Yémen : la puissante Garde républicaine visée par des opposants
Des opposants au régime yéménite ont capturé lundi 30 soldats sur une base de la Garde républicaine au nord de Sanaa, portant un coup au prestige du puissant corps d'élite, dirigé par un fils du président Ali Abdallah Saleh, en butte à une contestation populaire.
Depuis le début du soulèvement en février, des centaines de personnes ont été tuées par les forces gouvernementales. La répression s'est encore durcie la semaine dernière, depuis le retour vendredi du chef de l'Etat, soigné depuis trois mois en Arabie saoudite après avoir été blessé dans une attaque en juin contre son palais à Sanaa.
Dimanche, lors d'une allocution télévisée, Saleh n'a pas promis de démissionner immédiatement comme le réclament ses détracteurs, mais s'est dit engagé en faveur d'un accord -appuyé par Washington- qui prévoit un transfert du pouvoir en échange d'une immunité le protégeant de toute poursuite.
Ali Abdallah Saleh, qui a chargé son vice-président de superviser les négociations sur l'initiative émanant du Conseil de coopération des États arabes du Golfe (CCEAG), a insisté en faveur de la tenue d'élections présidentielle et législatives anticipées. Perspective qui, aux termes de l'accord, devrait cependant être précédée de sa démission.
Accusant ses opposants de coopérer avec Al-Qaïda et de comploter pour le renverser, il a en outre laissé entendre qu'il pourrait retourner en Arabie saoudite pour "poursuivre le traitement et récupérer dans les mois à venir". Son discours n'a pas convaincu ses opposants, qui ne lui font aucune confiance et considèrent qu'il cherche à gagner du temps tout en accentuant sa mainmise sur le pouvoir.
Tôt lundi matin, des combattants d'une tribu ralliée à l'opposition ont attaqué une caserne de la Garde républicaine à Dahrah. Selon un communiqué du ministère de la Défense, qui n'a pas fourni de plus amples détails, le commandant de la base Ali al-Keleibi a été tué dans les affrontements. Des responsables des services de sécurité yéménites ont précisé que 30 membres de cette unité d'élite, dirigée par le fils aîné du président, Ahmed, avaient été capturés par les combattants tribaux, dont au moins quatre auraient été tués et 27 autres blessés.
Il s'agit de la deuxième unité de la Garde républicaine à être la cible d'un assaut en moins d'une semaine. Des protestataires, soutenus par des soldats dissidents, avaient attaqué l'une de ses bases la semaine passée à Sanaa, au moment où la campagne de l'opposition contre Saleh s'intensifiait.
Dans une aggravation de la violence, au moins 150 personnes, pour la plupart des manifestants, des soldats dissidents et des membres de tribus, ont été tuées ces sept derniers jours dans les rues de Sanaa, théâtre de véritables combats de rues, les troupes loyalistes recourant à un usage de la force jugé excessif par beaucoup. Des obus de mortier et des armes anti-aériennes ont notamment été utilisés contre la foule désarmée des manifestants. Des tireurs d'élite postés sur des toits ont également pris pour cible les opposants défilant dans les rues.
Lundi, des milliers de protestataires étaient rassemblés pour une importante manifestation sur la place du Changement, épicentre du soulèvement, dans le centre de Sanaa, mais aucune information sur des heurts n'était pour l'heure rapportée.
Confronté à la colère de la rue, le président Saleh est également soumis à une intense pression de pays arabes voisins et d'Etats occidentaux pour qu'il transfère le pouvoir et essayer ainsi de mettre fin à une crise qui menace de plonger le Yémen dans le chaos le plus total.
"Il convient qu'il passe enfin de la parole aux actes et engage cette transition sans délai, dans l'intérêt du peuple yéménite", a jugé lundi le ministère français des Affaires étrangères, appelant par ailleurs les "autorités yéménites à assurer la protection des manifestants", à faire preuve de "retenue" et à respecter le cessez-le-feu.
AP
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