Nations unies contre la corruption, le ministre de la justice annonçait, à juste titre, une révision prochaine de la loi du 20 février 2006 relative à la prévention et la lutte contre la corruption, dans le sens du renforcement de la protection des dénonciateurs, des témoins et des victimes de la corruption. En attendant cette révision, les syndicalistes du SAP de Khenchela méritent surtout d’être félicités et encouragés pour avoir dénoncer des faits extrêmement graves qui éclaboussent le secteur public de la santé, et leur Secrétaire général doit bénéficier de la levée de sa suspension. Les correspondants locaux de la presse écrite ont fait aussi un travail remarquable qui doit connaître un prolongement à travers des mesures urgentes pour mettre fin à l’impunité dont jouissent les gestionnaires indélicats du secteur de la santé à Khenchela.
Monsieur le Premier ministre, comment est-ce possible que le directeur de la santé de la wilaya de Khenchela puisse être encore sur place depuis 11 longues années, et le comble, avec un statut d’intérimaire ? Oui, Monsieur le Premier ministre, le directeur de la santé de la wilaya de Khenchela est intérimaire depuis 11 ans, à une haute fonction aussi sensible que celle de garantir le droit constitutionnel à la santé pour les citoyens de Khenchela. Ces derniers, que le porte parole de notre association a rencontré en nombre lors de son séjour à Khenchela, se sentent oubliés, humiliés et marginalisés. Ils savent que des budgets conséquents sont affectés au secteur de la santé publique à Khenchela, mais que dans les faits l’accès aux soins est de plus en plus limité.
Saïda et Khenchela sont deux wilayas d’une même République, une et indivisible : les décisions nécessaires prises à Saïda doivent être valables aussi pour Khenchela.
Monsieur le Premier ministre, nous sommes persuadés que vous répondrez positivement à notre appel, et que les citoyens de Khenchela, au moins pour l’accès aux soins – une question de vie et de mort -, retrouveront leur statut de citoyens à part entière, et ne se considéreront plus comme des citoyens entièrement à part. Monsieur le Premier ministre, notre association est mobilisée aux côtés de toutes les organisations de la société civiles de la wilaya de Khenchela
Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC)
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