Rencontre de Kampala sur la RDC : négociations ou mise au point ?

Le M23 plus que jamais sur le pied de guerre
Le M23 plus que jamais sur le pied de guerre

Les représentants politiques du M23 et une délégation officielle mandatée par le pouvoir de Kinshasa se retrouvent à Kampala, la capitale ougandaise, où se déroulera ce vendredi 7 décembre, en l’absence du président Joseph Kabila et de Jean-Marie Runiga, des pourparlers entre une délégation du pouvoir congolais et les représentants des agresseurs à la solde du Rwanda, du Burundi et de l’Ouganda.

Les avis sont partagés dans la capitale congolaise. En effet, la majorité de la population et de l’opposition est catégoriquement opposée aux négociations avec les agresseurs tandis que le pouvoir ainsi qu’une infime minorité de l’opposition et de la société civile y sont favorables. Une chose est certaine. Si la politique de la chaise vide n’est pas forcément la bonne, le fait de se parler ne veut pas obligatoirement dire qu’il faille négocier. D’autant plus que l’ordre du jour n’est pas encore clarifié.

Désaccord entre les deux délégations

Les agresseurs de la République Démocratique du Congo, en l’occurrence le M23, souhaitent évoquer, à l’occasion de la rencontre de Kampala, de nombreux sujets : notamment les revendications sociales des militaires mutins, la démocratie, les droits de l’Homme, la gouvernance, l’implication de la diaspora congolaise, la reconnaissance de l’opposant Étienne Tshisekedi comme le président élu… Mais les autorités congolaises, quant à elles, ont prévenu qu’elles parleraient seulement de l’application de l’accord du 23 mars, qui avait intégré dans l’armée les insurgés du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP)[1]. Le désaccord existe déjà, s’agissant de l’ordre du jour. Ainsi, les pourparlers de Kampala risquent-ils de terminer en queue de poisson. Si c’est le cas, Kinshasa montrerait sa bonne foi tandis que les agresseurs confirmeraient leurs vraies intentions : à savoir l’occupation de la région du Kivu, par des forces étrangères, en vue de la balkanisation de la République Démocratique du Congo.

Quitus du Parlement congolais

La délégation du pouvoir congolais, conduite par le ministre des Affaires étrangères Raymond Tshibanda, doit en effet axer les échanges sur les seuls points ayant conduit à l’existence même du M23, c’est-à-dire aux revendications en rapport avec l’accord du 23 mars 2009. De plus, les autres exigences des anciens membres du CNDP, même si elles sont légitimes, ne nécessitent pas que l’on prenne des armes pour déstabiliser le pays, de violer les femmes et les enfants, de semer la mort et la terreur, d’agir en intelligence avec les ennemis… Il existe d’autres façons, beaucoup plus pacifiques, de montrer le mécontentement populaire : les manifestations et les grèves, par exemple.

De toute évidence, les premières conclusions de ces pourparlers devront être soumises au Parlement. Cette institution devra se prononcer, favorablement ou négativement, en fonction de l’intérêt supérieur de la Nation congolaise. Le quitus parlementaire est donc nécessaire, conformément au premier alinéa de l’article 5 de la Constitution de la République Démocratique du Congo.

Attentes du peuple congolais

En aucun cas, dans sa plus grande majorité, le peuple congolais veut des négociations avec les agresseurs qui, dans l’absolue, méritent d’être poursuivis par les tribunaux aussi bien locaux, nationaux, régionaux qu’internationaux. Le peuple congolais attend plutôt de la délégation de Kinshasa qu’elle mette d’emblée les points sur les «i». Elle doit rappeler aux agresseurs qu’aucun citoyen congolais n’est au-dessus des lois de la République, notamment celles se référant aux dispositifs relatifs aux articles 63[3], 64[4], 66[5] et 67[6] de la Constitution. Effectivement, les citoyens Congolais n’ont pas que des droits mais aussi des devoirs au regard de la Nation.

Le peuple congolais attend aussi de la délégation conduite par Raymond Tshibanda de clamer avec «force et vigueur» que la République Démocratique du Congo est victime d’une agression décrétée par des pays étrangers. En conséquence, son exécutif aura recours aux dispositifs constitutionnels idoines – plus précisément aux articles 85 et 86 ainsi qu’au second alinéa de l’article 214[9] de la Constitution et fera appel, en tant qu’État souverain, à ses alliés d’Afrique centrale, de la SADC, de l’Union africaine et de la Francophonie dans une négociation globale pour pacifier dans les meilleurs délais l’ensemble du territoire national.

Gaspard-Hubert Lonsi Koko

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