Le Matin 23-10-2017 81818
Dans un communiqué, le Parti socialiste des travailleurs (PST) appelle à "la résistance unitaire contre l’autoritarisme et le libéralisme et à la défense des acquis démocratiques et sociaux !".
A moins de dix-huit mois de la présidentielle de 2019, le régime n’a pas résolu l’équation du remplacement de Bouteflika par un successeur consensuel. Il laisse planer le doute quant à l’éventualité d’un 5e mandat synonyme de la reconduction du modus vivendi de 2014. Cette crise chronique traduit un rapport de force instable entre les différentes factions au pouvoir, même si la "force de l’argent", représentée par le patronat privé et les nouveaux oligarques, semble gagner un peu plus de terrain. Mais, à cette crise politique s’est greffée, contrairement au « ciel serein » de 2014, une baisse drastique des recettes des hydrocarbures, dévoilant au grand jour le désastre économique des politiques libérales du régime. Les importations - érigées en mode de production - ont supplanté la production nationale et les velléités d’industrialisation du pays. La dépendance des seules recettes des hydrocarbures et des fluctuations du marché mondial s’est aggravée.
Sur le plan social, la situation est explosive. Alors que les travailleurs et les masses populaires n’ont pas fini de subir la détérioration des salaires et du pouvoir d’achat, M. Ouyahia, fraîchement redésigné, annonce d’emblée une nouvelle cure d’austérité et brandit la menace de supprimer les transferts sociaux. Il compte non seulement parachever la remise en cause, déjà entamée, de nos acquis sociaux, mais il s’emploie à céder ultérieurement aux pressions des ultralibéraux, du FMI et la BM qui exigent le démantèlement de l’Etat social, arraché par les sacrifices et la longue lutte du peuple algérien pour son indépendance et sa dignité.
En prétendant que les caisses de l’Etat sont vides, notamment pour les salariés et les retraités, Ouyahia crée un climat de peur afin de neutraliser les luttes sociales et différer toute revendication salariale des travailleurs ou d’amélioration du pouvoir d’achat des masses populaires. Autrement dit, les 100 milliards de dollars de réserves de change seront mis prioritairement à la disposition des multinationales et des patrons privés, et seront siphonné de la même façon que le Fonds de Régulation des Recettes (FRR) et s’évaporeront avec autant d’opacité que les 1000 milliards de dollars dépensés à tour de bras les dix dernières années.
Cependant, pour ne pas effrayer outre mesure « les investisseurs étrangers » et ne pas précipiter l’explosion d’un front social, déjà en ébullition à la veille des élections locales, Ouyahia tempère son alarmisme. Il annonce l’amendement de la loi sur les hydrocarbures au profit « des investisseurs étrangers », ainsi que la relance de l’exploitation du Gaz de schiste d’une part, et maintient le niveau actuel des dépenses dans la Loi de Finances 2018, se permettant même une légère augmentation du budget de l’équipement, d’autre part. Pour régler la facture du déficit public, il fait amender la loi sur le crédit et la monnaie, permettant ainsi le recours à « la planche à billets » pour une durée de 5 ans. Le pouvoir s’assure ainsi le soutien des puissances impérialistes, se donne les moyens d’éponger le déficit budgétaire et s’accorde un délai, jusqu’à la présidentielle de 2019, pour mettre en œuvre sa « thérapie de choc » et parachever le processus d’ajustement structurel libéral.
Si l’augmentation de la masse monétaire risque d’engendrer une dérive inflationniste, entraînant une spirale de dévaluation du dinar, elle servira surtout à payer les déficits avec de l’argent publique que la Banque Centrale va créer. Contrairement à la timide tentative de Tebboune, il s’agit pour Ouyahia d’épargner les patrons privés et les riches oligarques. Ils n’auront pas à rendre compte au sujet des 40 milliards de dollars de prêts non remboursés, ni des 12.000 milliards de Dinars d’impôts impayés, ni des dizaines d’autres milliards détournés sous forme de surfacturations et de transferts illégaux à l’étranger. Ces derniers, après avoir imposé le renvoi humiliant de Tebboune, qui ne visait pourtant qu’une limitation symbolique de leur gabegie, ambitionnent plus que jamais de faire main basse sur l’Etat et le centre de la décision politique. La séquence Tebboune a démontré non seulement l’impossible auto-réforme du régime, avec ou sans le « monarque Bouteflika », mais surtout l’impossible séparation entre « la force de l’argent » et le pouvoir politique qui en est l’expression et le garant des intérêts de classe.
Face à cette situation désastreuse les travailleurs et les masses populaires, quelques soient l’intensité ou le reflux de leurs luttes, n’ont pas baissé les bras de la résistance sociale et démocratique. A travers les syndicats autonomes ou dans les secteurs combatifs de l’UGTA, les travailleurs se mobilisent pour la défense des libertés syndicales, du pouvoir d’achat et des acquis sociaux. Les jeunes sans emploi s’organisent, tant bien que mal, dans des comités de luttes des chômeurs pour le droit au travail et pour de meilleures conditions de vie. Dans les universités, les étudiants revendiquent par le biais de leurs comités de luttes de meilleures conditions pédagogiques et sociales ainsi que des débouchés pour leur avenir professionnel. Dans les quartiers et les villages des comités citoyens luttent pour la réalisation d’infrastructures de base et pour le droit au développement local dans le respect de l’environnement. Contre l’oppression des femmes et pour exiger l’égalité des droits avec les hommes, des associations féminines et des collectifs de luttes résistent. Contre l’autoritarisme et la répression et pour la défense des libertés démocratiques et les droits de l’homme, des comités de lutte se constituent et des réseaux de solidarité se mobilisent.
Mais, ces luttes restent souvent isolées, non coordonnées et non centralisées. Elles ne transcendent pas le stade de revendications élémentaires et immédiates et ne se traduisent pas dans un projet politique alternatif. Dans ces conditions, elles ne peuvent pas transformer le rapport de forces en faveur des résistances populaires sociales et démocratiques.
Pour le PST, plus que jamais, ces luttes nécessitent la solidarité et l’unité du camp des travailleurs et des démunis. Plus que jamais, toutes les forces qui participent à la résistance sociale et démocratique sont appelées à engager les premiers pas dans la voie unitaire d’une convergence démocratique anti libérale et anti impérialiste, convergence qui pourra engendrer une alternative démocratique, progressiste et populaire permettant de rebâtir l’espoir.
- Contre la répression et l’autoritarisme : Mobilisons nous pour la défense des libertés démocratiques !
- Contre la misère et le libéralisme : Mobilisons nous pour la défense de nos acquis sociaux !
- Contre l’austérité et la paupérisation : Exigeons la justice sociale et les taxes contre les riches !
- Contre les détournements, la corruption et l’impunité : Exigeons des comptes et des poursuites !
- Contre l’arrogance et le pillage des puissances impérialistes : Défendons l’indépendance et la souveraineté nationales et réaffirmons la solidarité anti impérialiste avec les peuples en lutte !
Secrétariat National du PST
Alger, le 23 octobre 2017