Israël au Salon du Livre de Paris : "Les écrivains arabes choqués et divisés", selon le journal le Monde
L'invitation d'Israël en qualité d'invité d'honneur du Salon du livre de Paris "en l'honneur du 60ème anniversaire de sa création" n'a pas manqué d'être interprété comme un acte politique. A quelques jours de l'ouverture du Salon, les appels au boycott se multiplient et la polémique entre les pour et les contre du boycottage fait rage. Les prise de positions des participants continuent de tomber, très contrastées d'un auteur à l'autre, d'un pays à l'autre. Le journal le Monde a sondé quelques écrivains "Arabes" sur cette question, dont des Algériens. (lire l'article suivant...)
Les écrivains arabes choqués et divisés
L'appel au boycottage du Salon du livre de Paris (14-19 mars) sera-t-il entendu et, surtout, massivement suivi par les auteurs du monde arabe ? Le choix d'Israël comme invité d'honneur, en cette année anniversaire de la création de l'Etat hébreu (1948), a provoqué la colère dans les pays du Proche-Orient et du Maghreb, où certains déplorent qu'une telle faveur soit accordé au "bourreau" des Palestiniens, selon le mot du président de l'Union des écrivains palestiniens, Taha al-Moutawakel.
"Il n'est pas digne de la France, pays de la Révolution et des droits de l'homme" d'accueillir un pays "occupant" et "raciste", a-t-il estimé, à Ramallah (Cisjordanie). Ce choix est "inacceptable" au moment où Israël se livre "comme jamais" aux "violations des droits de l'homme", a renchéri, au Caire, l'Union des écrivains égyptiens, allusion à la dernière opération de l'armée israélienne à Gaza. A Rabat (Maroc), l'Organisation islamique de l'éducation, des sciences et de la culture a demandé à ses cinquante pays membres de ne pas faire le voyage de Paris, pour éviter des "effets négatifs" sur les relations "entre la France et les pays musulmans". Le Liban, place forte de l'édition au Proche-Orient, s'est également rallié à ce mot d'ordre de boycottage.
"A ce jour, quatre stands collectifs, ceux de la Tunisie, de l'Algérie, du Maroc et du Liban" resteront vides, a précisé au Monde, mercredi 5 mars, la déléguée générale du Syndicat national de l'édition (SNE), Christine de Mazières. Ce qui n'empêchera pas la venue, "à titre individuel", de professionnels du livre du monde arabe, a-t-elle ajouté. Du côté des écrivains de ces pays, les positions sont plus contrastées. Pour tous, le Salon représente une "vitrine indispensable", pour faire connaître - et vendre - leurs livres, souligne Mme de Mazières. Mais la "pression morale" est lourde, souligne-t-elle. Surtout pour ceux qui vivent dans leur pays d'origine.
En Algérie, où le Syndicat national des éditeurs a rallié le mot d'ordre de boycottage - comme l'a fait le directeur du centre culturel algérien à Paris, le romancier Yasmina Khadra -, des écrivains connus, tels Boualem Sansal ou Maïssa Bey, seront pourtant au Salon du livre. De même, les Marocains Fouad Laroui ou Youssef Jebri. "Je viendrai au Salon, non pas comme citoyenne algérienne, mais comme écrivain", a expliqué au Monde Maïssa Bey, jointe par téléphone.
"IL FAUT LES ÉCOUTER"
"Si le choix d'Israël n'avait pas coïncidé avec l'anniversaire de la création de cet Etat, y aurait-il eu appel au boycottage ?", s'interroge la romancière, qui vit à Sidi Bel Abbès. "Si tous les auteurs israéliens représentaient la ligne du gouvernement, sans doute ce boycottage aurait été justifié. Or ce n'est pas le cas. Nombre d'entre eux ne sont pas d'accord avec la politique menée par Israël ; il faut donc les écouter. Ce sont des écrivains, il faut les prendre ainsi. Je regrette que l'on confonde écrivain et citoyen", conclut l'auteur de Bleu, blanc, vert (L'Aube).
"Tout boycottage de la littérature est, non seulement inutile, mais stupide. Je ne vais pas boycotter la littérature hébraïque !", réagit, de son côté, la romancière libanaise Hoda Barakat, citant ses auteurs israéliens préférés, Amos Oz, David Grossman et Itamar Levy. Néanmoins, Hoda Barakat n'ira pas au Salon du livre. "Qu'Israël célèbre l'anniversaire de sa création, je m'en fiche. Mais le Salon du livre n'est pas le lieu pour ça, explique-t-elle. Je déplore, comme mes amis juifs, la politique menée par le gouvernement israélien, qui les expose une nouvelle fois à la haine." En écho, la romancière israélienne Michal Govrin regrette "l'amalgame fait entre politique et littérature". Plus inattendu : l'historien israélien Ilan Pappe a annoncé qu'il ne viendra pas à Paris. Il se sent "dans l'impossibilité morale de prendre part à un Salon dont le thème principal est le soixantième anniversaire de l'Etat d'Israël".
Au Proche-Orient comme au Maghreb, les intellectuels sont divisés, voire déchirés. En Egypte, selon l'AFP, Gamal Ghitani a qualifié d'"infantilisme politique" l'appel au boycottage. Au Liban, Charif Majdalani estime que participer ou pas au Salon du livre n'est pas l'essentiel. Ce boycottage, explique-t-il dans L'Orient-Le Jour, montre bien que les pays arabes n'ont "toujours pas compris qu'Israël se nourrit largement de nos démissions et de notre inexistence culturelle sur la scène internationale".
Quel que soit le résultat de cet appel, le SNE, qui prend "très au sérieux" les questions de sécurité, a prévu de "renforcer" le dispositif policier.
Christine Rousseau et Catherine Simon
Commentaires (2) | Réagir ?
Il ya de quoi boycotter toute maniféstation culturelle, au Maroc les juifs massacrent l'univérsité et les écrivains même francophones par le délégué provençial hay mohammadi casablanca.
voir google : Said Benbiga, raoul yacoubi et le plus dangereux Othmani énnemi du ministre de la culture au Maroc.
Tout ce que je retiens de l’article c’est la lamentable intervention de Mayssa Bey, à qui il faudrait préciser que parmi tous ceux, écrivains ou éditeurs qui ont décidé de boycotter cette manifestation culturelle dédiée à Israël « en honneur du 60 ième anniversaire de sa fondation », aucun ne parler de boycotter les livres ou des auteurs de ce pays, dont quelques uns pourtant (tel Yehoshua, qui se définit comme le prophète du Mur et d'autres propositions inhumaines... comme la destruction de la centrale électrique dans la bande de Gaza), sont des racistes déclarés et des partisans de la poursuite de la colonisation de ce qui reste de la Palestine. L’ironie de l’histoire c’est d’entendre pareils arguments dans la bouche d’une femme dont le père est mort dans un combat libérateur contre le colonisateur. J’aimerais dire à Mme Mayssa Bey qu'il n'est pas utile d'envelopper son opportunisme dans cette ridicule argumentation faite des lieux communs ressassés qui consiste à présenter la littérature et la culture en général comme un domaine de la production humaine à part, singulier ; à dépeindre (et à se dépeindre par la même occasion) les écrivains comme des êtres vivant dans des limbes, étrangers à toute contingence et événement politique ; à en faire des individus placés au-dessus de la mêlée qui ne seraient pas concernés par les empoignades auxquelles se livre la grouillante l'humanité, bref des êtres apolitiques auxquels ne se poseraient aucune des questions morales de leur temps, telle que celle à laquelle nous confronte la question palestinienne : Peut-on se taire et détourner les regards face la barbarie et à l'oppression d'un peuple sur un autre ? Mme Bey conçoit la littérature comme un "milieu" vierge, non pollué par la politique. Quel angelisme ! Grâce à la virginité que lui confère son appartenance au milieu "deshommesdelettres" elle peut se départir de sa nationalité quand elle le veut. elle sera donc au salon de Paris en tant écrivain, avant tout. Je veux bien, Mme bey a bien publié quelques livres, mais je peux dire aujourd'hui qu'elle est un écrivain sans conscience. Un jour, elle est la grande représentante des lettres algériennes, l'auteur immergé dans son terroir, le lendemain, elle devient un pur esprit sans attache. La bonne blague !
Je vous lui conseille ici le poème d'un israélien qu’elle n'aura pas l'occasion "d'écouter" à Paris, puisqu'il a décidé, lui, de boycotter cette manifestation. Puisse-t-elle en prendre un peu d’humanité
CULTURE
Le signe de Caïn n’apparaîtra pas
sur le soldat qui tire
sur la tête d’un enfant
depuis une colline au dessus de l’enceinte
autour du camp de réfugiés
parce que sous le casque
pour parler en termes conceptuels
sa tête est en carton.
D’autre part,
l’officier a lu L’Homme révolté [1],
sa tête est illuminée,
à cause de cela il ne croit pas
au signe de Caïn.
Il a passé son temps dans les musées
Et quand il pointe
le fusil vers l’enfant
comme un ambassadeur de Culture,
il met à jour et recycle
les eaux-fortes de Goya
et Guernica
Aaron Shabtai
[1] : livre d’Albert Camus