Biens mal acquis des Ben Ali : leur avocat dénonce une vente "illégale"
Maître Azouri estime que 90% des biens mis en vente n'appartenaient pas à son client et menace de saisir le Conseil des droits de l'homme. Au total, ce sont plus de 12 000 articles qui ont appartenu au clan Ben Ali-Trabelsi qui sont exposés et mis en vente pendant un mois dans la salle d'un hôtel chic de Gammarth, au nord de Tunis.
L'avocat libanais du président déchu Zine el-Abidine Ben Ali a affirmé lundi que l'expostion-vente de biens ayant appartenu à l'ancien président et à ses proches était "illégale" : "Les autorités tunisiennes ont commis une action illégale et nous porterons l'affaire devant le Conseil des droits de l'homme des Nations unies", a indiqué Me Akram Azouri, dans un communiqué transmis à l'AFP. "Il s'agit d'un déni du gouvernement tunisien à l'égard des engagements internationaux de la Tunisie." L'avocat a affirmé en outre que 90 % des biens et objets exposés à la vente n'appartenaient pas à son client, les 10 % restants ayant été acquis, selon lui, "légalement et légitimement durant un quart de siècle de règne".
"90 % des biens et effets exposés et filmés n'appartiennent ni au président Ben Ali ni à son épouse", a précisé l'avocat, accusant le gouvernement dirigé par les islamistes "de déformation de la réalité" et "falsification de faits". La déclaration de l'avocat a eu lieu au lendemain de l'ouverture au public d'une exposition-vente de milliers de biens et objets de luxe ayant appartenu à l'ancien couple présidentiel et 114 personnes de leurs proches.
Corruption
Des Tunisiens y ont vu l'étendue du gaspillage de l'argent public et découvert l'avidité des anciens maîtres de Tunis pour le luxe, alors que leur pays était miné par la pauvreté et le chômage. Les biens ont été confisqués et placés sous le contrôle du ministère des Finances qui espère récolter au moins 10 millions d'euros à reverser au budget de l'État. L'ex-président Ben Ali a été renversé à l'issue de la première des révolutions arabes (17 décembre 2010 - 14 janvier 2011) et vit depuis avec sa femme en Arabie saoudite. Son régime était marqué par la répression et un système de corruption dans lequel ont trempé ses nombreux gendres et beaux-frères du clan Trabelsi.
Les bijoux des Ben Ali-Trabelsi
Une Ferrari rouge vif ayant appartenu à Imed, le neveu gâté de Zine El Abidine Ben Ali et son épouse Leïla Trabelsi, une Porsche cabriolet flambant neuve destinée à leur enfant cadet trônent sous haute garde à l’entrée de la salle Cléopâtre, au décor pharaonique, face à la baie couleur turquoise. La collection de 39 voitures de luxe, dont une vingtaine seulement étaient exposées hier, intéresse au plus haut point un acquéreur anonyme agissant pour le compte d’un prince d’Arabie Saoudite. "Nous avons fait la demande trois fois depuis février, mais nous avons dû attendre cette exposition. Aujourd’hui, nous sommes prêts", confie-t-il.
Autres vedettes de l’exposition organisée par le gouvernement pour un mois mais qui pourrait être prolongée, des Mercedes et BMW de série limitée, une Lamborghini blanche et une Bentley continental sport. Egalement en vente, une Cadillac blindée mise en circulation six mois avant la chute de Ben Ali, en janvier 2011, sous la pression d’une révolte populaire. "No comment !", lance un jeune couple BCBG caressant une Maybach 62, "un cadeau du Libyen Kadhafi à Ben Ali", dit-on.
Costumes, cravates et ensembles chic côtoient baskets, jeans et blousons dans les salles de l’hôtel. "Environ cent personnes étaient présentes à l’ouverture", se réjouit Affef Douss, organisatrice en chef pour le compte du ministère des Finances, en évoquant "une bonne affluence".
Un pactole évalué à des millions d’euros
Le gouvernement espère récupérer 10 millions d’euros de la vente des biens ayant appartenu au clan Ben Ali Trabelsi. Le régime Ben Ali, le premier à avoir été renversé par la vague du Printemps arabe, était gangrené par la corruption et le népotisme. Mehdi Ben Garbia, député, explique être venu pour "se faire une idée de la manière avec laquelle l’argent du contribuable a été dilapidé". Tout comme les membres du gouvernement, les parlementaires n’ont pas le droit d’acheter. Les œuvres d’art, bibelots, meubles et tapis seront dans leur écrasante majorité vendus au plus offrant, leur valeur estimée dépassant les 5000 euros. On trouve notamment des animaux en or massif, des chevaux en cristal, un olivier en argent de 80 cm de haut, des horloges antiques...
Dans la dernière salle, gardée par des capitaines de la douane, la foule est fébrile devant les effets, fourrures et accessoires de grandes marques françaises, italiennes ou américaines. Les chaussures et sacs de Madame, réputée avide de luxe, sont proposés entre 300 et 1500 euros, soit deux fois le SMIC tunisien pour le moins cher.
Sur les 400 bijoux et parures confisqués par l’Etat, une vingtaine sont exposés. Pièce unique, le "collier de chien", un serre-cou fait sur mesure pour l’ex-Première Dame de Tunisie, illumine la salle avec ses 1000 diamants. Un médecin résidant en France discute avec un expert diamantaire, mais son épouse finit par l’éloigner. "Mon mari veut acheter, mais en réalité je suis dégoûtée. Ce sont des bijoux fabuleux mais qui racontent une histoire douloureuse."
Avec AFP
Commentaires (4) | Réagir ?
a quand la vente aux enchers des biens de botef et consors.
Il a du toupet l' avocat de Ben Ali, de vouloir saisir les tribunaux, pour la vente de biens mal acquis par son criminel de client. Si 90% des objets exposés n'appartiennent pas au clan Ben Ali, en quelle qualité peut' il ester en justice le nouveau gouvernement Tunisien.